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| Mieux vaut être mal accompagné que seul | |
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+3Dakota Earnshow Eve M. Todrovitch Gregory Williams 7 participants | |
Auteur | Message |
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Gregory Williams
Maladie mentale : Hématophobie
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Feuille de personnage Sac à dos: Pouvoirs : Bourse: 960 rubz
| Sujet: Mieux vaut être mal accompagné que seul Dim 17 Mai - 20:55 | |
| >> En provenance du train Tombstone/CandylandLe bruit de la claque qui atterrit sur sa figure fut le déclic. Sa vision cessa d’être trouble, son cerveau commençait à se débarrasser de la brume qui l’étouffait, et le visage de sa sœur disparut. Secouant la tête pour reprendre ses idées, il réalisa à quel point il était tombé bas. Encore sous le choc, il regardait Dakota qui le sermonnait. Elle avait raison, il était faible, encore plus que ce qu’il ne le pensait lorsqu’il était à Ellipse. A l’époque il pensait que sa faiblesse venait uniquement du fait qu’il était à poil niveau pouvoirs et équipement, mais il était en réalité faible à l’intérieur, incapable de se contrôler. Dans sa tête, un conflit s’établissait entre la peur du sang et la peur de finir moins que rien à force d’être trop effrayé. D’un côté ses cauchemars tentaient de l’envahir, et de l’autre il tentait d’être fort. La vision qui s’offrait à lui n’aidait pas. Qu’est-ce que ça pouvait bien faire d’avoir du sang sur les mains putain, c’était un liquide vital, qui ne s’écoulait pas en grande quantité, et qui n’allait sûrement pas le mener vers la mort. Il n’avait pas de blessures graves, rien. Alors pourquoi avait-il si peur ? Le drame qui avait menacé ses parents était dans le passé, mais ce souvenir continuait de le hanter. Comme si la claque n’avait pas suffi, il se menaça de s’en faire une autre. D’un côté sa tête voulait sombrer et tout oublier, s’abandonner et laisser court à la souffrance. De l’autre, une partie de lui qui voulait mettre son esprit à feu et à sang s’enrageait et gagnait de la puissance. Il fallait qu’il soit plus fort. La partie rebelle cria un grand coup. Une énorme demande, plainte qui reflétait le tourment du jeune homme. Ce cri intérieur fut la porte de sortie de son esprit encore embrumé. La réalité vint à lui, et il était prêt. Pour l’instant il avait réussi à surmonter sa phobie, mais il restait fragile. Il se leva, et partit tout d’abord en direction du train. Il n’était pas prêt de partir, et Gregory décida de partir marcher autre part. Non il n’allait pas enlever le sang de son corps, il allait prendre cela comme marque de sa première victoire sur sa phobie, jusqu’à ce qu’il revienne au train. L’hématophobe voulait juste être seul, loin de tout problème en attendant leur départ. Dakota avait beau être là pour lui et l’aider, elle n’allait pas toujours la babysitter. Il fallait qu’il apprenne à se débrouiller seul avant de pouvoir mériter l’amitié de quiconque. En tout cas au moins celle de l’adolescente. Cette perdition l’avait mené vers sa sœur. Elle lui manquait, et il ressentait le besoin de la voir, de lui confier tout, mais Madilyn n’était pas là, et il ne le voulait pas. C’était son aventure, son opportunité de guérir, et de se détacher de sa famille. Il les aimait plus que tout au monde, mais il allait devoir tracer son propre chemin au bout d’un moment. Ce chemin il devait l’emprunter seul, pour espérer un jour revenir sain et sauf à la maison. Il se refit la promesse qu’il allait devenir plus fort, et que quand il reviendrait, il serait un homme différent. Plongé dans ses pensées, il ne vit pas la pluie venir. Il se redirigea vers le train, et trouva un compartiment vide qui avait été épargné lors de l’attaque. Il alla ensuite au cabinet, où il put laver sommairement sa peau, et essayer de ne pas ressembler à un mort-vivant. Une fois ses besoins faits et son aspect physique amélioré, il retourna à la cabine. Peut-être se souciait-il vraiment trop de son état physique ? Une chose était certaine, son hygiène allait être digne des égouts s’il ne se lavait pas dans la semaine. Lorsqu’il entra dans la cabine, il fut surpris d’y retrouver Eve, et bizarrement accepta sa compagnie malgré la vue dans le miroir. Il n’était pas à ça près dans les émotions de la journée. Le reste du voyage fut mis en ellipse par le sommeil qui gagna son corps. A nouveau sorti d’un sommeil sans songes, l’arrivée à la gare sonna la fin de leur aventure de dingue en train. Vérifiant qu’il avait bien tout sur lui, il sortit sur le quai et retrouva Dakota, qui l’attendait. Il hocha la tête à sa question, et suivit la blondinette à travers la ville. Si lui ne savait pas où aller, Dakota elle semblait sûre d’elle. L’hématophobe se réconforta dans l’idée qu’elle non plus ne devait pas savoir où leur hôtel était. Ils marchaient un peu au hasard, et en même temps qu’il marchait, Gregory s’efforça de retenir leur chemin, par précaution et pour s’entraîner. Puis ils s’arrêtèrent. - Faut croire que la générosité des agents de la voie ferrée est limitée. | |
| | | Eve M. Todrovitch
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Lun 18 Mai - 10:42 | |
| Au travers la fenêtre de « leur » compartiment, Eve observait les nuages orageux qui crachaient leur fiel sur la plaine brûlée par le soleil. La nuit était tombée, opaque ; seule la lueur fugace des éclairs qui déchiraient le ciel éclairait parfois les environs. Le vacarme de l’averse sur la carcasse métallique du train couvrait les rumeurs de voix qui allaient toujours de bon train et ce n’était pas plus mal. Elle était lasse d’entendre des imbéciles tergiverser sur ce qui s’était passé.
Quand Gregory arriva, elle le détailla intensément de ses yeux glacés. Il avait l’air d’avoir reprit ses esprits mais à ses yeux, il était devenu l’incarnation de la victime pathétique. Son âge n’était pas une excuse : il était à peut-être aussi jeune qu’elle quand elle avait commis son premier meurtre. Elle s’en souvenait avec une clarté terrifiante. Pas de remords, ni de culpabilité, juste le soulagement d’une pulsion. « Il l’avait mérité »… oui, comme tous les autres. L’hématophobe lui, il se laissait abattre, protégée par une gamine. La détenue détourna le regard : qu’importe, elle n’avait pas envie de l’aider à retrouver ses couilles, ce n’était pas ses affaires.
Bientôt, elle fut seule, perdue dans la contemplation de l’orage. Gregory dormait, insouciant. Elle aurait pu le tuer, lui faire les poches, n’importe quoi. C’était bien pour ça qu’elle ne dormait jamais dans les transports en commun. Combien d’histoire de sacs qui disparaissent parce qu’on s’était assoupi ? Combien de femme qui se font agresser au réveil ? Eve se souvenait même d’anecdotes de filles qui se font violer pendant leur sommeil et se réveillent quand il est trop tard.
Rochel. Elle pensa à lui parce que la dernière fois qu’elle avait partagé une nuit avec quelqu’un à Dreamland, c’était avec Jade, Matthew et Rochel. Que devenait-il ? La dernière fois qu’elle l’avait vu, il venait de retrouver son ombre mais avait l’air à peine plus en forme. La paranoïaque se surprit à souhaiter qu’il croise sa route à nouveau. C’était une pensée ridicule et inavouable pourtant : non seulement il était d’une passivité à pleurer mais en plus, Dreamland était bien trop vaste. Revoir l’insomniaque était sans doute encore moins évident que de se réveiller.
De toute façon, tu sais qu’on ne peut se fier à personne. Encore moins aux hommes. Souviens-toi de ta mère... Souviens-toi de ce pauvre type en Arizona. Et Liam. Et de tous les autres. Ils sont biens jusqu’à ce que leur vraie nature ressorte. Tu le sais, Eve. Tu le sais.
Les pensées traversaient sa tête malade. Mesquines. Démentes. Susurrée par une voix glacée si aiguisée qu’elle déchirait un peu de son cerveau à chaque fois, le laissant en lambeaux. Un frisson parcouru son corps endolori, lui laissant un arrière-goût qu’elle ne connaissait pas vraiment. Un cocktail d’amertume et de résignation qui pourrait presque ébranler sa carapace. Presque.
Quand le train fut arrivé en gare, Dakota reparut dans leur cabine pour inviter Gregory à la suivre. Quand ses yeux bleus rencontrèrent ses orbes bruns Eve comprit que l’invitation s’étendait à sa personne, même si ça ne ravissait pas la gamine. Elle s’en fichait royalement : ce n’est pas comme si elle comptait monter avec eux une association de joyeux voyageurs. Plus vite ils seraient à l’hôtel, plus vite ils pourraient chacun vivre leur vie. En tout cas, c’est ce qu’elle croyait. Après avoir marché quelque minute dans une minuscule agglomération qui regroupait en fait des épiceries douteuses, une station essence, quelques vieilles baraques et un bistrot fermé, ils trouvèrent un hôtel minuscule qui ne devait pas avoir plus de 4 ou 5 chambres. Son enseigne était éclairée par des loupiotes jaunâtres qui semblaient grelotter. A l’accueil, on leur apprit que la compagnie ferroviaire avait effectivement fait une réservation à leur intention… mais il s’agissait d’une suite mixte pour 3 à 5 personnes.
En montant les escaliers en bois, très propres, ce qui contrastait avec l’extérieur peu avantageux, Eve commençait sérieusement à se dire qu’il y avait anguille sous roche. Mais quand l’hôtesse d’accueil ouvrit la porte d’une large pièce au centre de laquelle trônait un immense lit qui pourrait accueillir au moins 4 personnes de sa corpulence, elle aurait presque éclaté de rire si… bah si elle n’était pas elle. Au lieu de ça, elle dévisagea la jeune femme de ses yeux glacés, attendant visiblement qu’elle déclare que c’était une plaisanterie. Malheureusement, ce n’en était pas et l’hôtesse prit rapidement congé en assurant qu’ils pourraient la trouver à l’accueil s’ils avaient besoin d’elle.
- Et bah justement...
Eve redescendit l’escalier, portant toujours sa hotte à bout de bras à défaut de pouvoir la mettre sur son dos, et se replanta devant la jeune femme qui sursauta en la voyant. Se penchant légèrement par-dessus de comptoir, la taularde essaya de sourire mais elle ne parvint qu’à faire frémir la commissure de ses lèvres.
- Vous avez dû vous tromper, affirma-t-elle froidement, je ne « peux pas » partager une chambre, et encore moins un lit, avec ces deux personnes.
Non elle ne pouvait pas. Comment trouver le sommeil aux côtés d’une adolescente qui pourrait très bien l’égorger dans son sommeil pour la dépouiller ? Elle en avait suffisamment vu pour savoir que Dakota en était capable. C’était tout bonnement hors de question. Intimidée par la russo-américaine, l’hôtesse fit mine de pianoter sur son ordinateur avant de dire de façon mal-assurée :
- Je suis désolée, il n’y a que cette réservation et… euh… on est complet, je ne peux pas vous changer de chambre. | |
| | | Dakota Earnshow
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Jeu 21 Mai - 21:00 | |
| L'air était si chargé d'humidité qu'un brouillard saumâtre s'était formé, masquant les pieds du groupe qui déambulait à la recherche de leur hôtel. Pas un bruit à cette heure tardive, pas une personne pour les renseigner. Tout ce que Dakota voyait c'était des rues désertes et des volets fermés. Heureusement leurs errances finirent par les mener à un hôtel minable qui portait le nom qu'on lui avait indiqué. Ce n'était pas du grand luxe mais elle avait vu pire. Entre ça ou dormir dehors le choix était vite fait. - Il n'y a rien de correct dans cette ville, que voulais-tu qu'ils réservent d'autre ? Espérer mieux était utopique.Une hôtesse d'une vingtaine d'année les accueillit avec un sourire avenant et les guida à travers l'hôtel dont l'intérieur contrastait drastiquement avec l'extérieur. C'était une surprise plutôt agréable mais pas assez pour compenser la suivante... un lit pour trois, vraiment ? Autan dormir en compagnie était concevable, autant pour Eve c'était une autre affaire. Les lèvres pincées et le regard désapprobateur, Dak' déposa sa hotte à droite du lit avant d'examiner soigneusement la pièce dans l'espoir d'y trouver un lit d'appoint, ou même une simple baignoire. Hélas tout ce qu'ils avaient à disposition était ce lit grotesque, une télévision et une petite salle de bain dotée de toilettes et d'une douche. Pas l'ombre d'un matelas caché dans un coin ! Rongeant son frein, Dakota se décida enfin à descendre pour tenter d'obtenir un arrangement mais à peine eut-elle commencé à descendre les marches qu'elle surprit la conversation entre la réceptionniste et la paranoïaque. Visiblement cette situation n'avait pas d'issue et il faudrait faire avec. Ce n'était pas pour la réjouir, ça l'angoissait même franchement à la simple idée de pouvoir avoir peur de dormir en compagnie d'une détraquée dangereuse mais une chose lui permettait de digérer plus ou moins l'information. La réaction de la harpie ne voulait dire qu'une chose : elle avait peur de partager sa chambre avec eux. Gregory imposant autant le respect qu'une boite de flageolets, c'était la présence de Dakota qui posait problème. Ce qui signifiait qu'elle ressentait un écart de puissance conséquent. Un léger sourire apparut sur les lèvres de la phobophobe alors que la tension descendait d'un cran. Cette femme pouvait bien être nuisible, elle demeurait plus faible. Assez pour la motiver à les fuir. Dans ces conditions partager un lit avec elle n'était plus si dérangeant. La gamine descendit les dernières marches en silence et ne se fit remarquer que quand elle desserra les lèvres, juste dans le dos de la brune : - Si la situation ne vous convient pas, personne ne vous retient. Mais de vous à moi : dormir dehors demeure bien plus hasardeux que de le faire ici en notre compagnie.Elle haussa les épaules en signe de désintéressement profond pour la question et se tourna vers la réceptionniste, lui offrant son regard le plus morne. - Est-ce que nous pourrions avoir plus de couvertures ? Je suis plutôt frileuse.Si l'hôtel manquait de chambres, il ne manquait pas de fournitures et c'est les bras chargés de 3 ou 4 couvertures supplémentaires que Dakota entreprit de remonter les escaliers. Avec tout ça il y aurait largement de quoi improviser un couchage supplémentaire sur le sol et si Eve n'était pas trop stupide elle comprendrait son manège et lui emboîterait le pas. Ainsi aucune des deux n'auraient à supporter les ronflements de l'autre ni à dormir dehors, le nez dans le brouillard. Une solution ma foi fort acceptable. Une fois de retour dans la chambre, elle déposa les couvertures au pied du lit et se glissa dans la salle de bain, sa hotte dans les bras. Une douche chaude permit d'emporter crasse, sang et sueur, ne laissant derrière elle qu'une intense envie de dormir. Après avoir soigneusement séché ses cheveux pour ne pas tremper les oreillers, Dakota enfila sa seconde tenue d'esclave sextusienne et quitta l'atmosphère moite de la salle de bain pour retrouver la chambre et ceux avec qui elle la partageait. Personne n'avait l'air décidé à s'allonger, comme si le fait d'attendre devant comme des idiots allait faire apparaître un second lit. Dakota, elle, ne s'embarrassait ni de honte ni de formalités. Elle était en position de force, se fichait de leur opinion et avait sommeil. Trois bonnes raisons de se coucher. - Si jamais l'idée de partager le lit vous pose problème, il y a assez de couverture pour improviser un matelas à même le sol. Bonne nuit.La gamine se glissa sous les draps, profitant de cette sensation assez rare pour être grandement appréciée. Dormir dans un lit était un luxe ces derniers temps, un vraie rareté. Et quand elle y avait droit les nuits avaient tendance à être drastiquement écourtées. Autant en profiter tant qu'elle le pouvait et que le sommeil ne la fuyait pas désespérément. Elle ferma les yeux, profitant de la fatigue qui plombait ses membres pour sombrer rapidement dans le sommeil. Avant de perdre complètement conscience, il lui sembla que quelqu'un se glissait dans le lit à ses côtés. Qui ? Elle n'eut pas la force d'ouvrir les paupières et pourquoi se forcer ? Elle aurait tout le temps de constater la conclusion de leurs débats mentaux au petit matin. | |
| | | Eve M. Todrovitch
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Dim 24 Mai - 18:25 | |
| Bien entendu. La réceptionniste et la phobophobe se liguaient contre elle, le contraire l’aurait étonnée. Eve était persuadée que les seuls clients de l’hôtel se trouvaient en sa compagnie. C’était de l’acharnement, tout simplement : c’était tellement facile de piétiner les droits de Mme Todrovitch. Elle n’était rien et n’avait rien à réclamer, ici comme dans le monde réel. Un instant, la russo-américaine hésita à coller son poing dans le visage de la jeune hôtesse – elle jurerait percevoir dans ses yeux une lueur sournoise – mais elle se retint avec d’énormes efforts de self-control. Ne pas se faire remarquer, revenir en forme. Instructions de merde.
Ses yeux glacés allaient de Dakota à la réceptionniste, cherchant à percer le voile d’un éventuel complot, mais il n’y avait rien qu’une gamine morne et une jeune fille qui ne savait pas vraiment où se mettre. La détenue était obligée de reconnaître que dormir dehors, dans le brouillard saumâtre qui enveloppait les environs, n’était pas la meilleure des solutions. A contrecœur, elle suivit la blondinette jusqu’au lieu de résidence qui leur avait été affecté. Bien trop paranoïaque pour supposer que Dakota ait quémandé des couvertures supplémentaires pour elle, Eve se préparait déjà à ne dormir que d’un œil. Comme chaque fois en fait… y avait-il eu une nuit depuis la taule où elle avait pu se reposer comme une personne normale ? La folie ne dormait pas.
Dans la chambre, elle n’accorda pas le moindre regard à Gregory et se dirigea vers la fenêtre. Celle-ci résista, grinça, mais finit par s’ouvrir non sans qu’un peu de poussière ne lui tombe sur les pieds. Vue d’ici, les rues étaient encore plus sinistres. La lumière des vieux lampadaires se reflétaient sur la brume, créant des amas laiteux et fantomatiques. On pouvait deviner quelques silhouettes qui se déplaçaient dans les ombres, peut-être des ouvriers de nuit, ou des voyageurs qui attendent également l’ouverture du tunnel. La russo-américaine ferma les yeux pour respirer profondément l’air au parfum de terre humide. La douleur pesait sur son dos, comme si elle portait continuellement un sac chargé de plomb. Elle n’avait pas la force d’aller se doucher et d’ailleurs, elle n’avait pas envie de demander une nouvelle fois que Dakota lui refasse ses bandages. C’était un nécessité qu’elle n’affronterait que le lendemain, elle n’avait pas le choix.
Parlant de la phobophobe, la voilà qui revenait, au moins aussi agréable que n’aurait pu l’être Eve dans la même situation. Cette dernière fit volte-face pour voir sa cadette se coucher. Alors c’était pour elle qu’elle avait feint d’être frileuse ? Elle n’en revenait pas. Suspicieuse, la détenue choisit de retarder l’échéance en se rendant à son tour dans la salle de bain, après avoir fermé la fenêtre et ramasser la hotte pour l’emmener avec elle. Une fois écartée la buée d’un petit miroir rond aux bordures tâchées de rouille, la jeune femme constata à nouveau qu’elle était d’une pâleur à faire peur. Ses trais étaient tirés par l’épuisement et ses yeux glacés étaient presque vitreux. Ça faisait chier, mais elle avait besoin de dormir.
Après un passage aux toilettes, elle se lava les mains et le visage, se brossa les dents, avala une aspirine et retourna dans la chambre. L’hématophobe s’était glissé aux côtés de la blondinette. En prenant soin de ne pas faire trop de bruit, Eve consentit à s’emparer des couvertures emportées par Dakota pour aménager, le plus loin possible du lit, une couche convenable. Elle s’y glissa en prenant sa batte, enleva sa veste et s’allongea sur le ventre, non sans grimacer à cause de la douleur qui semblait enflammer chaque parcelle de sa peau.
La russo-américaine était tellement rompue de fatigue qu’elle ne se sentit pas s’endormir. Elle ne rouvrit les yeux que le lendemain, quand une lumière grisâtre glissait paresseusement dans la pièce aux murs nus. Il lui fallut de longues minutes pour reprendre possession de son corps, comme si la douleur avait profité de son inconscience pour envahir ses membres. Redressée sur ses genoux, les mains au sol, Eve secoua sa chevelure noire et se redressa avec lenteur. Elle finit par s’assoir en tailleur mais la tête lui tourna un moment, si bien qu’elle dut s’appuyer à un mur pour ne pas s’effondrer.
N’ayant plus de t-shirt depuis qu’il avait été inondé de sang, elle était alors en simple dessous, à moins que l’on ne considère que les bandages serrés autour de son corps dépourvu de graisse puissent faire office de vêtement. La pudeur était le dernier de ses soucis, elle attrapa dans ses provisions plusieurs barres de céréales qu’elle entreprit de manger, daignant enfin jeter un regard inexpressifs à ses colocataires qui avaient l’air d’avoir émergés.
- ‘Jour, grommela-t-elle sans chaleur.
Il faudrait repasser pour toutes les preuves d’intérêt de type « bien dormi ? » et autres « pas trop froid cette nuit ? ». Elle se fichait royalement de la qualité du sommeil de ses acolytes forcés et n’avait pas vraiment envie de feindre la sociabilité avec des enfants. | |
| | | Dakota Earnshow
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Mer 27 Mai - 20:21 | |
| Le bruit de mâchoires qui s'activaient, particulièrement agaçant soit dit en passant, tira Dakota de son sommeil. Elle avait probablement passé l'une des nuits les plus longues et reposant depuis qu'elle avait posé les pieds à Dreamland mais, hélas, ça n'aidait pas à la rendre cordiale. Lorsqu'Eve l'accueillit avec un « bonjour » aussi sec et tronqué que la barre de céréales qu'elle avait entre les dents, la gamine se contenta de rétorquer avec froideur :
- Bonjour.
Dehors le ciel était maussade. Les nuages gris s'étaient accumulés au-dessus de la petite ville, déversant une bruine déprimante sur les honnêtes travailleurs du matin qui parcourraient déjà les rues. Aussi silencieuse qu'une tombe la nuit, la ville semblait reprendre vie au petit matin. Celle d'un vieillard en déambulateur, un pacemaker dans la poitrine mais... de la vie tout de même. Les usines déversaient dans le ciel leurs fumées nauséabondes, obscurcissant le ciel un peu plus encore. Oui, c'était sans appel : la petite agglomération de San Factody ne serait jamais un joyau du tourisme local. Difficile de croire que la cité jumelée à celle portant le nom excentrique de « Candyland » soit cet endroit mortellement ennuyant. Enfin... pour ce que ça importait.
Le regard de Dakota se détacha de sa contemplation du paysage pour revenir se planter dans celui d'Eve. Elle ne comprenait toujours pas ce que cette femme fichait là et, si elle l'avait angoissé de prime abord, elle commençait sérieusement à l'irriter. C'était l'image même du corniaud qui vous suivait sans faillir mais tentait de vous mordre lorsque vous lui tendiez la même. Une de ces bêtes stupides qui ne sait pas elle-même ce qu'elle veut.
- Bon, soyons claires. Je vous ai obtenu un logement pour votre contribution mais, car il y a un mais, j'aimerai savoir combien de temps vous comptez rester en notre compagnie. Je ne suis pas ce qu'on pourrait appeler quelqu'un de sociable, par contre je sais me montrer prudente. Je connais votre nature profonde, et ça associé à votre don pour vous attirer des ennuis... elle désigna d'un vague geste de la main le dos de la paranoïaque, Je doute qu'une collaboration nous soit bénéfique.
« Me soit bénéfique » aurait probablement été plus correcte, mais on était commerçant ou on ne l'était pas. Les gens aimaient rarement se voir attribuer tous les torts et si on ne voulait pas qu'un sociopathe vous saute à la gorge mieux valait le ménager... autant que faire se peut.
- Dans tous les cas, je ne compta pas rester assise ici à regarder Gregory dormir. Quitte à être coincée ici, autant faire fructifier mon temps. Je reviens.
La phobophobe s'extirpa des draps et quitta la pièce pour ne revenir que quelques minutes plus tard, un journal sous le bras. C'était l'un des bons côtés des hôtels : il y avait toujours de quoi feuilleter dans l'entrée, un peu comme dans les salles d'attente de médecins, à la différence que ces lectures là étaient utiles. Ce qu'elle avait entre les mains était la gazette minable de la ville, avec son lot de faits divers inintéressants, de publicités, de rubrique nécrologique et... d'offres d'emploi. Dak' feuilleta avec soin la feuille de chou, soulignant les postes qui lui semblaient correspondre à son profil. Et il n'y en avait pas à foison...
On pouvait déjà éliminer d'office tous les travaux physiques. Trop jeune, peu musclée et sous alimentée, personne ne la prendrait jamais au sérieux. Le hic était que cela représentait 90% des offres présentes dans la gazette. Restait des demandes de serveuses, de femme de ménage, de... caissière ? Certe, ce n'était pas le travail rêvé mais elle avait de l'expérience dans ce domaine et ça restait relativement tranquille. Ne restait plus qu'à convaincre son futur employeur.
La blondinette déposa le journal sur la table de nuit et se glissa dans la salle de bain pour soulager sa vessire et se rendre présentable. C'était une véritable épreuve quand on voyait à quel point sa tignasse était capable de s'emmêler pendant la nuit... Même si elle était d'ordinaire plutôt encline au laisser-aller, elle prit le temps de peigner avec soin sa chevelure filasse et s'assura que ses vêtements étaient impeccablement propres. Faire une bonne impression était la première étape pour un entretien d'embauche réussi. Elle n'était peut-être pas du genre à avoir un sourire engageant mais si elle était propre sur elle cela jouerait en sa faveur. Ça pouvait paraître ridicule d'un point de vue extérieur mais c'était prendre un soin maniaque pour mettre toutes ses chances de son côté ou se laisser envahir par la peur d'avoir peur de se faire recaler. Et Dakota se connaissait assez bien pour faire le bon choix.
Lorsqu'elle rejoignit enfin Eve, Dakota était impeccable. Il ne lui restait plus qu'à enfiler son manteau d'hiver pour partir à la conquête du monde du travail. Et elle ne devait pas être la seule à avoir cette idée en tête car le journal qu'elle avait déposé sur la table de nuit était à présent entre les mains de la harpie.
- Vous comptez aussi postuler quelque part ? Interrogea-t-elle, plus par politesse que par intérêt réel. | |
| | | Eve M. Todrovitch
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Jeu 28 Mai - 9:39 | |
| « Je vous ai obtenu un logement pour votre contribution […] j’aimerais bien savoir combien de temps vous resterez en notre compagnie » : si elle avait été penchée sur l’humour, cette simple phrase aurait fait la détenue éclater de rire. Au lieu de ça, elle suivit Dakota de ses yeux impassibles jusqu’à ce qu’elle disparaisse dans le couloir. Sa « contribution » ? A quoi exactement ? Elle avait dû rater le chapitre où la blondinette était officiellement affectée à la défense du train, opération où elle n’aurait été que son bras droit. A ses yeux, elles s’étaient toutes les deux, pour des raisons différentes, retrouvées à coopérer pour mettre les bandits en fuite. Bien qu’Eve n’aurait peut-être pas pensé, seule, à aller négocier un hébergement, celui-ci lui revenait autant qu’à la phobophobe. Si ça lui posait problème, elle n’avait qu’à se tirer avec son ami inutile.
Elle finit son petit déjeuner sans dire un mot, jetant de temps à autre des regards machinaux vers le ciel maussade. Finalement, la russo-américaine regretterait presque de ne pas être restée à Tombstone : là-bas, elle aurait pu être tranquille et se la couler douce en profitant du soleil. Certes, le seul hic était que ses employeurs auraient pu l’éliminer n’importe quand, mais ça restait, dans un sens, plus grisant que la compagnie d’une gamine qui se prend pour la reine du monde. Sans doute une gosse de riche avec un gros complexe de supériorité, de ceux avec qui elle ne pouvait s’empêcher de s’embrouiller au lycée.
Quand Dakota fut enfermée dans la salle de bain, Eve daigna se lever pour récupérer le journal. La benjamine avait raison sur une chose : mieux fallait faire fructifier le temps passer dans ce trou à rat. Elle ne savait pas encore quelle direction prendre, mais faire un boulot de merde dans un bled de merde était une perspective d’avenir à court terme plutôt intéressante. Son errance du monde réel l’avait rodée, il n’y avait plus qu’à espérer que la prison ne l’ai pas trop rouillée.
Les yeux marron de la détenue parcouraient rapidement les différentes annonces, sautant directement celles qui concernaient les travaux physiques, abandonnant à contrecœur les offres de serveuse. Ça faisait partie des choses qu’elle avait le plus expérimenté, mais son dos ne lui permettrait pas de passer ses journées à déambuler dans une salle en portant des plateaux et des assiettes. Sans enthousiasme, elle dut se rabattre sur caissière : c’était mortellement ennuyant, mais ça payait le smic et ça ne la tuerait pas. Eve releva à peine les yeux quand la phobophobe l’interrogea sur ses intentions.
- Ouai, ouai… j’ai aussi un peu de temps à rentabiliser.
Elle ne s’attendait pas à ce que sa cadette lui propose d’aller postuler ensemble et ne comptait pas le faire non plus. Voyant qu’elle était déjà prête à quitter les lieux, la russo-américaine prit sa hotte pour l’emmener dans la salle de bain et offrit un « bonne journée » sans chaleur en passant devant sa colocataire forcée. Elle faillit sursauter en se voyant dans la glace : elle était plus pâle que la veille si possible, ses cheveux hirsutes, et ses yeux trahissant plus que jamais la faiblesse de son organisme. Poussant un soupir, elle vida sa vessie dans les toilettes et se déshabilla pour pouvoir entrer dans la douche. Au moment d’enlever ses bandages, elle avait dû serrer les dents pour s’empêcher de livrer le moindre son.
Après les premiers contacts douloureux, le jet d’eau tiède lui fit du bien. Retenant régulièrement ses cheveux pour ne pas les mouiller, Eve regardait le tourbillon d’eau rosée qui s’écoulait à ses pieds. Sydney et Jonh lui revinrent dans un flash. Les deux responsables de son état. Sans eux, tout aurait pu si bien fonctionner… mais il avait fallu que l’un ne sache pas jouer son rôle de dieu et que l’autre s’évertue à essayer de les faire tuer. Il avait presque réussi d’ailleurs, il ne perdait rien pour attendre.
Une fois sèche, la russo-américaine retarda l’échéance de ses soins en se brossant les dents et en peignant ses cheveux noirs. Un peu de maquillage n’aurait pas été de trop, mais c’était déjà pas mal : elle était bien plus présentable. Elle enfila son jean, passa sa tête dans l’embrasure de la porte et jeta un regard circulaire à la chambre. Dakota était partie et Gregory dormait toujours. Tenant sa serviette contre sa poitrine, Eve sortit de la pièce et descendit voir l’hôtesse qui tressaillit en la voyant arriver. Elle raccrocha bien vite son sourire commercial pour lui dire :
- Bonjour madame, que puis-je faire pour vous ? - Bonjour, rétorqua la détenue d’une voix un peu raide, est-ce que je peux vous demander un service ? J’ai besoin de quelqu’un pour refaire mes bandages et ma… collègue est déjà partie. - Ah… euh… oui bien sûr mais- - Pas besoin d’être qualifiée, trancha Eve, j’ai tout ce qu’il faut.
La jeune femme dut donc suivre la russo-américaine jusque dans la salle de bain où flottait encore l’odeur de son gel douche. La paranoïaque fit mine d’ignorer l’exclamation de surprise et de dégoût de l’hôtesse qui découvrait ses blessures mais s’était volontairement placée face au miroir, afin de pouvoir la surveiller de ses yeux glacés. Après de longues minutes de besogne, les pansements étaient faits et l’infirmière improvisée quittait la chambre d’un air visiblement choquée. Eve rangea alors sa trousse de soin, lava ses dessous sales qu’elle étendit sur un radiateur chaud et, à défaut de mieux, enfila sa veste par-dessus son soutien-gorge. Elle remonta la fermeture éclair et mit son manteau d’hiver. Elle n’avait certes pas l’air d’une femme qui prenait soin d’elle, mais au moins, elle était largement présentable pour un entretien de caissière à Bouseux-land.
Portant toujours sa hotte à bout de bras faute de mieux, non sans avoir penser à récupérer sa batte, elle quitta l’hôtel et se rendit à l’adresse indiquée dans le journal. Quelle ne fut pas sa surprise en pénétrant dans la salle d’attente qu’on lui avait indiqué de voir que Dakota était déjà là, attendant patiemment le début des entretiens.
- Tiens donc, lui dit Eve en prenant un siège, on ne va plus pouvoir aller quelque part sans se croiser on dirait.
Et il était même possible qu’elles travaillent ensemble. Après tout, pour l’instant, elles étaient les seules personnes de la pièce. | |
| | | Dakota Earnshow
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Jeu 28 Mai - 15:38 | |
| Dehors il pleuvait toujours à verse lorsque Dakota quitta la chambre pour rejoindre le hall. Elle avait laissé à l'adresse de Gregory un mot sur la table de nuit, aussi sommaire qu'à l'accoutumée et qui se résumait à « Je suis partie chercher du travail. Ne t'attire pas d'ennuis. » Au simulacre de boutique de l'hôtel, elle s'acheta un parapluie aussi triste et morne que la ville pour la modique somme de 5 rubz et sortit, prête à affronter la pluie.
La petite supérette où elle comptait postuler n'était qu'à un pâté de maison de là, mais il lui fallut 20 minutes pour l'atteindre. Pas qu'elle se soit perdue, loin de là, mais elle prenait tant de précautions pour ne pas avoir peur d'avoir peur d'être mouillée, salie ou renversée qu'elle perdait un temps fou. Le point positif était qu'à son entrée dans le magasin, elle était toujours impeccable et dans les meilleures conditions possibles pour passer son entretien. Pas une tâche de boue sur sa longue robe blanche, pas de terre sous ses ballerines. Au moins elle ne s'était pas fatiguée pour rien.
Mais aussi propre sur elle soit-elle, c'est avec un certain scepticisme qu'on la dévisagea à l'accueil lorsqu'elle annonça venir pour l'annonce. Elle dut longuement expliquer son statut d'itinérante et donner ses références pour qu'on daigne enfin la prendre au sérieux et la guider jusqu'à un couloir au patientait déjà deux femmes. Dans cette salle d'attente improvisée, personne ne pipait mot en dehors des moments où l'on venait les chercher tour à tour. Lorsqu'Eve débarqua avec sa hotte dans les bras, la phobophobe était la seule encore assise à patienter. Dakota la dévisagea avec froideur avant de détourner le regard, trouvant soudain un intérêt démesuré dans la contemplation de l'horloge murale qui égrainait les secondes de manière hypnotique.
- Quelle perspective d'avenir réjouissante, rétorqua-t-elle avec une ironie palpable suite à la remarque de la paranoïaque.
Elle n'était pas loin de l'overdose. D'habitude quand elle ne supportait pas quelqu'un, elle pouvait s'en aller voir si l'herbe était plus verte ailleurs. Ou l'autre avait la décence de le faire de son côté. Or elle se trouvait dans une situation où elle ne pouvait se permettre de plier bagage et cette femme avait l'air décidé à lui filer le train jusqu'à la mort. Qu'est-ce qu'elle lui voulait ? Et qu'est-ce qu'elle faisait là ? Ce chien errant qu'elle était pouvait bien aller arroser les réverbères ailleurs, non ? Non. Il fallait qu'elle reste dans son sillage dans l'attente d'un signe divin. Et ce signe n'allait pas tarder à arriver par le biais de la surdouée si l'intruse devenait trop envahissante.
Heureusement -ou malheureusement, question de point de vue- le recruteur vint bientôt la chercher pour lui faire passer un rapide entretien durant lequel on vérifia qu'elle savait effectivement compter et sourire. Le second point n'était pas une réussite mais dans une ville comme San Factody c'était suffisant pour faire couleur locale. Au moins les clients ne seraient pas dépaysés... Son CV après un rapide coup de fil avait fait grande impression, aussi fut-elle directement conviée à signer son contrat et à aller se changer dans les vestiaires.
L'uniforme était composé d'une chemise marron rayée de beige et d'une jupe droite chocolat en toile, de quoi faire grimacer n'importe quel fashionista. Dakota, de son côté, s'en fichait. Le fait de flotter dans cet uniforme trop grand ne la dérangeait même pas. La seule chose qui importait c'était l'objectif qu'elle s'était fixée : gagner un peu d'argent en attendant de pouvoir retrouver James. C'était terriblement frustrant de le savoir à deux pas, complètement inaccessible, mais il fallait prendre son mal en patience. Ce n'est qu'après s'être rafraîchit le visage aux toilettes qu'elle se rendit à son poste, un îlot de caisse qu'on lui révéla devoir partager avec...
- Eve ? Si c'est une blague elle est de mauvais goût.
Les gens d'ici n'étaient hélas pas portés sur l'humour et elle dut donc réellement intégrer l'idée de passer la journée dos à dos avec cette femme au regard de sociopathe. Une bien belle journée en perspective...
Les lèvres pincées sous l'effet de la contrariété, Dak' installa son poste de travail de manière méthodique et alluma la lumière indiquant à la clientèle que la caisse était ouverte. Enfin... à part un vieil homme sur son déambulateur, pas grand monde n'arpentait la supérette à une heure aussi matinale. C'était comme si Dreamland était décidée à les laisser là toute les deux jusqu'à ce qu'elles daignent faire connaissance. Après un long moment de silence pesant, la gamine finit par articuler avec une froideur à peine dissimulée :
- Alors vous comptez vous installer ici ou nous poursuivre jusqu'aux confins de Dreamland ? Détrompez-moi, mais j'ai la légère impression que vous me suivez et c'est extrêmement désagréable. Je n'ai aucune envie d'adopter une sociopathe ni de me faire poignarder dans le dos, donc j'aimerais bien qu'on profite de l'occasion pour mettre les choses à plat.
Dakota accueillit la gamine qui se présenta à sa caisse avec un léger frémissement de la commissure des lèvres qui devait se traduire par un sourire. Elle encaissa le sac de bonbon déposé sur le tapis de caisse et une fois la cliente en herbe disparue, elle pivota légèrement son siège pour capter le regard de la paranoïaque.
- Qui êtes-vous vraiment et que faites-vous ici ? Répondez sincèrement. Je n'aimerais pas avoir à demander à Mary de m'apporter des réponses qui auraient du mal à franchir vos lèvres... j'ai eu bien assez de scalps pour la semaine.
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| | | Eve M. Todrovitch
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Ven 29 Mai - 12:17 | |
| Dakota n'avait pas l'air ravie de se retrouver dans la même pièce que la paranoïaque et elle... s'en fichait royalement. Si ce patelin avait été suffisamment grand pour qu'elle s'en aille chercher du travail ailleurs, elle l'aurait fait avec plaisir. Malheureusement, San Factody était aussi diversifié que la palette d'expressions faciales de la russo-américaine ; ce qui en disait long. Elle patienta donc silencieusement, droite comme une enfant trop sage, ses cheveux coiffés humidifiés par la pluie. Quand la blondinette fut partie, elle résista à l'envie de ressortir s'allumer une clope. Quelque chose qui ressemblait à du stress lui serrait légèrement les entrailles. Serait-elle encore capable de travailler après 5 ans de prison ? Peu à peu, ses songes dérivèrent vers des suppositions paranoïaques : n'allait-elle pas se faire arnaquer ? Agresser ? Quel patron dreamlandien n'abuserait pas d'une voyageuse solitaire ? Et s'il était comme l'ancien boss de sa mère ?
En plein délire, Eve se projetait mentalement, visualisant la façon dont elle fracassait, non sans plaisir, le crane de ce chef trop aventureux. Elle s'était tellement déconnectée qu'elle ne s'aperçut même pas que son tour était venu. Le recruteur dut l'appeler trois fois avant qu'elle n'émerge. Quand elle l'entendit, elle tourna vers lui ses yeux froids tellement vite qu'il ne pu manquer l'éclat de démence qui s'estompait dans ses pupilles. Ça commençait mal. Eve dut faire un gros effort pour ne pas se jeter à la gorge de l'homme. Sortir de ses délires paranoïaques était infiniment plus compliqué qu'y sombrer. Dès lors tout, de la main tendue au sourire engageant, lui apparaissait comme une menace.
Dans le bureau étroit, elle avait presque l'impression de passer un interrogatoire quand il fallut raconter pourquoi elle se trouvait là, quelles étaient ses ambitions et évoquer son expérience. Suspicieux, son interlocuteur ne manqua pas de la faire se répéter plusieurs fois, jusqu’à ce qu’il soit obligé d’admettre que son histoire était solide. Finalement, après avoir démontré qu'elle était parfaitement capable de compter, à défaut de sourire avec chaleur, Eve signa son contrat et fut invitée à se changer dans un petit vestiaire où elle put enfermer sa hotte à clef.
L'uniforme ne la fit pas sourciller. Certes, elle détestait être en jupe, mais il y avait des années que son look vestimentaire était le cadet de ses soucis. Au moins, sa chemise rayée masquait complètement ses bandages. Ses jambes dénudées étaient d'une blancheur indiquant qu'elles n'avaient pas vu le soleil depuis des lustres. Fines, fermes et pas épilées, celles d'une femme négligée dont la vie se résumait à une errance à pied. Bien entendu, à croire que le boss entrait dans la plaisanterie, elle dut partager son ilot avec la douce Dakota.
- Malheureusement, non, rétorqua froidement Eve en prenant place.
Il n'y avait pas grand monde - ce qui était un euphémisme. Le temps pour elle de reprendre ses marques, de faire affluer tous ses souvenirs du temps où elle était caissière d'une supérette, avant qu'elle n'essaye d'étrangler l'un de ses collègues. Puisqu'elles étaient seules, c'est le moment que choisi la phobophobe pour lui parler d'une façon qui lui donnerait envie de lui arracher la tête si ce n'était pas qu'une gamine.
- Me traiter de sociopathe, sous-entendre que je suis une pédophile et me menacer de mort, commenta la russo-américaine de sa voix inexpressive en énumérant les griefs sur ses doigts, je ne suis pas certaine que ce soit la meilleure démarche pour « mettre les choses à plat ».
Elle planta ses yeux glacials dans ceux, égaux, de la blondinette. Elle laissa filer un silence, le temps d’encaisser le pack de bière d'un ouvrier cernés et couvert de poussière, avant d'ouvrir la bouche à nouveau. Son discours était laconique.
- Je ne fais rien de plus que toi ici. Il se trouve que mon train a été attaqué et que, pour l'avoir délivré, la compagnie m’a dégoté un logement ici. C’est vrai que je l’ai eu grâce à tes négociations, mais je ne fais rien d’autre que profiter de l’offre. Oh et pour le fait qu’on se retrouve dos à dos et ben… c’était le seule poste accessible pour moi et il n’y a qu’une supérette dans ce trou paumé. Crois-moi, je serai la première ravie quand on pourra vivre nos vies séparément.
Et c'est elle qu'on diagnostiquait paranoïaque ? Non sérieusement, est-ce qu'elle avait une tête à filer le train à des gosses qui n'avaient pas la moitié de son âge ? C'était tellement ridicule qu'une esquisse de sourire sans joie rompit l'immobilité de son visage de statue. Y avait-il autre chose à ajouter ? Ce n’était que la vérité. Elle avait pris un train qui avait rencontré quelques difficultés, fin de l’histoire. En fin de compte, et si San Factody était son havre de tranquillité pour se ressourcer avant de retourner, bon gré mal gré, voir ses supérieurs de la résistance ?
- Maintenant que tu es hum...« rassurée », reprit-elle, on va pouvoir se tolérer ? Ça ne sera bon pour aucune de nous deux si je travaille avec la sensation d'avoir quelqu'un qui pourrait vouloir me tuer dans le dos. D’ailleurs je ne sais même pas comment tu connais mon prénom puisque en plus de ne jamais l'avoir évoqué, je ne sais toujours pas quel est le tien. | |
| | | Dakota Earnshow
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Sam 30 Mai - 17:16 | |
| Le regard de Dakota ne cilla pas durant toute la durée du monologue d'Eve. Elle avait rarement vu quelqu'un parler autant pour le rien dire. Tous les points qu'elle soulevait, la gamine les connaissaient déjà, quant aux autres ils étaient éludés ou laissés de côté avec une parfaite désinvolture. La raison de son voyage et de sa décision de rester un peu ici était toujours inconnue, et pourtant ! On ne prenait pas un train au hasard pour le plaisir de voir où il allait. Soit on avait un but à atteindre, soit on fuyait quelque chose. La catégorie dans laquelle entrait la harpie restait encore à déterminer et leur bonne entente découlerait -ou non- de la dite raison.
Lorsque l'on n'entendit plus rien mis à part la musique d'ambiance – un morceau de blues assez médiocre- la phobophobe désigna avec lenteur le badge épinglé sur la chemise de son interlocutrice, puis le sien. Elle prit ensuite le temps d'offrir à la paranoïaque l'une de ses expressions les plus irritantes, un mélange entre le mépris et le dépit, avant de répliquer avec froideur :
- Je sais lire. L'école est obligatoire à partir de 6 ans, tu sais.
Cette femme manquait terriblement de sens de l'observation, en plus de la prendre pour une idiote. Si elle pensait que la blondinette était « rassurée » et pouvait passer à autre chose elle se trompait lourdement. Bien au contraire, voir Eve esquiver ses questions ne faisait qu'augmenter sa méfiance à son encontre.
- Et soit-dit en passant tu n'as pas répondu à mes questions. Tu as pris ce train, d'accord... mais pour quoi ? Qu'est-ce que tu cherches, qu'est-ce que tu fuis ? Ne t'avise pas de croire que parce que je suis jeune tu peux te permettre de me prendre pour une imbécile facilement manipulable. Je ne sais rien de toi, je ne peux pas être rassurée. Enfin si... je sais quelque chose sur toi. Et ça n'a rien d'engageant.
Le souvenir de la harpie dans le miroir d'argent était encore vivace. Les ailes, les griffes, les crocs, le visage menaçant... agressive et mauvaise, voilà l'apparence de l'âme de la femme qui se tenait dans son dos. Et si elle était encore faible, elle ne le resterait pas toujours. Il serait peut-être plus prudent de l'abattre maintenant pour empêcher que quelque chose n'arrive plus tard, mieux valait prévenir que guérir. Ce serait si simple... mais Dakota n'était pas encore prête à donner la mort de sang froid. Elle avait encore trop peur d'avoir peur d'avoir des remords.
Une femme habillée outrageusement court déposa sur le tapis de caisse une boite de préservatifs, une bouteille d'eau et un sandwich, la phobophobe détournant temporairement son esprit de ses sombres et hypothétiques projets pour se concentrer sur sa clientèle. Le regard scrutateur de Dak' ne mit pas longtemps à cataloguer cette femme dans la catégorie prostituée. La mini jupe, les bas filés, le décolleté plongeant... le tout agrémenté de magnifiques lésions syphilitique. Et s'il n'y avait aucun jugement dans le regard de Dakota quand à la profession de sa cliente, elle prit un soin maniaque à ne pas la toucher et se lava frénétiquement les mains au gel hydroalcoolique qu'on avait mit à leur disposition, au centre de l'îlot. Elle savait que certaines lésions pouvaient être contagieuse et la simple idée d'avoir peur d'être contaminée lui retournait l'estomac.
La panique s'insinuait doucement lorsque le regard de la paranoïaque sur elle eut l'effet d'un coup de fouet. Elle ne pouvait pas se permettre de lui montrer des faiblesses. Il fallait prendre sur soi, et vite. Qu'est-ce qu'elle risquait au juste, pour un contact d'une micro-seconde abondamment aspergée de désinfectant ? Rien, presque rien. Il fallait juste inspirer un bon coup, expirer et recouvrer plus qu'une simple apparence de self-control. Tout s'était passé si vite qu'Eve n'avait probablement rien remarqué, mais Dakota préféra noyer le poisson en reprenant la conversation là où elle l'avait laissé.
- Parlons de ton passé, tiens. Si l'on prend en compte ta gestuelle, tes paroles et ton comportement général, soit tu es une criminelle accomplie, soit tu l'es en devenir. J'aimerais bien savoir ce que tu as bien pu faire pour subir une pareille flagellation. Ce genre d'acte est typiquement une punition, la question étant... de quoi t'a-t-on puni ?
Si elle niait encore après tout ça et se murait dans le silence, elle passerait le pas. On ne pouvait se permettre de garder une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Dakota n'était ni stupide, ni suicidaire et si tuer la répugnait, mourir plus encore.
Attentive aux paroles de la stalker autant qu'aux bruissements dans son dos, signes d'une éventuelle attaque, la gamine continuait inlassablement d'encaisser ses clients qui devenaient de plus en plus nombreux. Ouvriers, enfants, femmes au foyer, personnes âgées, adolescents qui séchaient probablement les cours... Une foule anonyme à qui elle n'accordait ni réelle attention, ni réel intérêt. Tout ce qu'elle leur offrait était le même discours répété inlassablement, un simulacre de sourire et des gestes mécaniques. Son esprit, lui, était focalisé dans son dos.
Son imagination trop fertile imaginait parfaitement Eve se lever pour lui sauter à la gorge ou tirer une arme à feu de sous son immonde chemise. Et elle visualisait avec tout autant de clarté les infinies possibilités qui se présentaient à elle pour ne pas mourir, listant mentalement ses possessions, ses pouvoirs, l'environnement et ses connaissances ; prévoyant des stratégies, du bluff, des portes de sortie.
Elles ne pourraient pas continuer comme ça longtemps. Pas sans que l'une d'elle ne laisse derrière elle dans le monde réel qu'un corps vide, privé de son âme. | |
| | | Eve M. Todrovitch
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Sam 30 Mai - 20:18 | |
| Le sourire qui étira les lèvres pâles de la détenue n’avait rien d’engageant quand sa collègue lui désigna son badge sur la poitrine. Soit, soit, elle avait enfilé son uniforme tellement vite qu’elle n’avait pas fait attention. Alors comme ça, la petite peste aux mèches roses fanées s’appelait Dakota ? Eve n’eut pas le temps de profiter de la découverte car une nouvelle salve de questions rendit à son visage terne son impassibilité glaciale. Ce petit jeu commençait à ne plus l’amuser du tout. Était-ce un test ? La résistance aurait envoyé une gamine sur ses traces pour la filer et la surveiller tout en s’assurant qu’elle savait tenir sa langue ? Ça coordonnait après tout : elle l’avait rencontrée sur le quai de gare de Tombstone où elle avait été téléportée. Ses supérieurs auraient bien été assez malins pour prévoir qu’elle ne resterait pas en place.
La russo-américaine ne put rien répondre sur le coup. Une femme venait de poser sur son tapis un lot de fourniture de bureau. Serrée dans un tailleur impeccable, bien que de basse qualité, elle jetait des regards méprisant à la prostituée qui bénéficiait des services de Dakota. Les mains de la paranoïaque tremblaient pendant qu’elle exécutait ses manipulations, on aurait dit une junkie en manque, sauf que c’étaient des pulsions de folie qui l’empêchaient de se contrôler. La simple idée que l’adolescente dans son dos puisse être une espionne à la solde de la résistance lui donnait envie de se retourner et de l’étriper sur place. C’était bien quelque chose qu’elle abhorrait ça… qu’on la prenne pour une idiote, qu’on la piège.
C’était très compliqué de penser à feindre une expression commerciale et à rendre convenablement la monnaie quand son esprit décrochait peu à peu, sombrait vers des envies de meurtre de plus en plus irrésistibles. Et après ? Que ferait la résistance quand elle aurait liquidé leur espion ? Finalement, c’était bien mieux quand elle ne s’était pas frottée à ces gens là. La femme en tailleur s’étant éclipsée, Eve se retourna vers sa collègue, trop aveuglée par sa propre déviance pour saisir l’éclair de panique qui brillait dans ses yeux bleus.
- Tiens, tu me traites de criminelle maintenant, murmura la taularde d’une voix désincarnée.
Elle regarda longtemps le dos de Dakota. La bête de ses entrailles rugissait déjà, flairant ce qui l’entourait, cherchant n’importe quoi qu’elle pourrait enfoncer dans la gorge de cette gosse insupportable. Oh qu’importe qu’elle ne soit qu’une enfant ! Une enfant qui avait choisi de l’espionner pour lui soutirer des informations ne méritait pas plus de vivre qu’une personne plus âgée. Ce fut l’ouvrier qui l’appela qui permit à Eve de s’extirper, à grand peine, de son nouvel accès de démence. Elle l’encaissa lui et ses nombreux collègues – bières, sandwichs, sucreries, capotes – et se décida, pendant l’accalmie qui suivit, à adopter une stratégie différente.
Montrer patte blanche à ses « alliés » pourra toujours lui être utile plus tard. Passons sur sa… « contrariété » ; tant qu’elle savait pourquoi Dakota était sur son dos, Miss Paper n’avait plus de longueur d’avance. Cette simple satisfaction apaisa l’appétit sanguinaire de la paranoïaque. Elle se retourna lentement vers sa comparse, passant pensivement une main dans ses cheveux noirs, puis répondit en fixant la phobophobe dans les yeux :
- Je ne cherche rien et je ne fuis rien non plus. Vivre au jour le jour, profiter d'un endroit et me casser quand je veux, c'est comme ça que je fonctionne. Je suis partie de Tombstone parce que je n’avais pas envie d’y rester, mais je ne sais pas encore où je vais me poser. Peut-être ici.
Elle se pinça les lèvres. Le film d’Atlantis repassait, haut en couleur, avec de grands arrêts sur image sur ce benêt de Sydney sans qui tout aurait été possible. La haine que ce peuple lui crachait au visage ; tellement injuste, tellement malvenue. Désormais, elle espérait que chacun d’eux ait été noyé jusqu’au dernier. Puisqu’ils avaient été trop stupides pour comprendre, trop stupide pour voir au-delà de leurs croyances ridicules. Dakota ne put rien saisir de ce fil de haine froide caché derrière le visage inexpressif de Eve. Cette dernière haussa très légèrement les épaules avant de reprendre, sincère :
- Je me suis fait flageoler à Atlantis. J’ai été téléportée là-bas alors que j’aidais deux amis à retrouver leurs ombres dans les terres gelées. Ils nous ont pris pour des dieux, moi et deux gus arrivés en même temps, et étaient persuadés qu’on venait les aider contre une cité ennemie. J’ai proposé de trouver une solution pour amener une paix durable, ce qui aurait pu marcher si l’un de mes… « coéquipiers » n’en avait pas fait qu’à sa tête.
Plusieurs clients potentiels venaient d’entrer. Ils parcouraient encore les rayons trop sombres pour être accueillants mais la taularde fit pivoter son siège pour se remettre en place, prête à servir du sourire de façade et à exécuter des gestes mécaniques.
- Sydney…, murmura-t-elle non sans un soupçon de rancœur, un vrai paranoïaque… il s’obstinait à croire qu’on cherchait à le tuer. Du coup il a voulu jouer solo et ça nous a coûté cher. Maintenant tu sais et comme tu vois… je n’ai tué personne dans l'histoire.
D’ailleurs, son dos lui faisait très légèrement moins mal ce matin. Ou bien son corps avait tellement souffert que ses nerfs ne réagissaient plus, ce qui était fort possible. Ses mains ne tremblaient plus, elle avait reprit le contrôle de ses membres et de son esprit. A défaut d’apprécier Dakota, au moins elle était parvenue à se retenir de l’étrangler.
- Et toi alors ? Qu’est-ce qui peut bien attirer deux enfants dans le coin ? | |
| | | Dakota Earnshow
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Sam 6 Juin - 7:47 | |
| Entre deux clients, Dakota prêtait l'oreille, le visage fermé, à l'histoire que lui contait Eve. Elle n'accordait pas plus de crédit à cette version qu'à la précédente mais il fallait rester réaliste : avec une telle entrée en matière, aucune réponse ne serait satisfaisante. Le doute avait déjà germé dans son cœur à la seconde où elle avait vu la véritable nature de l'âme de la voyageuse qui se tenait dans son dos. Pourtant si elle voulait calmer le jeu, il lui faudrait lui accorder le bénéfice du doute, sans se départir bien évidemment de la dose de prudence nécessaire à sa survie.
Et il fallait avouer qu'un détail jouait en la faveur de ce que la surdouée nommait mentalement « la théorie de la véracité ». Si à l'évocation du prénom Sydney, les traits de la phobophobe n'avaient même pas tressaillis, ce la lui avait donné matière à réflexion. Le comportement décrit ressemblait à s'y méprendre à celui de l'homme qu'elle avait connu, au point de confirmer sans le savoir les soupçons de Dakota et de raffermir son opinion concernant l'histoire de la stalkeuse par la même occasion.
- Sydney... roux ? Cheveux longs et bouclés ? Grimé en pirate de pacotille ?
Le regard qu'elle échangea avec Eve alors qu'elle pivotait son siège était plus clair que tous les mots du monde. La gamine hocha la tête avant de reprendre, terriblement blasée :
- J'ai voyagé un temps avec lui. Un roquet qui aboie plus qu'il ne mord. Il suffit de trouver sa corde sensible pour réussir à le faire aller dans le sens que l'on souhaite... d'ailleurs il me doit toujours une faveur. Je ferai en sorte qu'il s'en souvienne à notre prochaine rencontre.
C'était primordial de se faire des débiteurs plus que des amis, dans un monde tel que celui-ci. Non seulement cela permettait d'obtenir certaines faveurs mais cela instaurait aussi une relation hiérarchique bienvenue. Surtout avec des individus comme Sydney. Ça ne les empêchait pas de grogner, mais l'évolution restait appréciable. Le seul problème, c'est que ce genre de manipulation ne trouvait écho que sur les gens possédant un minimum de sens moral et Dakota avait déjà constaté que cela ne pourrait marcher sur Eve. Cette femme semblait penser qu'il était équivalent de tuer deux bandits et une vingtaine d'autres. Il n'y avait pas à aller loin pour comprendre que sa logique, sa morale et ses notions de respect et de reconnaissance étaient complètement défaillantes.
Tout en poursuivant son fil de pensée, Dakota commença à encaisser la file de ménagères qui avaient enfin remplis leurs cadis, profitant de l'attente pour se raconter mes potins de ce patelin sans âme. L'histoire du tunnel de Candyland revenait souvent sur le tapis et de multiples rumeurs semblaient courir quand à la raison de ce blocus. Toutes étaient néanmoins d'accord pour dire que la cause -quelle qu'elle soit- était mortelle.
James... avait-il survécu à la nuit ? La gamine aurait voulu envoyé Chouette pour se rassurer mais coincée dans son îlot de caisse, cela ne restait qu'un rêve inaccessible. Elle n'avait pas juste peur d'avoir peur qu'il soit mort cette fois, non, elle avait peur tout court. Sa main se glissa dans sa poche pour se refermer sur sa boussole. Si elle jetait un œil elle saurait, juste un coup d'... ou pas. Qu'est-ce qui lui disait après tout, que cet ustensile ne désignait pas aussi les cadavres ? Dak' blêmit un peu plus, tentant de se concentrer sur la dernière question de sa collègue.
- Gregory me suit, où que j'aille. C'est un nouveau voyageur que je tente de former aux dangers dreamlandien.
Un stagiaire peu efficace, pour l'heure. Si la phobophobe appréciait son caractère aimable et peu enclin à l'opposition, sa lâcheté commençait à lui donner des aigreurs d'estomac. Avoir peur était normal, se laisser dominer par elle ne l'était pas. Ici c'était synonyme de mort et si cet homme ne le comprenait pas vite elle serait forcée de l'abandonner sur le bord de la route comme un chien encombrant. Jamais l'image du berger-allemand dans le miroir n'avait été si vrai...
- Quant à moi, je dois atteindre Candyland pour trouver mon ami.
Pas « un de mes amis », pas « mon meilleur ami »... juste « mon ami ». Unique, désespérément seul. Cette formulation ne faisait que créer un fossé supplémentaire entre Dakota et le monde. Elle exprimait tout le poids de sa solitude sans même qu'elle ne s'en rende compte. James était la seule ancre à son humanité. Le seul être humain ayant réussi à percer la carapace de glace qui recouvrait son cœur.
- Le tunnel étant bouché, je suis forcée de patienter. Travailler jusque là semble être la meilleure façon de rentabiliser cette attente.
Un vieil homme choisit ce moment pour insister lourdement sur le fait que l'article qu'elle venait de scanner coûtait 22 rubz et non 23, que c'était un scandale et qu'il voulait un geste commercial pour compenser l'affront. Une diversion parfaite pour couper court à cette conversation qui dérivait sur sa propre vie, qu'elle n'avait aucune envie d'aborder avec une stalkeuse au visage de harpie. | |
| | | Eve M. Todrovitch
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Sam 6 Juin - 10:29 | |
| Visiblement, Eve et Dakota avaient en commun d’avoir déjà rencontré le paranoïaque roux. Elles avaient globalement toutes les deux eu la même expérience de l’animal mais si la phobophobe paraissait convaincue qu’on pouvait en tirer quelque chose en sachant s’y prendre, la russo-américaine se dit que la seule « corde sensible » qu’elle avait désormais envie d’expérimenter avec Sydney c’était sa batte de baseball sur son visage. Silencieuse, elle ne laissa rien paraître de ses pensées, mais son cerveau tournait à 100 km/h.
La blondinette était possiblement une espionne au service de la Résistance, mais elle connaissait également la dernière personne en date qui avait attenté à sa vie. Est-ce que ça pouvait décemment être une coïncidence ? Eve en doutait fortement. Dreamland était vaste, combien de chance y avait-il que ce cas de figure se présente ? Non. La vérité, c’est qu’en dépit de leurs relations difficiles, ils étaient de mèche. Et si… et si le rouquin aussi faisait partie de la Résistance ? Peut-être que pour ce qui s’était passé dans les terres gelées, la taularde avait été mise au banc de cette mafia voyageuse ? Mais ils ne comptaient pas l’exécuter non… tout un stratagème avait été mis en place pour que ça passe pour « un accident ».
La première étape, ça avait été Atlantis. Sydney devait compromettre la situation, faire en sorte qu’Eve ne s’en sorte pas et que sa mort passe pour la conséquence d’une vindicte populaire. Qui aurait cherché la vérité ? Une réputation de brute agressive était déjà toute prête à l’emploi. Il n'y avait plus qu'à la propager. Alors qu’elle n’avait rien fait, elle n’avait fait que protégé Jade. Toujours le même scénario. Le paranoïaque s’est enfuit : il ne s’est peut-être pas réveillé, il aurait pu activer un artefact, comme la bague qu’elle possédait elle-même. Le russo-américaine devait admettre que ce plan était bien mené… vite oubliée la recrue Todrovitch. On aurait baratiné sa seule vraie alliée et personne n’aurait ne serait-ce que pris la peine de chercher son cadavre.
Sans le savoir, Miss Paper aurait fait d’une pierre deux coups. En transformant la détenue en légume dans le monde réelle, elle apporterait son cadeau de Noël avait l’heure au directeur de la section pour femme du pénitencier de San Francisco. Malheureusement, tout n’avait pas fonctionné… les autochtones n’avaient pas pensé à retirer sa bague à la prisonnière qui était parvenue à leur glisser entre les doigts. Eve avait marqué un point, mais la chef de la Résistance s’était vite ressaisit en envoyant Dakota. Quel serait l’occasion cette fois ? Quand est-ce que la gamine passerait à l’acte ?
La folie suivait tranquillement son chemin dans son cerveau malade. Désormais, Eve avait la désagréable sensation d’être manipulée. Une sensation qui la mettait en rogne, qui lui donnait – encore – envie de se retourner et de fracasser le crâne de l’adolescente sur sa caisse enregistreuse. Pas maintenant. Ce n’était pas le moment. Parce qu’il y avait du monde, suite de silhouettes fantomatiques qu’elle servait sans les voir. Parce que sa retraite n’était pas prête : c’était la mort si elle ratait son coup. Mais elle l’aurait. Elle frapperait avant. Si Miss Paper voulait la tuer, elle avait devoir faire mieux que ça. Mieux que d’envoyer des mômes, aussi puissants soient-ils.
Eve dut attendre d’avoir encaissé une petite vieille qui peinait à trouver ses gemmes dans son porte monnaie miteux pour se tourner vers sa collègue. Rien sur ses traits impassibles ne laissait paraître l’effervescence de sa crise paranoïaque. Dans ces moments d’intense « lucidité », la démence devenait plus sournoise, moins violente. Elle ne tremblait pas, elle ne frémissait pas. Un calme olympien habitait son corps glacé, ses yeux sans expressions posés sur la silhouette gracile de Dakota. Si facile à briser.
- Moi aussi j’aimerais bien retrouver quelqu’un, confia-t-elle quand la phobophobe fut débarrassée de son vieux chipoteur, je l’ai perdue dans les terres gelées. J’espère qu’il a eu plus de chance que moi, mais je n’ai aucun moyen de le trouver ; sinon je pense que je reprendrais la route de suite.
Etait-ce vrai-ce ? Etait-ce un mensonge ? Eve ne le savait même pas. Son but principalement était de feindre la confiance, de jouer l’innocence. Moins l’espionne se méfiera, plus les opportunités qu’elle attendait seraient nombreuses. Toutefois, maintenant qu’elle pensait à lui, c’était une bonne question à poser à Rochel : si tu sais qu’une gamine cherche à te tuer, est-ce que tu te laisses faire ? Ou est-ce que tu peux surpasser le fait qu’elle soit jeune pour la tuer en premier ?
- D’ailleurs, moi aussi c’était quelqu’un que j’essayais de former, poursuivit la russo-américaine, à croire qu’on ne peut pas s’en empêcher.
La conversation dut s’interrompre. Une mère de famille accompagnée de trois enfants d’une pâleur affligeante se présenta, un caddie plein à craquer d’articles que la détenue allait devoir enregistrer sous leurs yeux ternes. | |
| | | Dakota Earnshow
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Sam 20 Juin - 15:25 | |
| Entre deux cliquetis de caisse enregistreuse, Eve lui annonça qu'elle aussi cherchait quelqu'un. Imaginer cette femme en compagnie de quelqu'un était si inconcevable que ce ne pouvait être qu'un mensonge. Endormir sa méfiance, voilà ce qu'elle voulait. Dakota en aurait mis sa main à couper. Hors de question de partager une nouvelle fois sa chambre avec cette femme, c'était la seule chose concrète qui sortait de cette discussion. Les yeux froids qui la dardaient n'avaient rien à voir avec les siens. On y décelait quelque chose de malsain, comme un vide abyssal qui vous attirait comme un trou noir pour vous réduire en pathétique amas de chair et d'os. Quand on y associait le calme olympien qu'affichait la harpie, la phobophobe ne pouvait s'empêcher de parvenir à la conclusion qu'elle se trouvait face à une sociopathe. Et lorsque cette femme évoqua le fait de ne pouvoir localiser sa cible, Dak' se contenta de rétorquer avec sarcasme :
- Quel dommage. Je suis sure que ton absence est une vraie souffrance pour lui.
Le poids de sa boussole dans la poche de sa veste d'uniforme se fit plus lourd. Elle aurait pu lui prêter, bien sûr, mais pour ça il aurait fallu admettre deux choses. La première était qu'Eve n'était pas en train de lui mentir. La seconde qu'elle n'était pas kleptomane en plus d'être une hypothétique tueuse. Les deux théories étaient si improbables que la gamine n'aurait pas risqué un objet aussi précieux dans cette affaire. Et si Eve disait vrai... c'était le cadet de ses soucis. C'était même un service rendu à cette pauvre personne sur laquelle la harpie essayait de mettre la main dessus. Ne serait-ce qu'imaginer ce qu'était les « formations » pratiquées par cette femme la mettait mal à l'aise.
Avec l'heure du déjeuner approchant, le magasin s'était progressivement vidé. Les allées n'abritaient plus qu'une femme à la recherche d'une boite de haricots et un gamin qui s'était réfugié près de la librairie. Eve et Dakota étaient à présent seules avec comme seule distraction la respiration de l'autre dans son dos. Avec le silence était venue l'angoisse, sourde et profonde. La phobophobe avait l'impression que d'un instant à l'autre, cette folle allait retourner son siège avant de lui planter un couteau entre les omoplates.
- C'est l'heure de la pause. Soyez de retour dans 30 minutes.
La voix du manager avait fait bondir le cœur dans sa poitrine mais cette frayeur n'avait même pas ébranlé le faciès glacial de la gamine. Elle se leva avec raideur pour se rendre en salle de pause après avoir acheté un sandwich douteux pour 5 rubz. Une véritable arnaque si vous voulez son avis, mais l'épicerie avait le monopole du marché local et pouvait donc librement servir de la merde enrubannée à prix d'or. Loué soit le capitalisme. Dakota déballa son repas et croqua dedans sans que son dégoût ne puisse se lire sur ses traits. Tant que cette nourriture remplirait son office -c'est-à-dire lui donner des forces pour supporter la présence exécrable de la stalkeuse– cela lui suffisait.
D'ailleurs en parlant d'elle, Eve pénétrait à son tour dans la pièce. Les yeux bleus de la gamine suivirent son trajet jusqu'à ce qu'elle se soit trouvée une place, après quoi ils obliquèrent vers le vieux poste cathodique qui trônait dans un coin de la salle de pause. Alors que Dakota se préparait psychologique à suivre les aventures de Billy Joe, le cowboy unijambiste, la femme qui s'occupait de l'accueil eut la présence d'esprit de se lever pour changer de chaîne. L'handicapé fut bientôt remplacé par une femme aux traits sévères qui lisait le texte de son prompteur tel un automate déshumanisé, le tout entrecoupé de séquences filmées sur le terrain.
C'est avec un intérêt somme toute relatif que la phobophobe apprit que de nouvelles épreuves avaient lieu à Miquitzli, dans la tour de l'envie. Elle put même observer avec un profond mépris la silhouette de Ace en plein accès pyromane et celle d'Elie dont le talent en boucherie n'avait probablement pas d'égal. Les lèvres pincées et le teint blême, Dak' attendit que la présentatrice ait embrayé sur des attaques à Techyo pour s'exprimer, la voix chargée de dédain.
- Quels idiots... Captant le regard d'Eve, elle reprit en guise d'explications : Je les connais tous les deux. Elle, elle avait été enlevée en même temps que moi par des pirates esclavagistes il y a quelques mois. Je savais qu'elle n'était pas maligne mais de là à vouloir devenir adepte... et lui... tsss... j'ai travaillé avec lui, près de Techyo. Il a failli faire échouer notre mission. Son orgueil n'a d'égale que sa stupidité.
Tout comme Melena ils avaient choisi cette voie. Pourquoi ? C'était bien une question à laquelle elle trouvait difficilement de raison valable. L'argent, la gloire, le pouvoir... mais avaient-ils vraiment de la valeur dans un monde qui n'était que chimérique. Est-ce que ça valait le coup de prendre le risque de sacrifier son âme pour finir végétatif dans le monde réel ? Non. Bien sûr que non. Ils auraient dû agir avec sagesse et laisser les gens de Dreamland se débrouiller avec leurs sombres affaires. A trop se mêler des affaires des autres, on ne récoltait que des ennuis.
- Devenir adepte a aussi peu de sens que de faire partie de cette ridicule « résistance ». Dans chaque camp, tout ce qu'on trouve ce sont des idiots idéalistes ou des assoiffés de pouvoir aux dents longues. Ou pire : les deux à la fois.
Sans savoir qu'elle touchait un point sensible, elle mordit une nouvelle fois dans son sandwich, suivant le reportage suivant qui relatait ses propres aventures. On vantait à présent la force et le courage des voyageurs qui avaient bravé les différences culturelles et le racisme elipsien pour libérer cette ville d'une menace terroriste. Lorsque son visage apparut en gros plan sur l'écran poussiéreux, Dakota grinça des dents. Tout ce qu'elle avait fait c'était rentabiliser efficacement son temps libre pour se faire de l'argent, et voilà qu'on lui collait sur le dos une étiquette de super-héroïne. Ça collait tellement peu à sa véritable vision du conflit et du monde en général qu'elle ne pouvait pas concevoir cet encensement autrement que comme une vaste blague. Son seul commentaire fut d'ailleurs assez explicite pour qu'on comprenne sa vision des choses...
- C'était bien payé. Et ma collègue était une adepte dont les gardiens forçaient la main. Vous parlez de héros du peuple...
Elle leva les yeux au ciel lorsqu'une elipsienne déclama à l'écran que tous les voyageurs n'étaient peut-être pas si mauvais que ça. Les gens étaient tellement naïfs. | |
| | | Eve M. Todrovitch
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Mer 24 Juin - 14:19 | |
| Eve n’avait pas relevé la remarque de Dakota, trop occupée à encaisser la mère de famille qui s’efforçait de rester de marbre devant le caprice de son cadet qui voulait absolument des bonbons. La détenue dut certainement penser à un bon nombre de choses qu’il fallait faire subir aux sales gosses, depuis la noyade jusqu’à l’abandon dans les bois. Elle n’avait jamais vraiment aimé les bonbons, petite. Sans doute parce que ses parents n’avaient pas souvent les moyens d’en acheter et sa maturité précoce lui faisait comprendre que quand ils en prenaient, c’était pour lui faire plaisir, mais c’était inutile. Elle avait détesté ce sentiment : celui de voir ses parents galérer à joindre les deux bouts et se voir offrir quelques sucreries alors que ça ne les aidaient en rien.
L’amour inconditionnel de ses géniteurs était ce qu’elle admirait le plus au monde. Ils n’avaient rien et lui donnaient tout, pour ne pas qu’elle se sente démunie, pour ne pas que ses camarades de classe la traite de pauvresse, pour ne pas qu’elle soit malheureuse. Pourtant, ce sont ces parents là qui mourraient prématurément. Les autres, ceux qui avaient tout et ne savait pas donner d’amour, ils étaient encore capables de se pavaner dans leur villa de luxe. Rien que le savoir, c’était insupportable.
Les yeux sans vie d’Eve s’étaient fixés quelque part devant elle. Elle inclinait lentement la tête à droite, à gauche, comme un prédateur qui épiait une proie qu’elle rêver de réduire en pièce. Qui imaginait-elle ? Un politicard ? Un de ces pseudos flics ? Le directeur de sa prison ? Un magistrat en robe ? Peut-être tous à la fois. Tous les pantins qui incarnaient une fausse autorité.
L’heure de la pause. La demi-heure pour être exacte. La russo-américaine s’extirpa lentement de son imagination morbide et quitta son ilot. Elle détestait la sensation d’être en jupe. Sans croiser un seul regard, elle se rendit à son tour en salle de pause, s’acheta un sandwich à l’allure peu engageante pour 5 rubz, puis s’isola dans un coin pour le déguster. Mâchonnant comme un automate, elle regardait machinalement les informations qui défilaient sur le poste cathodique.
En voyant Elie, elle fronça légèrement les sourcils. Cette fille, si on mettait de côté sa tendance à réduire à peu près tout le monde en charpie, ressemblait à Jade. En fait non : c’était exactement le même visage, comme si l’adolescente avait abandonné sa gentillesse habituelle – et son masque – pour devenir un monstre. Elle se souvint alors que la bonne jumelle lui avait parlé de son double ! C’était la raison pour laquelle elle avait demandé un autre visage à Miss Paper. Comment une personne aussi douce pouvait se dédoubler en ça…
L’exclamation de Dakota lui fit tourner la tête. Le monde des voyageurs était vraiment petit. Ainsi, la gamine connaissait également la jumelle de Jade ? Et le « bateau d’esclavagiste » devait alors être celui de ce bon vieux Georges Mikles. Tiens parlant de lui, elle aurait mieux fait de le tuer quand elle avait pu… au final, il s’était avéré plutôt inutile. Eve hocha la tête pour montrer qu’elle écoutait, mais la suite fut plus surprenante encore ! Pas tant le fait que la benjamine critique la résistance mais… elle avait vraiment délivré Elipse ? Ça ne faisait pas partie des missions proposées par la résistance pour le peu qu’elle en savait. Elle désigna du menton Melena, qui apparaissait désormais à l’écran, et lui confia :
- Je la connais aussi. On a bossé ensemble pour un type qui voulait qu’on récupère un crabe en cristal au fond d’un lac.
D’ailleurs, la connexion se fit immédiatement ! Melena-manipulations de cadavres-train-Dakota… momentanément, elle oublia que ses soupçons paranoïaque sur la blondinette étaient remis en cause et se tourna vers elle, réellement intéressée.
- Tiens d’ailleurs… vous avez les mêmes pouvoirs non ? Tu peux manipuler des cadavres. Je l’ai vu faire la même chose quand je l’ai connue.
Elle avala une autre bouchée de son sandwich bon marché sans quitter des yeux le brin de femme qui lui faisait face. Son discours à l’encontre des adeptes, et surtout de la résistance, avait capté son attention. Pour une enfant, elle avait un avis assez acéré, étonnant de voir qu’elle n’était pas comme ces gens qui ne jurent que par les plus puissants. Etrange au final comme tout semblait généralement converger vers ces conclusions : adeptes ou résistants ? Tous les gens comme eux devaient se trouver face à ce dilemme ? Sans doute que non. Que faisaient les autres alors ? Ceux qui choisissaient de ne pas intégrer le grand conflit des tours ?
- Et d’après toi, que devraient faire les voyageurs qui restent bloqués ici ? Qu’est-ce que tu projettes de faire sur le long terme ? Si t’es pas le genre qui s’enrôle, alors… lequel t’es ?
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| | | Dakota Earnshow
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Mer 24 Juin - 21:35 | |
| Le monde était petit, tous les voyageurs semblaient se connaître comme si Dreamland n'était pas plus grand qu'un mouchoir de poche... et pourtant ! A croire que c'était leur capacité à attirer les ennuis qui les réunissaient. Ainsi Eve connaissait aussi Melena et, à en croire son expression lors du reportage, Elie ne lui était pas non plus inconnue. Cela importait peu, à vrai dire, la seule chose que Dakota soulignait vraiment était l'atmosphère qui s'était détendue d'un coup. Pour une fois, la stalkeuse n'arborait pas ce regard vide et glacé de meurtrière. Elle l'avait troqué pour un intérêt largement affiché alors qu'elle s’enquérait des dons et des motivations de la surdouée.
La gamine prit le temps de finir sa bouchée, mâchant soigneusement sans se soucier de faire attendre son interlocutrice. Elle appréciait moyennement qu'on s'intéresse de trop à ses capacités et n'était pas pressée de répondre, de toute façon. A quoi bon poser ce genre de question si ce n'était pour évaluer sa force dans le but de s'opposer ? L'hypothèse de vouloir connaître un allié éventuel ne convenait pas à cette situation, alors quelle autre raison ?
- Nous avons plusieurs dons en commun, oui. Elle leva ses orbes gelés vers Eve, observant un silence de quelques secondes avant de reprendre : Ca pose problème ? C'est pourtant on ne peut plus logique. Ce serait vraiment égocentrique que de croire que nos pouvoirs sont uniques et partagés avec personne. Il doit y avoir des centaines, voir des milliers de personnes avec les mêmes pathologies. Et combien de pouvoirs différents ? Une trentaine pour chaque problème, je suppose. Alors forcément, qu'on le veuille ou non...
Dakota leva les paumes vers le plafond l'air de dire « que veux-tu ? » avant de se saisir de ce qui restait de son sandwich. Sa déclaration était autant un mensonge qu'une conviction profonde. Oui, elle mentait quant à la raison de son partage de pouvoir avec l'adepte, mais la théorie se tenait. C'était même terriblement improbable que de penser que chaque voyageur était l'unique détenteur de chacun de ses pouvoirs. Ils finissaient toujours par se ressembler. Et les thanatophobes étaient probablement l'espèce de voyageur la plus répandue. La peur de la mort était une banalité affligeante, ces phobiques devaient pulluler ici-bas comme des cafards dans un logement insalubre.
Si seulement la curiosité de la paranoïaque s'était arrêtée là... mais non, voilà qu'elle voulait connaître ses projets à long terme. Elle avait presque l'air surprise qu'il existe des gens assez sains d'esprit pour ne pas prendre parti dans un conflit qui ne les concernait pas. La stupidité était donc si banalisée ?
- Je suis du genre à m'occuper de mes affaires.
Comment mettre un terme à une conversation en une leçon. Partager sa théorie de guérison avec tous les pèlerins qui passaient n'était pas dans ses intentions. La plupart la prendrait pour une folle, dans tous les cas, trop incapable d'objectivité pour voir la vérité en face. Eve ne ferait d'ailleurs rien de cette information. Vu son comportement, elle était probablement dans le déni. Comme Sydney, persuadée d'être équilibrée et que le problème vient du reste du monde. Déconnectés de la réalité, voilà ce qu'ils étaient. Même si on les mettait face à l'évidence de leur état ils seraient encore capables de nier, se carapatant dans leur rassurante carapace de mensonges.
La blondinette avala ce qu'il restait de son sandwich, alla boire un verre à la fontaine à eau, ignorant royalement l'éventuelle contrariété de sa collègue d'un jour, avant d'aller aux toilettes pour soulager sa vessie. C'était bientôt l'heure de reprendre, il n'y avait plus qu'à espérer que la harpie ne la harcèlerait pas sur le sujet.
De retour à sa caisse, Dakota put constater que le magasin restait désespérément vide. Les clients devaient se trouver chez eux, attablés devant un repas moins pathétique et énergiquement pauvre que le sien. Seule avec Eve, elle pouvait presque sentir l'attention et l'intérêt malsain que sa collègue lui portait. Peut-être qu'une réponse bateau permettrait de satisfaire cette curiosité déplacée pour lui offrir une paix bien méritée ?
- Les gens comme moi voyagent, tout simplement. D'autres s'installent et tentent de construire leur vie ici. Quoi d'autre ? Ces conflits ne nous concernent pas. Tout ce qu'on gagne à s'en mêler ce sont des ennuis, ce pourquoi j'ai refusé l'invitation des gardiens de Freedoom. Que les fous s'entretuent entre eux, ils sont bons pour ça et pendant ce temps ils me fichent la paix.
Accepter ce tatouage et les responsabilités qui allaient avec aurait été une grossière erreur. Redevenir esclave après avoir gagné durement sa liberté... rien de plus, rien de moins. Sans parler du fait que personne ne connaissait les réelles implications de ce combat millénaire. Détruire les tours ou les protéger, mais pourquoi ? Qui diable savait ce qui allait se passer si une tour tombait ? Paradis ou enfer, toutes les théories étaient égales parce qu'on n'avait preuve de rien. Les pessimistes protégeaient les tours pendant que les optimistes cherchaient à les détruire, c'était ça la vérité. Mais ils semblaient tous oublier un « détail » pourtant d'une importance capitale...
« JE VOUS VOIS. » Dak' se souvenait encore de cette fois grave et profonde qui avait ébranlé les murs de la bibliothèque de Gloutoniskaïa pendant qu'elle s'emplissait de sable. Cette entité répondant au nom de Marchand de Sable était plus terrible que n'importe quel gardien... et il les traquait, eux, voyageurs. Il fallait vraiment être d'une stupidité abyssale pour risquer d'attirer son attention en se mêlant à des combats dont dépendait l'équilibre de Dreamland.
- D'ailleurs je ne sais pas de quel genre tu es, mais si tu n'es pas encore impliquée dans quelque chose je te conseillerai de continuer sur cette lancée. Il y a des choses qu'il ne vaut mieux pas réveiller. | |
| | | Eve M. Todrovitch
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Jeu 25 Juin - 13:50 | |
| « Le genre à s’occuper de ses affaires » Eve ne put s’empêcher d’esquisser un sourire. Dans un sens, cette répartie en disant long sur la maturité de la gamine. Elle n’était pas comme ces voyageurs un peu insouciants qui racontaient toute leur vie au premier venu. Leur relation était et resterait une entente de non-agression, à défaut de toujours être cordiale, et ça s’arrêterait là. Bien, c’était pas comme si la russo-américaine avait envie de s’encombrer d’une môme.
Elle finit distraitement son sandwich en regardant les informations, qui n’avaient désormais plus rien de palpitant. On discutait d’une race de vache qui produisait de la bière, de la fête à la pastèque d’une petite ville aztèque, des examens de fin d’année qui approchaient pour les étudiants de Gloutoniskaïa et de la fin d’un conflit armé entre Techyo et des robots rebelles. Eve s’autorisa un gobelet d’eau avant de retourner à son poste, pile pour la reprise du travail, même si l’épicerie semblait toujours désespérément vide.
Comme si la phobophobe avait pris le temps de réfléchir à sa réponse, elle reprit finalement la parole pour être un peu plus expansive sur ses objectifs à long terme. Voyager. Juste voyager. La détenue se demandait si elle avait jamais fait autre chose ? Oh bien sûr, elle avait toujours voulu rencontrer des gens capables de lui expliquer les raisons d’être de ce monde, comment entrer et sortir, quels étaient ses secrets, quels étaient ses limites… pourquoi ? Pas temps par avidité, parce que le pouvoir ne l’intéressait pas. Simplement par peur ? Elle ne connaissait pas le monde des rêves et elle était de ceux qui détestaient ne pas savoir où ils en sont. Désormais, elle s’y était fait. Du coup, son besoin de poser des questions existentielles s’était amoindri. Elle était là… mais pour quoi faire ?
La dernière déclaration de Dakota la fit pivoter de son siège pour la regarder. Ce n’était pas anodin, elle parlait de quelque chose de précis, mais quoi ? Qu’est-ce qui ne devait pas être réveillé ? Eve resta silencieuse un long moment, ses yeux glacés plantés dans le dos de sa collègue, puis elle fit volte face. Un vieux bonhomme venait de s’enfoncer dans les rayons obscurs, claudiquant comme il pouvait sur une canne tordue. Tout en l’observant, elle s’interrogeait : était-elle mêlée à quelque chose ? Pour l’instant, la résistance ne lui avait rien demandé de capital. Si c’était le cas, était-elle faite pour suivre des ordres ? Saurait-elle risquer sa vie pour une cause qu’elle n’embrassait pas forcément ?
Indirectement, la blondinette venait de mettre le doigt sur quelque chose d’important. Les voyageurs n’étaient que des pions. Qu’importe qui poussent les pièces, entre des semblables plus anciens ou des dreamlandiens, un magnétisme malsain attirait presque tous les voyageurs à entrer dans la partie. Finalement, ceux qui s’en tiraient à bon compte étaient ceux qui reprenaient les rennes de leur destin.
- C’est étonnant de voir que la personne la plus censée que je rencontre ici, c’est une gamine de quoi… 12 ans ?
Ce n’était ni un compliment, ni une insulte. Un simple constat en vérité. Chacun des visages qu’elle avait côtoyés lui revenaient, ils lui évoquaient haine ou mépris pour la plupart. Aucun n’avait eu l’air aussi froidement droit dans ses bottes que Dakota. Au final, ses soupçons s’enfuyaient réellement : la phobophobe ne parlait pas comme une espionne. Certes Eve n’en avait pas l’expérience, c’était juste son instinct animal qui s’exprimait, plus aiguisé encore que sa démence. Le vieillard déambulait encore dans les rayons et elle en avait assez d’essayer de le suivre du regard. Elle pivota donc à nouveau pour observer sa collègue, la tête légèrement penchée sur le côté, comme si elle étudiait un animal en classe de biologie.
- T’as pas l’air de celles qui demandent des Barbies pour Noël ou qui s’éclatent à Disneyland Floride… t’es une surdouée ou quelque chose comme ça ?
La russo-américaine aurait voulu dire que Dakota lui rappelait elle-même à son âge, mais ça aurait été faux : elle était pire. Plus calculatrice, plus froide, plus mature. La seule différence, c’était ses manières. On ne pouvait rien contre l’éducation, et celle de la blondinette était clairement située à des sphères de standing loin au dessus de celles qu’avait reçu Eve. Cette dernière esquissa encore un sourire, à peine visible sur ses traits de marbre :
- Tu vas encore me dire de m'occuper de mes affaires ? ... et qu'est-ce qu'il ne faut pas réveiller ? reprit-elle après une pause, tu avais l'air de parler de quelque chose de précis. | |
| | | Dakota Earnshow
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Jeu 2 Juil - 21:47 | |
| - 13 ans.Les yeux de Dakota s'étaient étrécis lorsqu'Eve l'avait qualifié de personne la plus mature qu'elle ait croisée. Cette femme était si peu expressive que la gamine n'arrivait pas à trancher. Est-ce qu'elle sous-entendait que les gens étaient globalement des attardés ou qu'elle était exceptionnellement raisonnable? Dans le doute, elle préféra garder la question de côté jusqu'au moment où elle serait fixée. Prudence était mère de sûreté. D'ailleurs les remarques ridicules qui suivirent firent plutôt pencher la balance du côté de la seconde hypothèse tout en tirant un rictus de désapprobation à la surdouée. Les enfants devenaient ce qu'on en faisait, c'était stupide de critiquer des normes qu'on instaurait soi-même, comme le choix des jouets ou des activités. A croire qu'il ne fallait pas trop en attendre d'une harpie. Quant à répondre à cette question idiote, c'était une autre histoire. A quoi bon ? Ça n'avançait à rien. C'était le genre de questions-bateau créée juste pour combler un vide dans une conversation. Elle n'apportait rien et personne s'en souciait vraiment, à l'instar du « ça va ? » que les gens s'évertuaient à demander chaque matin alors qu'ils se contrefichaient de la réponse. Au terme de ce raisonnement, Dakota décida d'offrir en réponse le plus beau des silences, trouvant un intérêt démesuré dans la contemplation d'une mouche posée sur son tiroir-caisse. Visiblement, Eve avait compris le message, fournissant elle-même la réponse adéquate. Fin de la discussion ? Hélas non. A ne pas avoir assez tenu sa langue, voilà qu'on déversait une nouvelle fois sur elle une mer d'interrogations. Ça lui apprendrait à être trop généreuse. Les gens ne se contentaient jamais de simples mises en garde. Tout comme Yoake, la stalkeuse voulait des informations, toujours plus d'informations... et pour quoi en échange ? Sa reconnaissance éternelle, sûrement. Autant dire du vent. - Je parlais en effet d'une chose précise.Le suspens plana un moment jusqu'à ce que l'évidence s'impose : sa phrase était achevée et aucune autre ne suivrait. Comme pour dissiper le malaise qui s'amplifiait de manière exponentielle, une petite vieille installa ses courses sur le tapis de caisse tout en débutant une conversation aussi vide d'intérêt que sa simple existence. La phobophobe écouta avec un intérêt poli -mais surtout feint- les pérégrinations de sa cliente qui avait dû garder ses petits enfants ce qui avait failli lui faire rater sa partie hebdomadaire de bingo parce que Tom, le plus jeune, passait son temps à hurler ce qui l'empêchait d'entendre correctement les numéros annoncés. Et ce n'était que le début. Le monologue de la septuagénaire était aussi long que sa liste de courses et le silence qui suivi son départ fut une vraie bénédiction. Pourtant... la harpie semblait encore attendre. C'était comme si ses paroles avaient allumé en elle le feu d'une curiosité qu'on ne pouvait pas éteindre par la simple ignorance. Si elle n'avait pas été coincée dans cet îlot, Dakota aurait sûrement réglé la question en lui faussant compagnie mais elles étaient condamnées à rester dos à dos. Que faire, dans ces conditions ? Quel était le plus grand désagrément : expliquer gratuitement ou subir la pression morale d'une sociopathe ? Et est-ce que parler de ce sujet trop ouvertement ne risquait pas d'attirer le marchand de sable aussi sûrement que ne l'avait fait la lecture de ce livre, à la bibliothèque de Gloutoniskaïa ? L'entité avait été capable de la faire suivre jusqu'au village du père noël et même si l'on pouvait supposer que sa téléportation surprise avait brouillé les pistes, sa récente médiatisation avait dû attirer de nouveau l'Oeil sur elle. Inconsciemment, elle se mit à chercher du regard toute trace de sable, la peur d'avoir peur de se faire attaquer, puis la peur tout court emballant son cœur dans sa poitrine étriquée. Rien... pour l'instant. Mais pour combien de temps encore ? Elle en serait presque venue à espérer d'être à nouveau envoyée à l'autre bout du monde, si seulement l'espoir de retrouver James ne l'ancrait pas dans cette ville misérable. - Je conçois que tu puisses être curieuse, mais ce n'est pas le genre de choses dont on parle. Il est capable de nous renvoyer chez nous, de déchirer nos âmes, de nous pourchasser jusqu'à nous avoir tué. Il est immortel, il n'a besoin ni de boire, ni de manger, ni de dormir. Nous ne sommes que des fourmis pour lui, des insectes nuisibles qu'il ne rêve que d'écraser sous son talon et, malgré tout le respect que je te dois... si je t'en dois, je ne risquerai pas ma vie en prononçant son nom.Plus elle en disait plus son malaise croissait en elle comme une tumeur. Etait-ce de la prudence légitime ou de la paranoïa qui la poussait à inspecter chaque recoin de la supérette dans l'espoir de n'y trouver ni scorpion, ni étrange homme des sables armé d'un cimeterre ? Par deux fois elle avait failli mourir et elle ne pouvait s'empêcher de sentir un danger approcher. A croire que parcourir trop longtemps Dreamland vous pourvoyait d'un radar à risques mortels... ou alors elle devenait folle, tout simplement. Mais cet état de fait était tout bonnement inadmissible. Elle venait pour guérir, par pour mériter une magnifique camisole qu'elle porterait à l'occasion des rares visites que lui offriraient ses parents lorsqu'ils arriveraient à étouffer la honte dont elle serait la source. La clochette de la porte d'entrée la fit sursauter, réflexe qu'elle ne put contenir, une fois n'est pas coutume. Elle était vraiment à fleur de peau et le regard de l'homme qui venait d'entrer n'était pas pour détendre l'atmosphère. A croire qu'on avait décidé d'organiser dans cette supérette un concours de regard reptilien... [HRP : l'homme en question, c'est Simon. Je vais poster le message de MJ à Glouton', pour expliquer comment il débarque jusqu'ici ] | |
| | | Eve M. Todrovitch
Maladie mentale : Troubles paranoïaques
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Jeu 2 Juil - 23:20 | |
| HRP : ahahah bienvenu Simon \o/
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Dakota ne semblait pas vouloir parler pourtant, pour une fois, Eve était vraiment intéressée par la réponse. C’était la loi du règne animal : quand on est un prédateur, on s’assure de savoir qui est au sommet de la chaine alimentaire, si on n’a pas la chance de l’être soi-même. La russo-américaine avait bien conscience qu’à Dreamland, les règles n’étaient pas les mêmes que dans le monde réel. Alors si le monstre lové dans ses entrailles demeurait dangereux, il se devait de faire attention à ne pas se faire lui-même dévorer. Le souvenir du Kraken était encore trop présent dans son esprit, autant que les blessures dans son dos lui rappelaient l’œuvre de la vindicte populaire.
La gamine ne peut pas le voir car la détenue lui tournait le dos, mais un léger sourire carnassier rompit l’habituel masque de glace du visage de Eve. Une entité immortelle ? Capable de les traquer et de leur infliger pire que la mort ? Elle était dans le coin depuis suffisamment longtemps pour ne pas remettre en cause l’existence de cette « personne », mais elle avait du mal à concevoir sa toute puissance. A ses yeux, toute chose était finie, s’épuisait, se dépassait… quelque chose devait bien pouvoir surpasser « celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom », non ? En tout cas, elle avait l’impression de placer une pièce supplémentaire sur un grand puzzle. C’était lui qui avait arraché leurs ombres à Jade et Rochel… si la Résistance s’intéressait à ses agissements, il y avait des chances qu’elle soit mêlée à cette intrigue. Tôt ou tard.
La clochette de l’entrée se fit entendre. La taularde leva lentement ses yeux inexpressifs pour détailler le nouveau venu, renonçant à son sourire commercial. Il ne lui fallut pas plus de quelques secondes pour le cerner. Elle reconnut d’abord le pantalon orange, trop significatif. Mais aussi : elle connaissait ces regards glacés comme la mort, pour les avoir trop vus… dans la rue, et en prison. L’homme n’était pas bien costaud et pourtant, elle se doutait qu’il n’était pas un agneau. L’instinct. Le flaire. Dans tous les cas, elle avait rencontré tellement de fous qu’elle pourrait presque remplacer sa psy.
Eve fut arrachée à sa contemplation par le vieux bonhomme aperçut plus tôt qui se présenta, enfin, à sa caisse. Elle tourna vers lui son visage d’une pâleur maladive et constata, avec une surprise parfaitement dissimulée, qu’ils n’avaient plus que trois ou quatre dents. De fait, il était très compliqué de comprendre ce qu’il essayait d’articuler ; la détenue se contenta de scanner ses articles et de réclamer 27 rubz en ponctuant ses « bip » de « hum-hum ». L’épave dut être satisfaite de ses services puisqu’elle lui adressa un grand sourire et s’en alla d’un pas claudiquant.
Avec le recul, la jeune femme se demandait comment il pouvait y avoir autant de gens à San Factody. Cette ville délabrée noyée dans la brume empestait la morosité, la pauvreté et l’humidité. Y avait-il vraiment des gens qui s’y trouvaient bien ? Même elle, qui pourrait y crécher plusieurs nuits pour les besoins de la cause, finirait par aller voir ailleurs. Ailleurs. Depuis la mort de sa mère, sa vie n’avait été qu’une succession d’« ailleurs » sans quelle ne soit jamais chez elle. Est-ce qu’elle déménageait parce qu’elle commettait un meurtre ou est-ce qu’elle commettait un meurtre parce qu’elle voulait déménager ? Une très bonne question à soumettre au professeur Thores.
Machinalement, désœuvrée, Eve regarda ses ongles dont elle ne prenait jamais soin. Elle ne prêtait déjà plus attention à l’inconnu et se félicitait qu’il ne devrait pas réussir à voir en elle une de ses semblables. Si ses yeux marron étaient toujours aussi illisibles, ses blessures l’avaient affaiblie. Sa peau était laiteuse, tout son corps devait renvoyer une impression de fragilité. En plus de ça, elle portait un uniforme de caissière locale qui n’était pas des plus saillants. Pourvu qu’il l’ignore en fait… elle n’avait pas envie de s’attirer des ennuis, pas maintenant.
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| | | Simon Fox
Maladie mentale : Sociopathe
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Ven 10 Juil - 15:10 | |
| Hrp : merci :3 et encore pardon pour le retard, j'ai quelques petits soucis irl qui me prennent la tête >_< ________ Vient de ----> GloutoniskaïaIl aurait dut le voir venir. Tout dans cette ville était contre lui. Ici il n'était rien, il était faible et impuissant. Comme il aurait voulu étriper tous ces imbéciles qui le regardaient avec des yeux ronds pendant qu'on lui passait les menottes. Certains affichaient une haine féroce à son encontre, d'autres au contraire évitaient le contact visuel, l'observant mais en évitant de se faire remarquer. Il était une bête dangereuse qu'on capturait. Au premier abord immobile, la gargouille se mit à le regarder, tout sourire, fier d'elle. Ce qui bouillait à cet instant dans l'esprit du sociopathe n'était même pas descriptible. C'était comme si ses pensées avaient été remplacées par un acide capable de ronger n'importe quelle émotion, les remplaçant par une haine si violente que croiser son regard en cet instant aurait fait s'évanouir les âmes sensibles. Fusillant la statue de pierre de ses yeux d'un bleu plus glacial qu'un iceberg, il tourna alors la tête vers le policier qui crut malin de le provoquer en glissant l'avis de recherche dans sa poche. Le sourire de ce dernier, content de sa blague, s’effaça à moitié lorsqu'il croisa les iris du monstre. Au milieu de la foule, alors qu'on le conduisait vers un véhicule spécialement prévu pour lui, son regard croisa celui d'Anastasia sous sa forme masculine. Malgré la colère qui grondait sous son crâne, il lui adressa un rictus entendu, lui signifiant que rien n'était joué et qu'elle le reverrait bien vite pour continuer à jouer. Il lui adressa même un clin d’œil, moqueur, pour lui rappeler son petit cadeau d'adieu, laissant échapper un gloussement à moitié nerveux qui passa aux yeux de tous pour de la folie pure. Se débattre n'aurait servit à rien. Docile, il monta dans le fourgon, son esprit fonctionnant à cent à l'heure sous la pression de sa colère. Il fallait qu'il trouve un moyen de s’échapper. Finir en prison ici alors qu'il l'était déjà dans le monde réel ! Quelle ironie ! C'était tout simplement hors de question. Alors qu'il écoutait ses geôliers débattre de son sort, il parvint à capter qu'ils le conduisaient dans un train. Ce serait sa meilleure chance de s'éclipser. D'autant qu'à la perspective d'une peine de mort probable, il avait encore moins envie d'arriver à destination. Dans le fourgon, il ne lâcha pas un seul instant du regard le policier/mage qui était assis en face de lui. Le fixant avec une insistance malsaine droit dans les yeux, le policier avait fini par regarder son collègue, mal à l'aise. La folie et l'envie de meurtre se lisait sur son visage tout entier et, s'il avait put, en cet instant, il aurait assurément dépecé les deux imbéciles qui lui tenaient compagnie. Arriva le moment de monter dans le train. La vieille locomotive, semblant tout droit sortit d'un mauvais western, n'était pas plus accueillante que le fourgon. Alors qu'il s’apprêtait à monter, on lui retira ses liens. Étaient-ils donc idiot ? Un coup bien placé au type sur sa droite et il pourrait filer ! Mais alors qu'il s’apprêtait à envoyer son coude valser dans le nez du flic, son bras lui sembla aussi lourd que s'il avait été lesté de plomb. Un air moqueur passa sur le visage du flic qui avait comprit à l'air étonné de Simon. La magie ! Encore cette foutue magie ! Il la haïssait ! Les mâchoires serrées, avachi sur la banquette de son compartiment, sa colère grandissait dans son esprit, transformant la bête enragée qu'il était en un démon qui finirait tôt ou tard par surgir de sa boite. Chaque fois qu'il imaginait une façon d’assommer ses gardiens, il se sentait lourd et pataud, comme si la gravité venait soudainement d'être augmentée. Malgré sa liberté apparente, il n'avait aucune chance de sortir de ce train tant qu'il était soumis à cette maudite magie. Son seul espoir était de trouver comment s'en défaire. Finalement, à force de cogiter, et ne trouvant rien, il ferma les yeux, essayant de brider un peu la haine qui le submergeait. Pour cela, il imagina Selene, attachée sur une table d'opération, complètement nue et à sa merci. Avec une pince plate, il commençait par lui arracher les ongles un à un. Une fois cela fait, il prenait de petites aiguilles qu'il plongeait dans du venin d'abeille avant de venir les lui planter à des endroits stratégiques un peu partout sur son corps frêle. Rien que d'imaginer ses cris de souffrance le fit frémir de plaisir, apaisant pour un tant sa colère. Elle qui aimait tant planter des aiguilles dans ces petites poupées vaudou, voilà le sort qu'il lui réservait. Alors qu'il se laissait aller à faire subir le même châtiment à Anastasia, il entendit ses gardiens discuter. Ils allaient le laisser seul. Du fait qu'il avait les yeux fermés et l'air serein, ils devaient le penser assoupit. Loin de les détromper, il abandonna ses rêves malsains et guetta le meilleur moment pour agir. Même s'il avait du mal à se mouvoir, si ses gardiens s'en allaient suffisamment longtemps, il aurait le temps de filer, aussi difficile que cela soit. Sa vie en dépendait. L'un des deux gardes fit alors la pire boulette de sa vie. Énonçant tout haut comment briser le sortilège, il ne l'estimait pas suffisamment intelligent pour le découvrir par lui-même. Il était vrai qu'il n'aurait jamais songé à cela mais maintenant qu'il le savait, il n'avait plus qu'à attendre. Une fois seul dans le compartiment, il ouvrit les yeux et se leva avec peine. Son corps semblait irrémédiablement attiré vers le sol et il fini par tomber. C'était trop dur. Allongé par terre, remué par les cahots du train qui l'emmenait vers sa mort, il parvint à se remettre à genou. Ce qu'il lui fallait c'était un miroir. Ou n'importe quoi qui puisse avoir un reflet... La vitre ! Il se remit debout, le sortilège luttant contre lui, comme conscient de son intention de le briser. Parvenu devant la vitre, il aperçut son reflet avec en arrière plan un paysage champêtre. Il s'approcha et alors qu'il allait déposer un baiser sur le verre froid, une secousse le fit embrasser la vitre avec plus de force qu'il ne l'aurait voulu et il s'y cogna même les dents et le nez. Mais aussitôt, il se sentit plus léger. Le manteau d'acier qui pesait sur ses épaules avait disparut et il n'avait plus qu'à filer. Renonçant à attendre ses gardiens pour les tuer, il écouta la voix de la sagesse et, alors que le train ralentissait, il fila à l'anglaise. Libre ! Il était libre ! Derrière lui, le train repartait déjà et lorsque ses deux gardiens s’apercevraient de leur erreur, il serait loin. Pour l'heure, il lui fallait reprendre ses esprits. Il était aux abords d'une petite ville à l'aspect peu accueillant. A vrai dire, c'était le parfait contraire de Gloutoniskaïa. Ce côté merveilleux et magique que respirait la ville des mages était totalement absent ici. San Factody. La pancarte en vieux métal parsemé de rouille n'était même pas droit. S'il n'y avait pas de magie ici, c'était peut-être l'occasion de réfléchir à la suite du programme, de se poser un peu et d’étudier toutes les possibilités qui s'offraient à lui. Alors qu'il progressait à l’intérieur de la ville, son costume orange détonnant plus ici, dans cette ville morne et normale, qu'à Gloutoniskaïa où tout n’était qu’excentricité, son estomac se mit à gargouiller furieusement. Il n'avait rien avalé depuis trop longtemps et s'il ne remédiait pas à ce problème en premier lieux, il finirait par être trop faible pour quoi que ce soit. A force de déambuler dans les rues de la ville, il fini par tomber sur une petite épicerie. Elle ne payait pas de mine, mais il pourrait se dégoter de quoi se nourrir. Il n'avait pas d'argent, il devrait donc trouver un moyen de voler sa pitance. Voila qu'il en était réduit à voler ! Mais alors qu'il s’apprêtait à passer la porte du magasin, un gros corbeau tout noir se posa sur son épaule. Surprit, Simon tourna la tête vers l'animal dont le bec était suffisamment épais et pointu pour crever l’œil de n'importe qui et duquel pendait un petit paquet enveloppé dans du papier kraft. Sans trop savoir pourquoi, le sociopathe tendit la main et le corbeau laissa tomber le paquet dedans avant de reprendre son envol, croassant d'une voix rauque et lugubre. La petite boite tenait dans la paume de sa main et « Simon Fox » était imprimé dessus en capitale d'imprimerie. Qui donc pouvait lui envoyer un paquet de cette façon ? Et surtout, comment cette personne pouvait-elle savoir où il se trouvait ? Regardant furtivement tout autour de lui, il ne vit qu'une vieille dame traînant un sac à roulette et un jeune qui promenait un chien de l'autre côté de la rue. Personne n'était là pour le conduire en prison. Suspicieux, il défit le papier et ouvrit la boite pour découvrir … Qu'est-ce que c'était que ça ? Il reconnu aussitôt les 'Rubz' que tout le monde utilisait à Gloutoniskaïa sur le marché. C'était la monnaie de ce monde et voilà qu'on lui en offrait une vingtaine ! Quelle aubaine ! Fourrant hâtivement l'argent dans sa poche, il jeta le paquet dans une poubelle à l'extérieur du magasin. Voila qui réglait son problème pécunier. Pénétrant dans la petite épicerie, une clochette annonça son entrée. Aussitôt, il examina les personnes présentes. Devant lui, deux caissières faisaient leur job, dos à dos. Son regard de glace passa rapidement sur elles, les analysant comme par automatisme. L'une d'elles était jeune. Certainement trop jeune pour travailler d'ailleurs. Quant à l'autre, elle semblait être tout sauf commode. Le visage fermé, le regard froid, il était peu probable qu'un sourire joyeux et sincère illumine un jour son joli minois. Sans faire plus attention à elles, il se mit à arpenter les rayons du magasin en quête de quelque chose pour lui remplir l'estomac. Il attrapa un sandwich au poulet et aux tomates, prit une petite bouteille d'eau et se rendit directement à la caisse. Inutile de s’attarder ici plus longtemps. Choisissant la caisse où se trouvait la plus jeune des caissières, il lui adressa un sourire amical, ne laissant rien transparaître de la colère qui bouillait encore en lui, même si elle s'était un peu apaisée à présent. Il posa ses achats devant elle et la laissa les scanner. Pendant ce temps là, il en profita pour obtenir quelques informations. « Excusez-moi mais, je viens d'arriver en ville. Sauriez-vous par hasard où je pourrais trouver un hôtel ou quelque chose d'approchant ? » Il n'avait que peu de moyens et, même si l'argent tombait du ciel, il ne savait pas quand viendrait le prochain corbeau. Face à lui, la jeune fille n'avait pour le moment aucun intérêt à ses yeux. Elle n'était qu'un élément du décor qui allait lui fournir des informations et rien de plus. Elle ne savait pas quelle chance elle avait d'être perçue ainsi. | |
| | | Dakota Earnshow
Maladie mentale : Phobophobie
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Mer 15 Juil - 14:48 | |
| Ce n'est qu'un client. Plus facile à penser qu'à croire, malheureusement. Le vieillard édenté leur avait faussé compagnie et ne restait plus dans la supérette qu'Eve, Dakota et cet homme au regard glacé qui ne tarda pas à disparaitre dans les rayons mal tenus. A sa déclaration, la harpie n'avait rien répondu. Par peur ? La gamine en doutait fortement. La stalkeuse devait se rire d'elle et la prendre pour une illuminée craignant le croque-mitaine caché sous son lit. Elle sous-estimait probablement la force du marchand de sable, ou y croyait autant qu'au père noël. Mais c'était faire preuve d'une stupidité profonde en ce monde. Ici, ce généreux vieillard existait, tout comme à peu près tout ce que l'esprit humain pouvait concevoir, bon comme mauvais. Surtout le mauvais.
Alors que leur nouveau client revenait vers elle, un sandwich et une bouteille d'eau entre les mains, la phobophobe sentit des picotements sur ses jambes nues. Comme si... comme si un moustique la piquait. Non, pas exactement. Plutôt comme...
**Du sable.**
C'était impossible, elle devait rêver. Son esprit commençait sérieusement à dérailler. Si elle fermait les yeux elle pouvait discerner contre sa peau l'impact de grain de sable qui chutaient, un à un, sur sa peau d’albâtre. Dakota aurait pu jeter un coup d'oeil, mais ça aurait été accepter le fait d'être bonne à enfermée si jamais elle ne constatait rien. Elle n'était pas encore prête pour ça, elle avait bien peur d'en avoir peur.
Le bruit de courses qu'on posait sur son tapis lui fit tourner la tête vers l'étranger. Son regard avait radicalement changé, mais son costume ne trompait pas. C'était une tenue de prisonnier dont le orange criard était une punition en soi pour les détenus. Un voyageur, donc. Comme si elle avait la tête à affronter -encore- un meurtrier sociopathe avec ses préoccupations actuelles ! Heureusement, l'homme n'avait pas l'air de vouloir s'attarder.
Avec son éternel masque de stoïcisme, elle encaissa les articles et s'apprêtait à énoncer le prix lorsqu'elle eut le droit à l'échantillon de politesse le plus écœurant qu'il lui eut été donné de voir depuis longtemps. Détaillant le visage souriant qui avait remplacé le regard colérique et acéré, elle garda le silence plusieurs secondes avant de rétorquer d'une voix glaciale :
- Ceci est une supérette, pas un office du tourisme. Ça vous fera 7 rubz.
Elle se saisit de l'argent tendu avant que l'inconnu n'ait le temps de répondre et effectua les manipulations nécessaires sur l'écran pour ouvrir son tiroir caisse. Après le "clic", un bruissement trop familier, comme des milliers de grains qui se déversaient. Elle sentit le poids du sable sur ses genoux, encore chargé de la chaleur du désert. Aggravation de sa folie ? Sensations réelles ? Morte d'effroi, elle baissa les yeux pour constater la vérité.
Des flots ocres se déversaient sur ses genoux et formaient déjà un tas plus que respectable sur le sol qui menaçait d'ensevelir ses pieds. Ils jaillissaient du tiroir-caisse comme un mauvais tour de magie, accompagnés des traditionnels scorpions, serpents, et autres petites créatures mortelles.
Combien de temps était-elle restée là, à contempler bouche bée la réalisation de ses pires cauchemars ? Quelques secondes, probablement, mais pour la surdouée c'est une éternité qui sembla s'écouler avant que le cri bloqué dans sa gorge serrée ne franchisse ses lèvres. Un hurlement long et strident qui lui était arraché alors qu'elle se levait pour reculer dans la précipitation, son siège percutant celui d'Eve avant de se renverser. Eve... tout était de sa faute ! Tout était arrivé parce qu'elle l'avait trop questionné ! C'était... c'était tellement évident ! Et quelle idiote elle avait été de lui répondre, même juste par énigme !
Pendant ce temps, le torrent de sable grossissait à vue d'oeil tandis qu'une partie des grains s'élevaient dans les airs comme des volutes de fumée pour se compacter sous la forme d'un oeil fixé droit sur elle. Son coeur rata un battement alors qu'une voix d'outre-tombe s'éleva, venant de nulle-part, presque assourdissante dans l'enceinte du petit magasin.
- TU NE POURRAS PAS FUIR ETERNELLEMENT.
Quelqu'un d'inconscient aurait peut-être tenté un "tu parries ?". Dakota, elle, se contenta d'essayer de s'échapper en grimpant sur sa caisse pour filer droit vers la sortie. Un bruit dans son dos la poussa néanmoins à tourner à tête alors qu'elle était encore perchée, faisant grandir un peu plus la terreur dans son coeur. Sur les rebords du tiroir-caisse se formait une main sablonneuse qui, dès qu'elle eut pris forme, devint de chair et d'os. Sa jumelle ne tarda pas à pointer pour se refermer sur une poignée de sable qui se changea en cimeterre. Le reste de l'homme ne tarda pas à suivre, s'extirpant de la boite minuscule vêtu comme un touareg.
- IL N'EXISTE AUCUN ABRIS. JE SUIS PARTOUT. JE SUIS TOUT.
La peur était omniprésente. Elle s'insinuait dans ses poumons comme un liquide visqueux pour la faire suffoquer alors que ses yeux cherchaient la porte pour la trouver bloquée par le sable. Pas de fenêtre à briser pour s'enfuir, cette fois. Pas de moyen de se réveiller non plus. Son pessimisme naturel -ou son réalisme ?- aurait dû la figer dans l'attente de la mort. Pourquoi courir quand on sait pertinament que c'est inutile ? Mais elle ne pouvait empêcher ses jambes de se mouvoir, désespérément.
Dans son dos, elle pouvait entendre son poursuivant qui se rapprochait alors que son coeur était à deux doigts de jaillir de sa poitrine. Elle pouvait même le voir dans le reflet que lui offrait face à elle le métal poli qui couvrait une partie du mur... son reflet ? Sans même réfléchir, elle tendit sa main en avant dans un effort désespéré et hurla :
- Mary ! Aide-moi !
Ce n'était pas l'invocation habituelle, ça n'aurait pas dû marcher et pourtant la main de la revenante s'extirpa de la surface réfléchissante pour attraper son poignet et l'attirer vers elle. Là où Dakota s'apprêtait à heurter du métal froid, elle y pénétra. C'était... étrange. Un peu désagréable aussi. Mais c'était une bénédiction quand on réalisait qu'elle seule avait pu rejoindre l'autre côté du miroir. La touareg, lui, heurta de plein fouet le mur avant d'être repoussé au sol, une main sur son crâne douloureux.
Autour de la phobophobe, tout était sombre. La seule lumière venait de cette sorte de fenêtre qu'elle avait sur le monde. Elle put observer telle une spectatrice devant sa télévision l'homme se redresser pour se tourner vers Eve et Simon, faute de pouvoir atteindre sa cible première. C'était logique, après tout : eux aussi étaient des voyageurs, ils n'avaient pas plus leur place ici qu'elle-même. Profitant de sa temporaire immunité pour recouvrir un peu son sang froid, elle colla son front au métal pour ne rater aucun détail de ce qui allait suivre.
Si jamais ils mourraient, il lui faudrait observer pour mieux préparer sa contre-attaque. Elle ne pourrait se terrer éternellement dans ce terne reflet de Dreamland. | |
| | | Eve M. Todrovitch
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Jeu 16 Juil - 10:58 | |
| Eve écoutait vaguement l’inconnu qui tentait d’extirper de Dakota des informations touristiques. Bien aise de ne pas avoir été choisie, et n’ayant rien à faire, elle pianotait machinalement sur sa caisse. Un vieil air de musique lui trottait dans la tête, mais elle avait oublié d’où elle le connaissait. Une chanson de son enfance sans doute ; elle n’avait jamais été mélomane, encore moins après le meurtre de sa mère. Elle avait envie de cloper. Est-ce que son contrat prévoyait de telles pauses ? Aucune idée, elle avait oublié de demander.
La russo-américaine ne faisait pas attention à ce qui se passait derrière elle. En fait, elle ne redescendit de sa bulle que lorsque le siège de sa collègue heurta le sien, déclencha une étincelle de douleur dans son dos blessé. Elle ne put complètement retenir un cri et s’effondra sur sa caisse, son corps crispé, cherchant à contenir la bête brûlante qui dévorait ses chairs. Quand elle rouvrit les yeux, le sable s’était glissé jusqu’à ses pieds et un scorpion cherchait déjà à escalader sa ranger.
Piquée par l’adrénaline, la détenue se redressa d’un bond et enjamba sa caisse pour se mettre hors d’atteinte du désert meurtrier qui envahissait son ilot. Elle vit alors l’œil de sable qui s’était formé pour se figer sur la phobophobe, entendit ses déclaration menaçantes, et assista à la matérialisation du sbire-touareg. Ce serait l’œuvre de la fameuse entité divine et immortelle ? C’était l’appréhension, plus que la peur, qui noua les entrailles d’Eve. En elle, le monstre se redressa, hérissa ses poils, prêt à donner chèrement sa peau si tel était le plan.
Sa batte lui manquait, bien à sa place dans son casier. Elle se serait fait un plaisir de massacrer ce type à grands coups sur sa tête encapuchonnée, mais c’était impossible. Voyant qu’il s’intéressait principalement à Dakota, la russo-américaine fut tentée de s’éclipser pour alors trouver ses biens, mais c’était trop risqué. L’adolescente pourrait serait découpée d’ici-là et, autant elle ne l’aimait pas vraiment, autant elle ne souhait plus sa mort.
- Hey, pourquoi tu chercherais pas plutôt à t’en prendre à quelqu’un de ta trempe ?
Sa tentative d’attirer l’attention du sbire n’avait eu aucun effet. Voilà qu’il chargeait la benjamine, et elle était beaucoup trop loin pour s’interposer. Alors, contre toute attente, la proie numéro 1 passa à travers la surface métallique qui recouvrait un mur… tandis que le touareg s’y heurta de plein fouet. Bien. Bien. Au moins, les enfants étaient hors de danger, les choses allaient désormais devenir plus « intéressantes ». Un sourire dément de carnassier s’étira sur le visage blafard d’Eve. Elle fixait l’ennemi de ses yeux glacés, le défiant sans aucune peur.
- Viens, aller…, siffla-t-elle entre ses dents.
Est-ce qu’elle s’attendait à ce que Simon intervienne ? Pas vraiment. Il y a bien longtemps qu’elle ne croyait plus aux princes charmants et il ressemblait à tout, sauf à un mec de type altruiste. La taularde fût surprise par la vivacité du touareg qui lui fonça brusquement dessus. Elle évita deux coups d’épées qui fendirent l’air dans un sifflement métallique – l’un d’eux trancha même en deux un fragile présentoir de bonbons –, mais reçut un coup de coude dans le nez qui la fit reculer de plusieurs pas. Rien de cassé mais elle était sonnée, elle saignait copieusement, et son corps convalescent était trop épuisé pour se battre correctement. Même si elle l’avait vu venir, Eve fût incapable d’esquiver le pied qui la heurta durement en pleine poitrine pour la jeter contre un mur.
Comme une bombe à retardement, la douleur de son dos explosa, vrillant tous ses autres sens. Elle sentait le sang. Goûtait son arôme ferreux. Le sentait couler sur son visage. Sa vision était masquée d’un voile rouge qui l’empêchait de distinguer clairement ce qui se passait. Est-ce qu’elle allait mourir comme ça ? C’était une question qu’elle se posait beaucoup ces derniers temps. « Un coin tranquille » hein ? On avait jamais autant attenté à sa vie que depuis que Miss Paper l’avait expédiée se « ressourcer »… Tombstone ou ici, quelle différence ? Deux villages arriérés engoncés dans la poussière et la morosité. On cherchait à la tuer, c’était évident. La résistance tirait les ficelles. Traîtresse.
Le touareg se dressait devant elle. Impérial. Bourreau. Encore une fois, un sourire dément étira les lèvres blanches de la paranoïaque. Ses dents étaient couvertes d’un d'une teinte rouge qui lui donnait l’air plus folle encore. Au sol, quelques filets de sable semblaient s’étirer dans sa direction, comme s’ils s’apprêtaient déjà à ensevelir son cadavre. Eve dressa alors son majeur, un éclat de défi dans ses yeux d’ordinaire inexpressifs. Elle n’avait pas peur. Il lui restait quelqu’un à appeler, si seulement ça marchait encore une fois…
Au moment où le cimeterre allait s’abattre sur elle, le Joker – alias le papa de Melvin – était apparu dans le dos du touareg et l’avait violemment poignardé plusieurs fois, tout en le retenant la tête en arrière. Il ne saigna pas, mais redevint un tas de sable avant même de s’être effondré.
- Tiens, tiens, … encore toi !
Dernière édition par Eve M. Todrovitch le Jeu 16 Juil - 11:37, édité 1 fois | |
| | | Le Marchand de sable
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Jeu 16 Juil - 10:58 | |
| Le membre ' Eve M. Todrovitch' a effectué l'action suivante : Lancer de dés'Halloween' : | |
| | | Simon Fox
Maladie mentale : Sociopathe
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Lun 20 Juil - 16:57 | |
| La jeune fille, aussi banale lui avait-elle parut, se montra froide et tranchante comme une lame de rasoir. Il ne l'avait pas vraiment détaillée, ne s’intéressant pas à elle le moins du monde, mais après une réplique pareil, il daigna lever les yeux de ses petites affaires. Plongeant son regard de glace dans celui de la caissière, il essaya de déterminer le genre de personne qu'elle était. Tout en lui tendant les Rubz nécessaires, il l'observa de pieds en cap. Mignonne, pas très épaisse ni même très grande, il ne put s’empêcher de remarquer ses ongles, ou plutôt leur absence, lorsqu'elle lui prit la monnaie des mains. Anxieuse ? Pourquoi donc ? Elle avait un regard aussi bleu et froid que le sien. Peut-être pas autant cela dit mais cela s'en approchait bien.
A peine avait-elle rangé les Rubz que la panique transforma ses traits. Intrigué, Simon voulu savoir de quoi elle pouvait avoir aussi peur et qui émanait de sous sa caisse. Cela dit il n'eut pas besoin de beaucoup s'avancer car déjà, un serpent couleur de sable se faufilait sur le tapis roulant. Du sable et des bêtes du désert se précipitaient sur les genoux de la caissière dont le visage reflétait, en cet instant, l'image même de la terreur. Sans perdre son sang froid, Simon s'empara de son sandwich et de sa petite bouteille avant de reculer lentement d'un pas histoire de se retrouver hors de portée des bestioles, son dos venant buter contre une rambarde de métal. La jeune fille poussa alors un cri qu'on aurait put comparer aux crissements d'ongles sur un tableau noir pour venir ensuite écraser sa collègue dans son dos. Simon ne put réprimer un petit rire devant ce spectacle pour le moins divertissant. C'était étrange bien sur, de voir ainsi du sable et des animaux sortir de sous un comptoir. Mais après tout, il était à Dreamland. Si cela le surprenait un peu, il commençait presque à s'y habituer. Après tout, il avait atterrit à Gloutoniskaïa, la ville de la magie. Alors même si cet endroit n'était pas aussi féerique que le premier qu'il ai vu, y trouver de la magie ne devait pas être étonnant.
Lorsque la voix retentit, provenant de nul part en particulier et de partout à la fois, et qu'un homme du désert se matérialisa à partir du sable, il ne trouva plus cela amusant du tout. La jeune femme, Dakota d'après son badge, parvint à s'extirper de l’îlot et se rua vers la sortie. Simon se dit alors qu'il devrait en faire autant. Mais la porte semblait condamnée. La jeune fille s'en aperçut, trop tard sembla t-il, et ce qu'elle fit alors ne manqua pas de surprendre une fois encore le sociopathe. Sortie du mur réfléchissant, une main agrippa celle de Dakota et l’entraîna à l'intérieur du mur. Rien que ça ! Sauvée, la gamine n'avait plus rien à craindre de son poursuivant. Ce qui n'était pas le cas des deux seules personnes encore présentes dans la pièce. A savoir lui-même et l'autre caissière.
Reculant prudemment, Simon retourna dans le magasin plutôt que de tenter une sortie suicidaire. S'il ne se faisait pas trop remarquer, il n’intéresserait peut-être pas le touareg. D'ailleurs, l’autre caissière semblait prête à en découdre. Grand bien lui fasse ! A moitié dissimulé derrière un rayon garni de pots de cornichons, il observa la scène. Le touareg sembla bien vite prendre l'avantage. Même si la femme semblait lui donner un peu de fil à retordre.
Alors qu'il se demandait comment sortir d'ici, et arrivant à la conclusion qu'il ne pouvait tout simplement pas, le touareg, lui, semblait être sur le point d'achever sa victime. Il lui tournait le dos. Simon aurait put arriver sans un bruit et lui enfoncer un objet pointu entre les cervicales ou entre les omoplates. Mais cet homme s'était matérialisé à partir de sable. Il était possible que cela ne lui fasse rien. Et alors sa colère et sa soif de sang se retournerait contre lui ! Mauvaise idée. Et puis il ne devait rien du tout à cette femme. D'un autre coté, lorsque l'homme des sables en aurait fini avec elle, ce serait Simon sa prochaine cible … Cruel dilemme...
Finalement, il se décida à agir. Mais trop tard. Un drôle de type apparut de nul part … pour changer... et fit son affaire au touareg qui retourna à la poussière. Ou plutôt au sable. Alors qu'il regarda d'un peu plus près ce nouvel énergumène il ne put s’empêcher de remarquer sa ressemblance frappante avec un personnage de fiction tiré du monde réel. Le joker. Décidément, ce monde était ahurissant. Bon, au moins, ils étaient hors de danger à présent. Sans bouger d'un pouce, debout entre un bout de rayon et les deux caisses, il entama son sandwich. Mâchant lentement, il regarda la téméraire se relever. Elle n'avait vraiment pas l'air commode. Et encore une fois, il se retrouvait face à des personnes dotées de pouvoirs. Les deux filles étaient forcement des voyageuses. Lui qui était un novice en matière de magie et de dons, il se dit qu'il pourrait être judicieux de rester dans le giron de ces deux-là. Se faire bien voir d'elles et obtenir leur protection, voilà qui pourrait être salvateur pour l'avenir. Preuve en est que s'il s'était retrouvé seul face au touareg, il y aurait laissé des plumes. Voire même la vie ?
Tout en dégustant son repas, il prit une décision qu'il n'avait encore jamais eut à prendre jusqu'à aujourd'hui. Alors que dans le monde réel il était comme un poisson dans l'eau, ici, il était aussi vulnérable qu'un poisson sur la terre ferme. Il devait apprendre à marcher et pour ça il avait besoin d'un professeur et d'un protecteur. Ces deux filles, qu'elles le veuillent ou non seraient tout cela. Il ne devait pas leur faire de mal. Pire encore, il devrait se faire accepter dans leur groupe, et peut-être même se plier parfois à leur volonté s'il voulait s'en sortir. C'était là le prix de sa survie.
Il avait commit l'erreur avec Anastasia et Selene de se croire capable de rester lui-même. De croire qu'il pouvait se permettre ce qu'il se permettait dans le monde réel. Mais dans un jeu il y a toujours des règles. Et tant qu'il ne connaîtrait pas toutes celles de Dreamland, il risquait de se faire avoir comme un gosse. Il ne referait pas deux fois la même erreur. | |
| | | Dakota Earnshow
Maladie mentale : Phobophobie
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Feuille de personnage Sac à dos: Pouvoirs : Bourse: 2648 rubz
| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Lun 20 Juil - 21:43 | |
| Entre la harpie et le prisonnier, le cœur du touareg semblait balancer. Bien à l'abri dans son reflet, Dakota disséquait chaque geste du sbire du marchand de sable dans l'espoir de discerner une ouverture dans laquelle s'engouffrer, comme ça avait été le cas dans le village du père noël. Ces hommes, bien que forts, avaient les mêmes faiblesses que les humains. Sydney et elle avait tué le dernier, elle pouvait donc en théorie venir à bout de celui-là mais comment ? C'était ça, la vraie question. Impossible de savoir s'il était sensible à la peur et aux cauchemars. Annuler ses pouvoirs ne servirait à rien, n'étant pas voyageur. Et Mary... elle venait de l'aider, s'attendre à un nouveau coup de main de sa part représentait un trop gros risque. Alors quoi ? Réutiliser l'un des pouvoirs loufoques qu'elle avait copié ? Peut-être que ceux de Janice pourraient s'avérer utiles...
La phobophobe réfléchissait à présent avec un calme olympien alors qu'Eve se faisait massacrer. Mais ni la vue du nez écrasé, ni celle de la tâche sombre s'étalant sur le dos de la veste de caissière, ne pouvait la troubler. Perdre la stalkeuse ne lui faisait ni chaud ni froid. A vrai dire, ce serait même un soulagement. Moins il y avait de candidats potentiels au coup de poignard dans le dos mieux elle se porterait. Et pour une fois cette femme se montrait utile en lui offrant le temps nécessaire à l'élaboration d'une stratégie viable.
Tout dans son esprit était clair à présent. Ce « Pow » devrait suffire amplement. Elle perdrait son salaire, et peut-être même son droit de résider en ville mais c'était un prix à payer plus que raisonnable pour rester en vie. Alors que la blondinette s'apprêtait à quitter l'autre côté du miroir, la silhouette de l'homme qui les avait aidé dans le train sorti de nulle part pour les aider, une fois encore. La main figée en avant, Dakota attendit la conclusion du combat avec intérêt et se mit à se mouvoir de nouveau uniquement lorsque le touareg revint à son état sablonneux.
- Ce n'est pas plus mal, j'étais à deux doigts de détruire le magasin.
Et ceux qui s'y trouvaient aussi, léger détail qu'elle se retint de formuler. La remarque exposée d'une voix monocorde brisa le silence dans lequel était plongé le magasin tandis que la gamine sortait de sa cachette. A part quelques serpents, plus rien ne bougeait dans les environs. Pas d’œil, pas de voix, pas de combattant... mais ce n'était pas pour autant qu'il fallait relâcher son attention. Elle ne se sentirait pas bien tant qu'elle ne se serait pas débarrassée de tout ce sable. Rien que le regarder lui retournait l'estomac.
Alors qu'elle pivotait vers les autres voyageurs pour évaluer les dégâts, leur employeur parvint à forcer la porte de son bureau coincé par le sable et déboula, l'air effaré. Successivement, il regarda les personnes présentes dans l'espoir que l'un d'eux lui explique ce qui venait de se passer. Il finit d'ailleurs par exprimer sa question avec un vocabulaire assez fleuri dont Dakota ne se formalisa pas. L'important n'était pas la question. Ce qui comptait, c'était de fournir la réponse adéquate.
- Qu'est-ce que c'est que ce foutoir bordel ?! Quel est le con responsable de ce chantier ??
- Je ne sais pas, monsieur. Du sable s'est mis à jaillir tout d'un coup avec son lot de serpents et d'insectes, puis un homme enrubanné a sauté sur Eve.
Le regard du directeur glissa sur la concernée dont la vue lui tira une grimace, de dégoût et de compassion mêlée. La blondinette ne lui laissa pas le temps de faire des conjectures sur le responsable, reprenant aussitôt :
- Vous croyez que c'est l'une de ces perturbations dont on parle à la télé ? Nous aurions pu y passer... souffla Dakota dans une tentative maladroite pour l'attendrir.
L'homme acquiesça, à moitié soulagé d'avoir sous la main une théorie qui tenait la route. Une perturbation ? Il y en avait des centaines, des milliers même depuis quelques temps. Pourquoi San Factody n'aurait pas eu les siennes, après tout ? Ce n'était vraiment pas une chance que ça arrive dans son magasin, mais ça se tenait. L'air sombre il désigna d'un large geste le magasin ensablé avant de pointer la paranoïaque du doigt.
- Earnshow ? Quand vous vous serez remise de vos émotions, vous irez piocher dans la boite à pharmacie. Todrovitch a besoin de soins. Ensuite... nettoyez-moi tout ça. Le magasin restera fermé jusqu'à demain... pas vraiment le choix. Ce sera déjà un miracle si on arrive à bazarder tout ce sable d'ici ce soir...Il leva alors les yeux vers Simon, semblant seulement le remarquer. Vous pourriez filer un coup de main ? Je vous paierai au même taux horaire que les demoiselles. Ça casse pas trois pattes à un canard mais si vous êtes de passage...
Il laissa sa phrase en suspens. Quand on voyageait d'un bout à l'autre de Dreamland, qu'on soit de ce monde ou de l'autre, on ne crachait jamais sur quelques rubz à empocher pour continuer sa route. Et il se fichait bien d'où venait cet homme tant qu'il était capable de manier une pelle et un balai.
De son côté, Dak' désapprouvait complètement la proposition mais elle n'avait aucune raison officielle de s'interposer. Si elle signalait la nature carcérale de l'inconnu, il lui faudrait aussi se présenter comme voyageuse. Et là, il ne faudrait pas longtemps à son patron pour lui mettre sur le dos la responsabilité de l’événement. Criminel ou pas, il lui faudrait travailler avec l'homme au regard de serpent... s'il acceptait, bien sûr. Et hélas, ce fut le cas.
Une fois qu'il leur eut indiqué l'emplacement du matériel de nettoyage et de la boite à pharmacie, le directeur retourna dans son bureau, laissant le trio à eux-même. Dès qu'elle fut sure de ne pas être entendue par la hiérarchie, le regard glacé de la surdouée scruta ses comparses forcés alors qu'elle décrétait, d'un ton sans appel :
- On se tient à cette version. Et Eve, fais-moi plaisir... la prochaine fois, quand je te dis qu'une chose est mortellement dangereuse, ne me relance pas. Tu ne t'en tireras peut-être pas aussi bien la prochaine fois. | |
| | | Eve M. Todrovitch
Maladie mentale : Troubles paranoïaques
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| Sujet: Re: Mieux vaut être mal accompagné que seul Mar 21 Juil - 18:13 | |
| Impossible de déchiffrer ce que signifiait l’expression du psychopathe avant qu’il ne disparaisse en un battement de cil et c’était bien le cadet de ses soucis. La russo-américaine avait eu de la chance que son nez ne soit pas cassé, mais il n’en était pas moins douloureux et ce n’était rien comparé à la chair à vif de son dos. Quand la phobophobe sortit de sa cachette avec un aplomb risible quand on avait vu de quelle façon elle s’était cachée la queue entre les jambes, Eve n’essayait même plus d’arrêter le flot d’hémoglobine qui ruisselait sur son visage blafard et tâchait son uniforme. Immobile, comme si son corps risquait de se disloquer au moindre geste, elle regardait sans les voir les trainées de sables qui s’étaient assoupies. Déjà, son esprit malade sombrait dans un dédale de paranoïa.
L’inconnu. C’était lui le chainon manquant de l’histoire, le vrai espion. Etait-ce un hasard que cette entité se manifeste à la caisse de Dakota ? Juste quand il s’y trouve ? N’avait-il pas fuit le combat pour l’observer de loin ? Difficile de savoir qui était la cible principale en fin de compte, mais le résultat était le même : aucune des deux filles n’était morte. Mauvais plan. Il devait ruminer son échec. Ça devenait impératif de se débarrasser de lui avant qu’il ne fomente une seconde tentative d’assassinat.
Eve avait mal au crâne. Ces voix, que disaient-elles ? Elles résonnaient de façon inintelligible, bruyantes mais sans intérêt. Sa chemise était imbibée de sang, elle le sentait. Mourir. Non. La jeune femme n’avait même pas conscience que sa faiblesse la transportait au bord du coma. Elle dut faire un effort surhumain pour se raccrocher à la réalité au moment où le chef du magasin distribuait ses directives. Lentement, Eve bougea la tête, comme une poupée de chiffon qui s’anime. Elle voulut ouvrir les lèvres, pour dire que c’était une très mauvaise idée d’embaucher le nouveau venu, mais elle ne put émettre aucun son. Seuls ses yeux restaient invaincus, glacés, impénétrables.
Quand Dakota se tourna vers elle pour lui reprocher l’apparition du Marchand de sable, la paranoïaque éclata d’un rire sans joie. Oubliée la douleur, ne restait que cette hilarité démente qui rendit la parole à la russo-américaine.
- Bien sûr, siffla-t-elle, parce que ça va être de ma faute en plus…
Son regard sans couleur se tourna vers l’aîné du trio, toujours occupé avec son sandwich. Il ne perdait rien pour attendre, ça il pouvait en être certain. Avec des gestes lents, elle se redressa sur ses jambes flageolantes et se dirigea vers l’endroit où se trouvait le nécessaire à pharmacie. Le flot de ses narines avait cessé désormais, mais son nez restait enflé et arborait une couleur violacée. Le matériel de soin entre les mains, Eve se trouva face à un dilemme : hors de question d’offrir son dos au criminel responsable de ce bazar, il aurait trop vite fait de la poignarder ou de profiter de ses blessures. Néanmoins, elle ressentait une contrariété glacée à l’égard de la benjamine. Elle savait très bien où elle pouvait se les mettre ses mises en garde infantilisantes, surtout quand elles étaient aussi mal venues.
Pour s’offrir le temps de la réflexion, la russo-américaine s’occupa seule de son visage. Il fallut principalement le débarbouiller et obstruer avec un coton l’une de ses narines qui recommençait à laisser filer un peu de sang. Quand elle eut recouvert une face à peu près humaine, sa blancheur inquiétante mise à part, la détenue se dirigea vers la phophobe et, sans un sourire, reprit les mots de leur employeur :
- Tu es remise de tes émotions ? Je vais avoir besoin d’aide… « s’il te plait ».
Ces derniers mots lui avaient presque littéralement arraché la mâchoire. Comme un flash, elle se souvint alors qu’elles n’étaient plus deux, puisqu’un troisième larron était désormais coincé dans l’épicerie sinistre et ensablée. Les orbes marron sans lumière de Eve se tournèrent vers lui pour le détailler encore une fois, comme si c’était la première fois qu’elle le voyait. Cherchant à le mettre sur une piste qui prouverait sa culpabilité, elle lança laconiquement :
- Vraiment pas de chance hein ? Se retrouver mêler à ce genre de chose quand on ne veut qu’un sandwich et quelques renseignements…
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