Les voyageurs à l'école des sorciers (2)

L’endroit était grandiose, une cathédrale dédiée à la culture, des ouvrages anciens et passionnants rangés soigneusement sur des étagères qui semblaient atteindre les cieux… le paradis des rats de bibliothèque comme Dakota. Cette simple vision –même en 2D- suffisait à lui faire oublier les transformations progressives de Selene, les machinations du monstre qui avait par le passé répondu au nom de Sydney, la présence dans leur dos d’un homme qui ressemblait étrangement à Alexander. Tout était balayé par cette masse de savoir, étouffante mais merveilleuse qui lui faisait face. Par où commencer ?

La surdouée tendait le bras vers un livre au hasard alors que James se mettait à beugler comme un veau qu’il avait fait un pont. Le silence qui régnait jusqu’alors dans la pièce s’empli de murmures désapprobateurs alors que le regard courroucé de Dak’ se braquait sur son ami. Elle tapota l’affiche placardée près de l’entrée sur laquelle s’étalait en lettres gothiques « Le silence est d’or, veuillez le préserver pour le confort de tous ». Tout le monde savait qu’on devait se taire dans une bibliothèque, c’était du bon sens. Quant à y faire de la gym la question ne se posait même pas.

- Veux-tu bien te taire bon sang ? souffla-t-elle avant de se diriger vers le bureau d’accueil.

Derrière le meuble en bois massif se tenait une petit vieille, lunettes vissées sur le nez. Son visage en lame de couteau n’était pas le moins du monde engageant mais cela n’empêcha pas la phobophobe de s’approcher pour chercher auprès d’elle l’aide nécessaire. Elle était payée pour ça non ? Alors aucune raison qu’elle l’envoie balader, et encore moins d’avoir peur d’en avoir peur.

- Excusez-moi, je suis à la recherche de documentation sur le marchand de sable. Vous pourriez m’indiquer dans quel rayonnage les trouver ?

L’employée la jaugea un instant en silence de la même manière que s’il s’était agi d’un insecte répugnant. Le mépris céda bientôt place à la curiosité puis à la conscience professionnelle, et c’est seulement alors qu’elle desserra les lèvres pour daigner répondre.

- Section théologie et mythes. Prenez l’allée centrale, tournez à droite à la 9ème intersection, à gauche à la première et à droite à la 18ème. L’endroit est assez grand, ne vous perdez pas. Certains y errent des jours parfois…

Elle replongea le nez dans son registre avant de faire comprendre à Dakota d’un geste sec de la main de prendre le large. L’adolescente n’avait pas l’habitude de ce genre de traitement, c’était plutôt elle qui les infligeait d’ailleurs, mais elle ravala sa fierté pour emprunter le chemin indiqué. Ses pas résonnaient sur le carrelage noir et blanc alors qu’elle s’enfonçait dans les rayonnages, véritable labyrinthe qui aurait fait pâlir tout claustrophobe qui se respectait. Les rangées étroites de livres donnaient l’impression de vouloir se refermer sur vous et vous changer en vulgaire marque-page. Et certain bougeaient, Dakota l’aurait juré.

C’est avec méfiance qu’elle rejoignit donc l’endroit indiqué et fut heureuse de constater que malgré son handicap elle ne s’était pas perdue. Elle avait dû tâtonner, revenir sur ses pas, rester aux aguets… mais elle y était arrivée. Elle laissa courir son doigt sur les épais ouvrages, examinant les titres avec un intérêt non dissimulés. Beaucoup était grotesques comme « la secte du rutabaga » ou « genèse cabrélienne d’un monde en perdition », mais d’autres semblaient plus sérieux.

La phobophobe finit par jeter son dévolu sur un livre relié cuir dont le titre s’étalait en lettres d’or sur la première de couverture : le Marchand de sable, mythe ou réalité ? La gravure d’un homme avait été réalisée juste en dessous, celle d’un être mal rasé qui avait un petit air de ressemblance avec le célèbre rodeur de Tolkien. Alors c’était ça, leur ennemi ? Juste un mec qui ne connaissait ni le principe de la douche, ni celui du coiffeur ? Mais il paraissait que l’habit ne faisait pas le moine, elle ouvrit donc le livre avec précaution pour ne pas le réduire en charpie et se lança dans une lecture attentive sans même chercher à s’asseoir.

Et cette lecture s’avérait globalement très instructive…

Selene vivait relativement mal sa transformation. Tout compte fait, celui de vampire était moins handicapant… certes, elle devait rester à l’ombre, sous peine d’être carbonisée, mais elle n’avait pas été déformée et bossue par une magie non souhaitée. D’un pas maladroit, elle entrait dans la bibliothèque de Gloutoniskaïa alors que Sydney venait de manifester son intention de rester à l’extérieur. En temps normal, elle aurait pu essayer de le convaincre de les suivre, mais là… non, il était vraiment trop repoussant.

Lorsque James s’exclama qu’il avait fait un pont, l’adolescente baissa instinctivement les yeux. Certes, ce n’était pas elle qui venait d’outrageusement se donner à un exercice de gymnastique dans un lieu de silence, mais elle le connaissait, et donc se sentait involontairement concernée par ces « schhhttt » réprobateurs. Les joues roses, son regard se passionnant pour ses chaussures à talons, la galloise sentit mais ne vit pas passer l’homme qui n’était autre qu’Alexander. De toutes les façons, elle ne se souvenait de lui que très vaguement. Aperçu sur le Slavedog Millionnaire et dans le dortoir de Parkinson… c’était tout, autant qu’elle pouvait s’en souvenir.

La toquée attendit donc que Dakota se soit renseignée, puis la suivit sans mort dire jusqu’à destination. En vérité, elle désirait ne pas se faire remarquer pour éviter de recevoir une remarque désobligeante sur son apparence de vieille mauvaise fée. Combien de temps avait duré son costume la dernière fois d’ailleurs ? Elle avait oublié. Le fil de ses longues pensées se perdit dans le labyrinthe qu’il fallut parcourir pour arriver à la section « Théologie et Mythes ». Là, l’excitation emporta totalement la férue de mysticisme qu’était la rouquine. Les grandes étagères couvertes d’ouvrages épais étaient parfaitement caractéristiques du poids de son ignorance sur Dreamland. Ce n’était pas qu’un décalque des songes de leur monde, il avait également ses légendes, ses croyances, ses sectes, son démiurge, sa genèse…

Le règne des Trois-Sorcières, Le Bilbonk : une créature oubliée, Les 1001 sabbats des Fées Disparues, Les sirènes du Lac d'Or… tous ces titres évoquaient magie, mystères, études compliqués de l’ésotérisme gloutoniskaien ; autant d’éléments qui piquaient la curiosité de Selene. Néanmoins, il fallu bien se consacrer à ce pour quoi elle avait proposé de venir, alors lorsque sa cadette dégota un premier ouvrage sur le Marchand de Sable, elle se plaça à ses cotés pour lire par-dessus son épaule.

Visiblement, on ne savait pas trop d’où venait le Marchand de sable. Il serait en quelque sorte, la conscience même du monde des rêves, personnifiée en un être surpuissant qui résiderait quelque part dans la mer de sable. La gravure de la couverture revint alors en tête à la jeune fille au fur et à mesure que sa lecture avançait : était-ce vraiment lui ? Un homme d’apparence tout à fait banale, du style mal rasée ? D’ailleurs, comment pouvait-elle avoir été réalisée si le dit Marchand était en « sommeil » depuis assez longtemps pour ne devenir qu’une légende ? Le livre était-il si vieux ? S’agissait-il d’une imagerie a priori ? Comme les catholiques qui ont multiplié les représentations du Christ alors qu’ils ne peuvent en avoir aucune idée ?!

Chassée par la phobophobe, Selene sélectionna un autre livre d'un air boudeur. Celui-ci traitait d’autres personnages ou créatures associées au Marchand de Sable. A en croire l’ouvrage, il n’était pas seul et n’opérait pas non plus de son propre chef – du moins, très rarement. Un de ses fidèles en particulier donna la chair de poule à la rouquine : un dénommé Mad Hatter. Le paragraphe s’accompagnait d’une illustration vague, montrant un homme assez jeune dont le visage était enveloppé dans une crinière noire, aussi noir que son espèce d’élégant manteau très XIXè. Son œil gauche n’était pas visible. On rapportait que cet individu était le pire ennemi des voyageurs, leur anti-équation impitoyable. En effet, l’orbite oculaire masquée de Mad Hatter serait capable de déployer un pouvoir qui éradiquait dans l’instant tout ce qui, autour de lui, provenait du monde réel.

La vision de Selene se brouilla tant la peur venait de sournoisement lui tomber dessus. Et si c’était vrai ? L’histoire du Marchand de Sable se poursuivait, détaillant ses sbires ou adeptes, et aucun n’était plus rassurant qu’un autre. Comme si dans un univers imaginaire, toute la sphère de cet être était hors de toute proportion, au-delà de tout. Si c’était vrai, alors ils s’opposaient à une force incommensurable, plus grande encore que ce qu’il était possible d’imaginer.

Ses jambes tremblaient, elle avait besoin de s’assoir, mais elle ne réussit qu’à faire quelques pas en arrière pour poser ses fesses à même le sol, dos contre une étagère chargée d’ouvrages sur le culte des Ma Kioso Mon. D’ailleurs, elle sentit quelque chose dans sa bouche, comme si ses dents se déplaçaient sur ses gencives et en effet, voilà que sous l’effet de son costume, sa dentition était devenue digne d’une mauvaise fée qui n’avait pas connu les appareils dentaires.

- Qu’est-ce qu’on va faire… ? souffla-t-elle de sa voix transformée.

Elle voulait bien entendu dire « comment faire pour récupérer nos ombres et nous en aller avant que le Marchand de Sable ne nous trouve ? »… le maire de Gloutoniskaïa les avait mis en garde : cette fois, il ne se contenterait pas de les renvoyer chez eux, il les tuerait.

Le chemin les menant à la Bibliothèque fut une réelle résurrection de la joie et de la bonne humeur enfantine de Jake. En effet, tout le long des rues traversées, Jake voyait des petits d'amuser à lancer des sortilèges et à préparer des farces. Les uns créaient des motifs dans les airs qui bougeaient, d'autres s'amusaient à courir après un papillon magique, d'autres encore faisaient des duels de sorts. Ce qui frappa le plus Jake fut en effet les jeunes adultes s'amuser à donner vie à de magnifique créations telles que des Dragons de glace, et même créer des ailes qui apparaissaient dans votre dos et vous faisaient profiter d'un billet pour l'altitude gratuit pour quelques minutes.

Il relâcha tellement son attention qu'il ralentit un peu la cadence et manqua de se faire atteindre par un sortilège en pleine figure qui atteint finalement un convoi de diverses marchandises. L'étrange moyen de transport flottant bascula juste un peu avant de reprendre sa route. C'est alors que Jake remarqua que le sortilège avait fait tomber une ceinture en cuir noir à peine usée par le temps. Il voulut rattraper le convoi pour signaler cette perte mas il fuyait déjà à l'horizon.

Spoiler:

Ayant déjà une ceinture cloutée sur son pantalon de cuir (qu'il portait depuis des lustres), il la mit en bandoulière (pour parfaire son attirance) et rattrapa le reste de la bande qui s'était bien avancée. Le problème était qu'il avait oublié son costume assez ridicule et donc rajusta sa ceinture à sa taille comme le ferait n'importe qui.

Une fois arrivés sur le seuil de la magnifique bibliothèque de Gloutoniskaïa (Глyтoниская), Jake resta bouche bée devant ce qui serait un prodige architectural dans un monde normal et manqua de peu de se faire renverser par James qui se mit à faire un pont et à se féliciter de son accomplissement. Jake le gratifia d'un Bravo! tout en se cognant contre un colosse de plus de deux mètres de haut qui le replaça gentiment dans les broussailles d'à côté. Il expérimenta alors en prenant comme modèle James de se tenir la jambe par derrière comme au patinage artistique, ce qu'il réussit a faire, et il ne put s'empêcher de lâcher un Waou! de surprise.

Une fois parvenu à l'accueil après de nombreuse tentatives infructueuses qui mettaient Jake bien en mal, Il s'adressa sur un ton assez neutre à la réceptionniste/Bibliothécaire voyant qu'il avait perdu Selene de vue.

-Bonjour Madame, il serait possible d'avoir un livre sur l'histoire de Dreamland s'il vous plait?

-Vous avez de la chance, Jeune homme, c'est juste en face. Le gros livre d'à peu près 10 000 pages à votre droite vous ravira. Faites attention quand vous le manipulerez, il est assez fragile! Si vous attendez quelqu'un par la suite, vous feriez mieux de vous installer près de la porte, on ne sait jamais.

-Merci Madame... fit Jake hésitant, car la Bibliothécaire avait carrément lu dans ses pensées... S'il ne s'abusait ...

Il se dirigea donc vers l'ouvrage massif qui pesait plus que lourd, s'installa à une table près de l'entrée, comme le lui avait conseillé la mystérieuse "Dame de l'accueil" et commença une activité plus que passionnante à son goût, la lecture.

Durant le moment passé à lire, Jake ne se rendit plus compte que le temps passait et apprit énormément de choses sur le monde qui l'entourait, notamment les principes de bases, et s'intéressa à trois choses en particulier: les tours, la magie et les objets magiques. Il trouva notamment, en trouvant d'autres livres, que la ceinture égarée par le convoi lui servirait plus qu'il ne l'avait pensé, et se promit de poser des question à ses camarades.

*Mais d'ailleurs, ça fait combien de temps que je les ait pas vus? et ça fait combien de temps que je suis plongé dans cette lecture?*

Alexander faisait le tour des rayonnages, cherchant plusieurs thèmes bien précis. Et jusqu'à maintenant, il s'était toujours débrouillé dans une bibliothèque.

Il avait d'abord chercher à répondre à une question qui s'était posé à lui. En effet, pour qu'il soit revenu si soudainement ici, dans les circonstances-là, il pouvait y avoir une variante qui influençait sur l'événement: Le grand homme. Il s'était dit qu'il n'étais peut-être pas ce qu'il disait être. C'était le type le plus étrange de la troupe, et assurément le plus dangereux... Si on oubliait Jeremiah qui était pas très net non plus, d'une certaine manière...

Pour lui, il y avait possibilité que cet homme soit une créature de ce continent de fous. Si il pouvait avoir une réponse à ce niveau-là, c'était bien ici!

Il prit quelques livres sur la faune et la flore, et feuilleta rapidement en prenant soin de n'abimer aucune page. Mais rien ne semblait ressembler de près ou de loin à ce qui était arrivé. Et pourtant, il avait découvert plusieurs choses intéressantes.

Il reposa les livres à leur place. Du coin de l'œil, il vit que certains étaient toujours comme s'il se trouvait en bal costumé. Il se dit qu'il faudrait apprendre les bonnes manières à ces jeunes gens, puis continua ses recherches.

Dans les calepins de voyageurs et d'explorateurs, il en trouva rien non plus. Il feuilletait suffisamment vite pour passer à un autre livre.

Il ne lui restait qu'une solution en tête: L'histoire. Il partit dans le rayonnage correspondant. Plusieurs livres d'histoires, sur les villes, sur certains personnages importants... Mais pas sur le monde seul. Il ne comprenait pas. Il y avait comme un trou dans l'histoire.

Il partit à la rencontre de la réceptionniste de l'accueil. Il n'aimait pas trop parler dans ce genre d'endroit, mais s'il y était obligé...

- Bonjour, veuillez m'excusez mais ne manquerait-il pas un livre sur l'histoire?

La secrétaire le regarda, à travers ses lunettes, lui donnant un air presque effrayant.

- Le jeune homme qui est passé avant vous l'a demandé. Il doit être en train de le lire, la-bas.

Elle désigna alors le coin ou se trouvait un jeune homme blond, qui aurait sans doute pu plaire à bon nombre de femme.

Il s'approcha de sa table, et s'aperçut qu'il y avait plus d'un livre à côté du jeune homme. Dont le livre d'histoire qu'il recherchait.
Il chuchota donc à Jake ces mots:

- Veuillez m'excusez, mais j'aurais besoin de lire cette ouvrage. Puis-je en disposer quelques instants?

[HRP : Je vois que tu connais l'alphabet cyrillique, Jake ^^ Ca fait plaisir de voir que même ici on trouve des amateurs de la langue ! =3]
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Assis sur son banc, Sydney s'ennuyait ferme. Pas rassuré le moins du monde par son apparence qui risquait tôt ou tard de lui apporter des problèmes il épiait chaque faits et gestes, la moindre action suspecte s'enchaînait à une autre pour former une toile de conspiration géante. Aucun lien apparent n'existait entre ces événements, mais un œil avertit savait repérer les impairs, comme cet homme qui - mine de rien - s'était approché du paranoïaque pour finalement s'en détourner, préférant entrer dans la bibliothèque.

*Mais qu'est-ce qu'il veut, celui-là ? se demandait le pirate tout en suivant l'étrange individu des yeux. Une fois que ce dernier eut quitté son champ de vision, les scenarii s'articulèrent pour n'en former qu'un seul qui tenait en une seule et unique phrase : l'ennemi de mes ennemis n'est pas forcément mon ami. Il s'agissait peut-être d'un des sbires du marchand de sable envoyé pour les assassiner froidement. Même mal entouré, il se sentait plus en sécurité que tout seul ; hors de question de laisser ses amis se faire tuer et lui vivre comme s'il n'avait jamais rien su !
... Il avait dit "amis"..? Hm, excès d'empathie sûrement.

Le piratenstein se leva d'un bond et couru à l'intérieur de la bibliothèque avec l'espoir d'empêcher cette sinistre exécution. Pourvu qu'il ne soit pas trop tard !!
Il arriva dans le bâtiment à l'architecture impressionnante et s'arrêta un instant, stupéfait de la taille de celui-ci. Il avait l'air beaucoup plus grand vu de l'intérieur... Illusion d'optique ou magie opérante ? L'heure n'étant pas à ce genre de questions, il décida d'entrer dans le vif du sujet et à peine ouvrit-il la bouche et commença à mimer un signe avec ses mains qu'une secrétaire visiblement irritée lui répondit sèchement :
- La table là-bas. Le paranoïaque la regarda de travers avant de suivre du regard la direction indexée par la vieille femme.

A une table non loin de là, l'homme suspect discutait avec James - à moins que ça ne soit Jake. Une inspiration profonde précéda une série de pas allongés qui firent rapidement arriver le pirate au niveau du duo. Machin voulait le livre, hein ? Quelle excuse bidon !
- Et moi j'aurais besoin de savoir qui vous êtes. Vous croyez que je vous ai pas vu, dehors ? ne quittant pas sa cible des yeux, Syd s'adressa à Jake Fais attention, ce type est tout sauf normal. Je suspecte même qu'il soit là pour nous nuire. Plus que les autres, j'entends. Il plissait les yeux en signe de défi alors qu'il serrait toujours sa dague dans son poing, prêt à frapper en cas de nécessité.

Le jeune homme semblait un peu plus âgé que lui, mais lui et le pirate étaient de même taille, empêchant un rapport de supériorité à priori de s'installer. Cela rendait Syd extrêmement nerveux car il ignorait tout de cet homme, y compris sa puissance. Un détail pourtant le frappa : l'absence de main gauche chez le jeune homme.
Connaître son nom ne suffisait pas, il fallait aussi savoir ce qu'il venait faire ici. Lui demander était l'occasion parfaite de voir jusqu'à quel point il savait bien mentir.
- Plus important que le nom : que voulez-vous ? Ne faites pas l'innocent je sais que vous nous suiviez. Depuis quand ? Pourquoi ? Dans quel but ??

Chaque question faisait paraître le pirate de plus en plus méfiant et agressif dans la voix. Cependant il parlait suffisamment bas pour que personne d'autre que jake et son interlocuteur ne puisse entendre. Et puis on était dans une bibliothèque après tout. Plus important encore : crier ne ferait que rameuter les complices sur les lieux, se mettre les mages lecteurs à dos et se voir tuer froidement sans que personne n'aille s'en plaidre. Vraiment, quelle journée... Cela devenait un leitmotiv de se retrouver dans des situation détestables.

Rester debout n'était pas très discret non plus et cette idée entraîna un réflexe chez Sydney qui prit deux livres qui trainaient au hasard sur la table, en prit un et tendit l'autre au jeune homme amputé.
- Asseyez-vous, faites semblant de lire. Et n'oubliez pas que je vous ai à l'œil. Lui même s'exécuta et une fois qu'il eut plongé son nez dans l'ouvrage, il invita le tueur présumé à répondre à toutes les questions qu'il avait posées.

Tandis qu'il écoutait les réponses peu crédibles de son otage, il feuilletait son livre : "Equivalence et correspondance des sept tours". Il ne comprenait pas trop ce qu'il y lisait mais cet ouvrage semblait faire un lien entre plusieurs édifices de Dreamland et leurs équivalent dans le monde réel. Il fut intrigué lorsqu'il lut un passage sur Gloutoniskaïa et la 'tour de la gourmandise'. L'équivalent serait un monument russe à en juger par l'analyse de l'auteur. Le pirate se promit que s'il aurait du temps il bouquinerait plus sérieusement ce petit pavé de 300 pages qui à la vue des autres livres dans les étagères était l'un des plus fins dont disposait la bibliothèque. Fascinant et décourageant à la fois.

C'est vrai qu'il se trouvait pas dans un lieu adéquat pour laisser éclater une joie mais des fois on pouvait pas se retenir. James baissa donc les yeux honteux sous le regard désapprobateurs de ses amis et des gens dont il venait de briser la concentration. Silencieusement il suivit les deux demoiselles jusqu'à la dame qui pourrait les renseigner. Elle n'avait pas l'air très aimable mais guida tout de même Dakota pour trouver son livre. L'adolescent regardait tout autour de lui fasciné par tous les livres qui l'entourait. Chez lui il n'en avait pas des masses et il empruntait plus à la bibliothèque de son lycée qu'il n'en achetait. James s'était arrêté se laissant distancer par les deux filles, un livre trainait par terre sans doute mal rangé par quelqu'un qui l'avait emprunté. Il se baissa et le ramassa avant de livre ce qu'il y avait marqué dessus : "Monstre et autres créatures enchantés". Ca lui rappelait le Métactatus qu'il avait combattu avec Edwin...
James regarda autour de lui mais il ne semblait pas être dans le bon rayon pour ranger ce livre. Et en plus il avait perdu les deux voyageuses. Et donc par conséquent il s'était aussi paumé...

- Génial...

Souffla t-il à voix basse. James ne pouvait pas crier sinon il allait se faire disputer, il n'y avait plus qu'à prier pour retrouver la sortie par soi même. L'adolescent fit donc demi tour essayant de se remémorer par où le groupe était passé. Simone n'était pas un chien alors il serait difficile pour elle de lui venir en aide. Elle le suivait docilement sur chacun de ses pas.

Il ignorait combien de temps était passé lorsque enfin James retrouva l'entrée ! Et heureux aussi de voir que Jake était toujours là, et par conséquent les autres aussi. Sydney avait même fini par rentrer mais du coup il n'avait plus trop envie d'aller là bas...Il y avait aussi quelqu'un d'autre avec eux, et sa tête lui disait vaguement quelque chose de là où James était. Peut être qu'en ne regardant pas la version monstre il arriverait à ne pas s'enfuir en courant.
L'adolescent s'approcha donc des autres et prit place comme eux à une table en prenant soin de ne pas regarder le pirate et de maintenir une distance raisonnable. Résister et résister...
Il dévisagea alors l'inconnu pour s'occuper et enfin le trou de mémoire dans sa tête se combla. James se retint de faire un "OOOOOOH" mais qui se traduisit par une main devant sa bouche. C'était l'homme sur le navire qui avait voulu amuser les pirates par des chansons aux paroles étranges et qui faisait neiger. Jules ne l’appréciait pas des masses...

- Bonjour...ça fait euh...longtemps...

Lui dit-il à voix basse. Il remarqua alors les livres que les voyageurs tenaient, d'ailleurs lui même avait zappé de le rendre à l’accueil.

- Vous faites quoi...?

Demanda t-il sur le même ton.

Il y avait des milliers de choses que Dakota ne supportaient pas, et même si ce n’était pas en tête de liste, lire par-dessus son épaule avait une place plus qu’honorable dans son classement mental. Comme s’il n’y avait pas assez d’ouvrages comme ça, il fallait que Selene penche sa chevelure rousse vers elle, présence oppressante, stressante, agaçante… et toute une foule d’adjectifs plus désagréables les uns que les autres. La phobophobe chassa le visage importun d’un geste vif de la main comme elle aurait pu le faire avec une mouche aventureuse puis s’écarta de deux pas pour faire bonne mesure. Même sans avoir ouvert la bouche le message était clair, la toquée se tournant aussitôt avec une moue boudeuse vers les étagères à la recherche d’un livre à lire. Grand bien lui fasse !

Une fois seule il fut bien plus facile de se concentrer sur sa lecture, et le moins qu’on puisse dire était que celle-ci était instructive. Plus qu’un Dieu, le Marchand de Sable –n’oubliez pas les majuscules malheureux ! – était la personnification même de Dreamland. Un être qui englobait tout. Le blesser était blesser le monde des rêves, mais l’inverse était aussi réel, en découlait donc logiquement un rôle de protecteur de cet univers chimérique autant pour son bien que pour la terre qu’il foulait. En tant que personne, il semblait contraint à voyager par ses propres moyens… c’était bien loin de l’omnipotence qu’elle craignait. Malgré tout l’ouvrage parlait de pouvoir si délirant qu’elle n’en craignait pas moins une rencontre fatale. Il était très dangereux, soit, mais il restait un homme. C’était toujours bon de savoir qu’une bonne course pouvait vous sauver la peau lors d’une confrontation.

Et comme toute figure de puissance, il avait toute une flopée de sbires délirants que Dak’ survola avec une moue sceptique. S’il était vraiment si fort, il aurait dû tomber sur les voyageurs bien avant ça, sans parler du fait qu’il serait bien plus qu’un mythe aux yeux des dreamlandiens. Le chapitre suivant lui apporta la réponse à ses questions :

Citation :

En l’an 3583 de l’ère Systerienne, las des incessants conflits qui troublaient Dreamland le Marchand de Sable s’est retiré dans les terres gelées pour y trouver le sommeil. Après cette date, plus personne n’a jamais revu cet être de légende, même si certains contes régionaux racontent qu’il se serait volontairement laissé prendre par les glaces éternelles pour échapper aux maux de ce monde. Dans son cercueil de givre les douleurs infligées à la terre lui parvenait comme affaiblie, et c’est ainsi que s’éteignit le règne de Celui qui Est.

Il aurait donc attendu on ne savait combien de temps enfermé dans un vulgaire glaçon ? Pourquoi en sortir alors ? Même si la question pointa dans son esprit, elle en connaissait déjà la réponse. Parce que les voyageurs venaient toujours plus nombreux, parce que cette fois ci ils étaient venus piétiner en nombre jusque sur son lit hivernal. Ils l’avaient réveillé et il avait vu l’étendu des désastres dont ils étaient la cause… et il n’avait pas aimé ça. Pas du tout même.

Dakota pinça les lèvres en refermant l’ouvrage pour le replacer sur l’étagère. Elle avait appris tout ce qu’elle avait besoin pour l’heure, mais il restait tant de choses à apprendre sur ce monde qu’elle ne pouvait s’en tenir là. Par exemple ce livre là, sur les tours et ses gardiens…

Sa main fine se dressa non sans mal pour se saisir de l’ouvrage poussiéreux situé trop haut pour elle. Sur la pointe des pieds elle s’étirait au maximum, les sourcils froncés par l’effort. Si seulement elle avait eu un costume pour grandir au lieu de cette absurde force colossale ! Elle n’arrivait même pas à se rendre compte si elle se trouvait à 2 centimètres de ce fichu bouquin ou à 20… ou même plus ! Alors qu’elle grommelait un juron l’écrit sembla sauter dans sa main de son propre chef et la gamine en fut si surprise qu’elle en tomba sur les fesses. Il faisait son poids avec ses milliers de pages noircies d’encre, mais le plus surprenant restait le fait qu’il ai bougé de lui-même. Elle n’était pas folle non ? C’était bien que qu’il avait fait ?

Comme pour répondre à sa question il s’ouvrit en deux, les pages se tournant d’elles-mêmes jusqu’à s’arrêter au chapitre intitulé « Gloutoniskaïa, berceau de la gourmandise ». Sur la page suivante s’étalait une gravure qui mettait en scène un clown effrayant dont les dents n’avaient rien à envier à celles d’un requin. Un monstre de cauchemar qu’il lui semblait bien avoir rencontré quelque part. Dans un rêve sûrement.

- Ce… c’était pas le clown qui avait voulu me manger ?

Elle resta interloquée quelques instants avant d’ajouter à mi-voix.

- Ouais bah c’est pas demain que je visiterais la tour…

Dakota n’avait même pas pris la peine de lever les yeux de sa lecture pour lui répondre quoique ce soit. La rouquine poussa un soupir : qu’y avait-il à dire de toute façon ? Ils étaient, pour rester poli, dans les ennuis jusqu’au cou… et peut-être à un point qu’ils n’imaginaient pas. Se relever en étant bossue s’avéra être plutôt difficile, surtout en portant un gros livre destiné à retrouver son étagère.

Selene n’osait même pas se tourner vers son amie tant elle sentait que son apparence métamorphosée devait être horrible. Intérieurement, elle remercia les garçons de ne pas les avoir suivies, et s’éloigna de quelques pas en promenant son regard sur les étagères. Elle venait de penser que si quelqu’un pouvait les aider, eux jeunes voyageurs, ça ne pouvait être que leurs homologues plus anciens. Peut-être dans cette bibliothèque y avait-il un ouvrage qui lui permettrait de localiser des sortes de points de regroupement, d’alliance, de fondation, n’importe quoi fait pour les gens comme elle. Après tout, c’était un trait du monde réel ça, de faire se réunir les gens qui se ressemblent ; peut-être même y avait-il une ambassade des voyageurs quelque part ? C’était à la fois stupide et rempli de bon sens.

Il y avait désormais deux rayons entre elle et la phobophobe lorsqu’elle tomba sur un livre intitulé « Les Voyageurs : QUI SONT-ILS ? ». Sur la couverture, il y avait plusieurs photos de personnes qu’elle ne connaissait pas, pourtant… peut-être était-ce purement psychologique, mais un sentiment d’empathie la lia directement à ces inconnus. Fébrile, la galloise ouvrit l’ouvrage et fut dès lors interpellée par l’introduction au sujet ; c’était étrange de se voir résumée en un simple paragraphe :

« Voyageurs, c’est ainsi que nous appelons ces personnes qui ont fait irruption à Dreamland, depuis un autre monde. S’ils nous sont physiquement très semblables, il est indéniable que beaucoup d’entre eux possèdent des facultés toutes particulière, qui n’ont rien à voir avec la magie de Gloutoniskaïa ou la technologie de Techyo. Ils constituent donc une communauté à part, éclatée et souvent réduite à l’anonymat. Mais nous, dreamlandiens, connaissons-nous vraiment ces individus venus d’ailleurs ? Savons-nous réellement qui ils sont ? »

S’en suivait alors plusieurs chapitres d’étude, tentant d’analyser la psychologie des voyageurs, leurs différents portraits, leurs buts, et leur rôle au sein du monde des rêves. Fort était de constater que beaucoup des observations sonnaient juste – en tout cas aux yeux de Selene – et si certains témoignages racistes la chamboulaient, d’autres, sympathisants, la touchaient profondément. Elle retint particulièrement qu’en fin de compte, ils étaient vus par les habitants des pays oniriques de la même façon que eux les voyaient : des étrangers imprévisibles, souvent estimés comme étant dangereux, mal compris…

L’adolescente ne pouvait pas s’empêcher de compatir aux dreamlandiens qui avaient peur. Les terriens n’étaient-ils pas effrayés à l’idée que des extra-terrestres puissent poser pied sur leur planète ? La multiplication des longs métrages mettant en scène des conflits avec des « envahisseurs » témoignaient de cette terreur dont l’exutoire était de scénariser une victoire sur « l’autre » ; un « autre » forcément mauvais.

Ça n’excusait pas le comportement des elipsiens ou des sextusiens, pas plus que ça ne pardonnait les voyageurs détraqués qui, se croyant tout permis, utilisaient leurs pouvoirs pour semer la pagaille. La solution était peut-être de créer une ville pour les voyageurs, et une politique visant à assurer leurs droits et devoirs à Dreamland ? Un beau projet, mais sans doute long et fastidieux s’il n’était pas utopique.

Ses pensées quittèrent néanmoins ses grands souhaits de paix dans le monde lorsqu’elle parvint au chapitre liant tours et voyageurs. La toquée y apprit qu’un groupe de résistance œuvrait en offrant à ses semblables alliés protection et vivres, mais commettait également des actes de terrorisme visant à détruire les sept tours. Nul ne savait ce qui découlerait de la réussite de ces opérations, c’est pourquoi on pouvait pour l’instant difficilement les voir autrement que comme des criminels.

En fin de livre, une base de donnée renseignait sur certains vieux voyageurs, présent dans le monde des rêves depuis plus d’une centaine d’année. Une certaine Hildegarde attira l’attention de la rouquine, ainsi que Georges Mikles qu’elle connaissait ; Miss Paper, Aston…

« Aston », ce nom lui disait vaguement quelque chose. L’adolescente fouilla dans sa mémoire de longues minutes, jusqu’à ce que son éprouvante spéléologie mentale lui rapporte l’image des égouts, sous la tour de la Luxure. La personne qui les avait aidés à s’échapper avait laissé un mot court : « Lorsque vous verrez Aston, vous pourrez le remercier ».

Selene n’avait pas vraiment envie d’être mêlée à des histoires de terrorisme, ni de participer à la destruction de tours sans savoir ce que cela impliquait. Cependant, il était clair qu’ils avaient besoin d’aide s’ils ne voulaient pas restés perdus et sans défense face à la menace du Marchand de Sable. Si ce Aston avait pu les secourir une fois, peut-être saurait-il les guider une seconde. Ultime manifestation de son costume, un grain de beauté couvert de poil naquit au beau milieu de son front.

-Bien sûr, on peut éventuellement faire nos recherches ensemble. Moi c'est Jake, enchanté. fit Jake surpris.

Il se permit de plonger son regard dans les yeux de l'individu qu'il voyait à présent un peu mieux. Yeux gris. Cette nuance de bleu qui était pas si commune que ça, lui rappelait un peu les nuances de bleu de l'antarctique dont il avait toujours évité, mais dont les magnifiques paysages lui rappellent les moments tranquilles, calmes et doux des phases de froid. Il commença d'ailleurs à ressentir les courants d'air qui provenaient de la porte de la bibliothèque qui battait assez souvent, même si la chaleur de la bibliothèque contrastait le tout, Jake commença à se sentir bizarre.

L'invitation qui se voulait cordiale fut réduite à néant par Sydney, qui était encore plus paranoïaque que la première fois qu'il l'avait vu, ce qui n'était pas peu dire. Ce dernier avait mis à mal une gentille personne qui avait soif de connaissances et était assez civilisé de surcroît. Pour essayer de détendre un peu Sydney il essaya de lui adresser des paroles sur un ton assez doux.

-Arrête, tu es trop agressif. Détends toi un peu. Là... Excusez-le il est assez perturbé en ce moment. Allez-y faites vos recherches.

Jake ne prit pas le risque de regarder Sydney encore, car il allait sûrement le tuer dans les prochaines minutes si quelqu'un ne le sauvait pas rapidement. Le froid s'insinua de plus en plus dans son corps au fur à mesure des entrée dans la bibliothèque et au fur et à mesure de l'avancement de la situation.

James vint se joindre à la discussion assez ... joviale ... et sembla reconnaître le jeune individu qui s'était fait agresser verbalement par Sydney. Peut-être s'étaient-ils déjà rencontrés quelque part? De toute façon il le saurait bien assez tôt. Pour répondre à la question de James, Jake lui tendit un bouquin intitulé "La magie dans tout ses états" qui était assez volumineux.

-Je me documente, et apparemment j'ai pas mal de succès durant mes lectures. Tu sais où Dakota et Selene sont allées?

Il n'eut pas le temps de percevoir la réponse que la bibliothécaire décida d'ouvrir entièrement la porte, ramenant un courant d'air sur Jake, qui avait visiblement choisi "la bonne place" pour regrouper ses amis, et aussi la seule place où l'on sentait les relents froids de l'extérieur, où un mage s'amusait visiblement à jouer avec le vent qui devenait glacé. Et en moins de temps qu'il ne faut pour le dire, il se recroquevilla en position foetale, ce qui fut facilité par le port de son costume, et ses cheveux anormalement long et en couettes se mirent à givrer et il se mit à lire à grande vitesse tout en chuchotant ce qu'il lisait pour ne plus entendre ce qu'il y avait tout autour de lui. Mais, dans son état gelé, Jake resta dubitatif quand à tout ce qui se passait tout autour de lui.

Est-ce bien réel?

Alexander eu la réponse positive de l'individu face à lui. Au moins, il était attentionné. Bien que son regard semblait plutôt étrange, pour ne sembler qu'amical...

Mais il n'eut pas le temps de commencer à lire que l'individu du banc, l'immonde "créature" vint l'agresser, le considérant comme une menace d'après ses dires. Il l'écouta cependant, car s'il était effrayant, il avait surtout l'air paniqué. Et puis, il semblait protéger l'autre homme, qui lui voulait prendre sa défense.

Il allait cependant répondre à l'intrus. Il fallait être un minimum poli.

- Bonjour à vous... Pour répondre à votre question, je suis comme vous. JE m'appelle Alexander Blizzhead. Et si je suis là, c'est en effet pour me documenter... Je veux comprendre les récents évènements qui me sont arrivés....

Il fut interrompu par l'arrivée de ce qui semblait être James... Semblait, car vu son accoutrement, il n'était pas bien sûr. Cependant c'était bien sa voix.

- En effet. Depuis le navire, c'est cela? C'était une sacrée galère... On se documente et discute.

Il sourit lorsqu'il pensa au double sens qu'il venait de prononcer. C'était plutôt rare. En tout cas il semblait connaître les deux compères.

Mais ce qui l'intéressa fut la suite des évènements. Ils étaient avec Dakota? Il la connaissait. Et il comprenait un peu mieux la crise de Syd, qu'il avait surpris devant la bibliothèque. Dakota n'était pas facile à vivre. Mais elle était intelligente. Peut-être qu'elle pourrait l'aider, sur son arrivée ici. Ils devaient tous être revenus depuis plus longtemps que lui. Mais depuis combien de temps?

Le froid s'engouffra dans la pièce, et cela déplut très fortement à Alexander, qui commença à stresser. La neige commença à tomber autour de lui. Mais il n'était apparemment pas le seul à réagir: le jeune homme qu'il en connaissait pas se recroquevillait sur lui, et commençait à avoir les cheveux... givrés? Étrange, comme réaction. Cela le stressa encore plus, et la neige se fit plus forte. Puis le froid se calma, et la neige aussi.

- Si Dakota est ici, je voudrais la voir. Si vous savez ou elel se trouve, elle pourrait peut-être m'aider à avoir les réponses que je recherche.

Puis il se tourna vers le jeune homme, qui semblait peut réagir.

Jeune homme, que se passe t-il? Vous allez bien?


Il espérait qu'il allait bien. Mais son objectif principal, pour le moment, c'était de comprendre le fin mot de l'histoire.... Il se dit que ce n'était sans doute pas la bonne citation, puis écouta les réponses.

Caché derrière son livre, seuls ses yeux de pirates dépassaient, comme un chat qui épie sa proie avant de se jeter sur elle au moindre mouvement de sa part.
Cette fois cependant sa concentration était insuffisante pour qu'il ne remarque pas sa transformation : il venait de retrouver son apparence normale... De pirate... Un costume pour un autre se dirait sûrement le mystérieux voyageur mais qui dans ce monde ne portait pas de masque ?

Cet homme, Alexander Blizzhead, portait à merveille le masque de la politesse et de la courtoisie. Un peu trop d'ailleurs. Il y a une différence entre être honnête et vouloir l'être. Une grande différence, même... Dans un cas on l'est, dans l'autre on ne l'est pas. Cette distinction était pour le paranoïaque l'une des seules qui ne s'encombre pas de philosophie et où la vision manichéenne avait sa place. Dans une parole, soit on ment, soit on dit la vérité. Certainement, on pouvait mentir sans le savoir ou - plus perfide encore - mentir sur un mensonge que l'on croit vrai, disant alors la vérité en mentant... Mais toujours la question de base : vérité ou mensonge. Or il s'avérait par expérience que le monde autour de Sydney était plutôt enclin à lui mentir qu'autre chose et Alexander ne faisait pas exception à la règle.

Jake prenait la défense de ce dernier, et James le connaissait ; ils étaient tous deux des complices. James étant ami avec Selene et Dakota, elles étaient complices également ou du moins, elles n'étaient pas victimes. Il devait se débrouiller seul, surveiller ses arrières comme s'il fût dix à lui seul et le seul rempart entre lui et ses adversaires était ce livre de quelques centaines de pages, ainsi qu'un mur verbal qui ne tiendrait qu'à condition que chacun joue le jeu calmement... Ce qui ne semblait pas de l'avis des voyageurs...

Les courants d'air froids qui s'étaient engouffrés dans la bibliothèque tels des serpents gelés venant picoter leurs membres les faisant frissonner et déclenchaient chez Alex et Jake un pouvoir en apparence assez similaire : l'un invoquait la neige autour de lui tandis que l'autre réitérait la coupe de cheveux -270°.
Ça pour sûr, il était comme eux : le même type de pouvoirs farfelus dans des circonstances précises. Cependant il ne semblait pas atteint d'une quelconque maladie mentale comme chaque voyageur utilisant des pouvoirs était censé pâtir. Il y avait donc une chance que - comme Syd - ce monsieur météo soit sain d'esprit.

Les sains d'esprit dans un monde de fous sont des fous eux-même et à l'instar des voyageurs, une coalition était la plus sûre des méthodes pour survivre. Restait à savoir qui il était vraiment. Un nom et un prénom ne suffisent pas : c'est dans les actes que l'on peut savoir si une personne est honnête ou non. Une séance gratuite d'introspection fit remonter dans l'esprit de Syd que suivant ce principe il devait apparaitre aux autres comme un lâche doublé d'un paranoïaque. Boh ! Il aurait tout le loisir de leur prouver le contraire en temps voulu et puis il n'avait rien à prouver à lui-même.

- Dakota est effectivement ici. Selene aussi. Enfin ici... Vous voulez les chercher ? Bon courage. Et faites attention aux types derrière vous. Conseil.
Il posa son ouvrage à plat avant de joindre ses mains, de poser ses coudes sur la table et de poser son menton sur ses doigts joint, fixant Alexander d'un œil suspicieux.

- Il va bien. ajouta-t-il en désignant Jake. C'est son pouvoir. J'en ai un aussi. Et il me dira si vous êtes digne de confiance ou non, Alexander Blizzhead. Croyez-moi, je vous ai à l’œil. Peu importe les péripéties qui vous ont fait revenir dans ce monde, vous constituez tout de même un danger, surtout si vous avez été suivi. Pour faire simple le dieu de Dreamland veut notre mort. A vous, à moi, et à tous les voyageurs. Je suis censé être votre ami alors que vous avez peut-être mené l'ennemi jusqu'à nous, nous coupant ainsi tout espoir de survie ? Vous comprendrez qu'il faudra faire mieux que ça pour que je sois enchanté de vous connaitre.

Il fronçait les sourcils alors qu'il parlait, essayant de donner le maximum d'impact à ses paroles. Il n'attendit aucune autre réponse en retour, ferma le livre, se leva et partit en direction du rayon le plus proche dans lequel il piocha un des premiers livres dont le titre l'interpellait. "Les pirates : terreurs des mers oniriques" bonne pioche !
Emportant son bouquin, il se dirigea vers la sortie et s'assit à même le sol, dos au mur. Une lecture rapide de la préface le déçut : ce livre n'était pas ce que le titre en disait. Tant pis ; le chapitre sur les différentes villes ainsi que leurs coutumes et la mentalité de leurs habitants demeurait intéressant. Les gloutoniskaïens demeuraient égaux à eux-même et on les retrouvait parfaitement dans la description que l'auteur en faisait. Le livre était donc crédible dans son contenu. Le pirate s'attela donc à sa lecture, attendant que ses compagnons recouvrent la raison ou que l'un d'eux se fasse tuer "accidentellement".

Alexander l'avait reconnu aussi, ce qui était tant mieux James n'avait pas envie de raconter ses aventures ici et encore moins aux deux nouveaux. La porte s'était ouverte faisaient passer un vent frais qui fit frisonner l'adolescent alors que le nouvel arrivé faisait du coup neiger et comme dans le bureau du maire les cheveux de Jake s'était mit à givrer. Deux hommes qui apparemment avaient un soucis avec le froid...
Son clone lui avait demandé où était passé Dakota et Sélène cela était une très bonne question. James savait le but mais pas le lieu ce qui était mieux que rien même si le fait que Jake demande où était passé les filles étaient bizarres. Mais il n'eut pas le temps de répondre que Sydney le fit à sa place, avec sa gentillesse habituelle. James se permit de rajouter :

- Elles sont partis voir un livre sur le Marchand de Sable...et je les ai perdus en cours de route...

Il se sentait un peu débile de dire ça dans une bibliothèque mais la vérité c'était que les rayons de cet endroit était vraiment immense et on pourrait presque jouer à cache cache à l'intérieur...au risque de ne jamais retrouver son chemin mais bon. Le pirate-monstre avait posé son livre à plat sur la table et regardait Alexander comme si il s'agissait d'un criminel. Les paroles de Sydney laissèrent James sans voix. Si ça c'était pas de la haute paranoïa...Celui qui avait un énorme problème de confiance les planta ensuite et s'éloigna avant d'aller s’asseoir à la sortie avec son livre. Une légère tension volait dans le ciel...

- C'est ça son problème...

James n'allait pas expliquer le pourquoi du comment ni comment Sydney saurait si on lui voulait du mal ou non. Il lui avait promit hier sur le banc et l'adolescent comptait bien tenir sa promesse. Mais autant prévenir Alexander que le pirate aurait vraiment du mal à lui faire confiance. Lui même avait l'impression d'avoir reculer de quelques pas...

- Bref, laissons le pour le moment...vous avez appris quelque chose d'important dans vos lectures ? J'ai ramené un livre sur les monstres du pays...ce qui n'est pas très intéressant vu la situation dans laquelle on s'est foutu...

D'ailleurs Alexander avait il son ombre ou pas ? Difficile de vérifier maintenant. Alors que James s'était penché par réflexe un tourbillon tourna autour de lui et son costume s'envola comme il était venu. Il se sentait d'un coup beaucoup plus à l'aise dans ses vêtements !

Jake ne se réveilla pas de sa transe glacée de par le fait que de la neige tombe dans une bibliothèque, mais de par le fait que le tourbillon orangé qui se remanifesta pour lui rendre son précieux pantalon en cuir noir avec sa ceinture cloutée et la ceinture trouvée en bandoulière qui émanait de chaleur réconfortante, juste ce qu'il faut, ni trop ni pas assez.

Le givre sur ses cheveux disparut en moins de temps qu'il lui fallait pour le dire, et il retrouva une posture normale en réenfilant ses rangers fraîchement nettoyées avant son départ au cabinet de psychologie. Ses vêtement lui avaient tellement manqués qu'il poussa un soupir de soulagement en regardant son accoutrement plus que normal pour lui désormais et ses jolis pectoraux qu'il contracta brièvement esquissant un sourire assez charmeur de satisfaction et de bien-être. Il regarda autour de lui et vit ses compagnons subir la même détransformation que lui, ce qui était assez rassurant.

-Ah! Enfin des vêtements normaux! dit-il un peu fort.

-SHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHH! fit le peuple.

Jake rougit et se plongea dans les yeux de James et y resta pendant quelques secondes de regard charmeur et de sourire gêné. Un mince détail dans sa lecture le fit hésiter, et après trente secondes de réflexion et de recherches, il vit qu'il y avait un truc qui n'allait pas. Il fit signe à ses camarades mâles de se rapprocher pour écouter.

-Bon ,je vais pas attendre que les filles soient de retour pour vous annoncer quelque chose d'assez étrange. J'ai l'impression qu'on nous cache quelque chose, intentionnellement, qu'on nous force à tourner en rond. Peu importe les recherche que je fait je reviens au même point. Comme si les livres de la bibliothèque ne voulaient pas que je découvre quelque chose, ou comme si quelqu'un les manipulait.

Ses doutes lui remontaient à la tête et Jake se demanda si sa venue à Dreamland n'était pas préméditée et orchestrée par ce Marchand de Sable, qui fomentait sûrement un plan diabolique pour assouvir ses obscurs desseins ou autres bidules d'un scénario mélodramatique.

La lecture du livre épais s’avérait passionnante. Chaque tour correspondait à l’un des péchés capitaux et était gardée par un gardien généralement surpuissant. Ils se succédaient au fil des générations, et leur ascension ne correspondait à aucun schéma précis. Parfois des dieux divers et variés leur confiaient cette tâche, d’autres fois la tour elle-même choisissait son maitre… nombreuses étaient aussi celles où le nouveau gardien tuait l’ancien pour prendre sa place.

**Et devenir khalife à la place du khalife.**

Il y avait bien sûr eu bien d’autres moyens d’accéder à ce poste, mais il ne fallait pas être un génie pour comprendre qu’il s’agissait au moins pour la moitié des cas de punition. Pourquoi défendre quelque chose contre son gré ? il devait y avoir une raison, que l’auteur du livre ne connaissait visiblement pas aussi bien que les descriptifs de la multitude de protecteurs qui s’étaient succédés dans les différentes tours.

Mais connaître les gardiens du passé ne l’intéressait pas. Elle arracha donc consciencieusement les pages des gardiens les plus récents de chaque édifice en espérant qu’il soit toujours celui en place. Connaître les pontes de ce monde était toujours une bonne chose, surtout quand on apprenait leur rôle à Dreamland…

Ils étaient le dernier rempart contre la chute des piliers du monde. Ça en jetait dit comme ça, mais plus qu’un titre honorifique c’était une mission délicate et sans fin. Des gens les assiégeaient régulièrement simplement pour savoir ce qui se passerait s’ils réussissaient à rompre l’équilibre. Des hypothèses étaient listées en pagaille, concernant à la fois ce monde ci et le leur ce qui fit grimacer Dakota. Savoir que des imbéciles risquaient de détruire deux mondes pour assouvir leur curiosité n’avait rien d’agréable, même si certaines suggestions étaient alléchantes. Mais Dakota était trop terre à terre pour se laisser aller à rêvasser et pire, espérer.

La phobophobe referma le livre dans un claquement sec et glissa les pages qu’elle avait arrachés dans un pli de sa robe. Personne ne semblait l’avoir vu. Elle se tourna vers les étagères pour dénicher un nouvel ouvrage afin de poursuivre sa quête d’information mais un détail attira son attention en la figeant sur place.

Un filet de sable.

Du livre sur le Marchand qu’elle avait reposé il y avait de ça près d’une heure s’écoulait en continu un flot de grains dorés. Le fil d’or descendait jusqu’au sol pour y former un petit tas qui grossissait de seconde en seconde. Le cœur de l’adolescente rata un battement lorsque le filet devint un ruisseau, une rivière puis un véritable fleuve de sable. Elle y était désormais empêtrée jusqu’au mollet et le fracas devait désormais résonner dans toute la bibliothèque. Sous la pression les étagères débordant de livres étaient repoussées et basculaient parfois en provoquant un effet domino tout bonnement effrayant.

Et si seulement les choses s’étaient arrêtées là… mais bientôt des bulles mordorées s’extirpèrent du tapis désertique pour flotter et se tourner vers Selene et elle. Les yeux sablonneux clignèrent une fois, puis deux, avant qu’une voix caverneuse s’élève de nulle part.

- JE VOUS VOIS.

Il n’en fallut pas plus pour que Dakota libère ses jambes et s’enfuit aussi vite qu’elle le pouvait dans ce contexte difficile. Elle ne tenait pas à rester une seconde de plus pour découvrir qui les voyait au juste. De toutes façons elle était sure que la réponse ne lui plairait pas. Elle attrapa la toquée au passage pour la forcer à grimper sur une étagère qui avait chuté, mais même jusque-là les yeux ne voulaient pas les lâcher.

- VOUS NE M’ECHAPEREZ PAS.

- Et ta mère, siffla Dakota en accélérant quitte à se casser un ou deux ongles dans l’opération.

Bientôt une multitude de scorpion jaillirent du sable, armée luisante et noire aux milliers de dards empoisonnés. Pas le temps de chercher les autres, ils se retrouveraient plus tard… s’ils étaient encore en vie. Sur cette pensée tout sauf généreuse, la surdouée grimpa comme une possédée jusqu’à une fenêtre qu’elle traversa avec sa comparse sans se poser de question. Il y avait fort à parier que le taillis dehors serait bien plus doux que le traitement qu’on lui réservait là-dedans.

Selene nota, faute de mieux, ces noms si importants dans un coin de sa tête. Pensive, elle mit plusieurs longues minutes avant de se résigner à poser l’ouvrage sur son étagère. Comment retrouver ces voyageurs ? Là était la question. Dreamland était sans doute grand, très grand, et peut-être qu’aucun d’eux n’était dans les parages. La jeune fille poussa un soupir alors que dans un nouveau nuage de fumée orangée, son costume de fée carabosse disparut. Elle put retrouver son maintien droit, son visage d’adolescente, ses vêtements neufs, et ses Rangers qui étaient mille fois plus confortables que les talons hauts. Pas le temps de s’extasier devant le retour de son apparence, le fracas monstre d’une étagère qui s’effondrait la fit sursauter.

Son cœur avait fait un bond dans sa cage thoracique, et ce n’était pas fini : par effet domino, la grande bibliothèque face à elle commença à vaciller, et seul le réflexe de se jeter vivement sur le coté lui épargna d’être ensevelie sous une pile d’encyclopédies mythologiques. Pâle comme un linge, la galloise se précipita vers le rayon de la phobophobe, et faillit être renversée par le fleuve de sable qui continuait de s’échapper d’un livre. Prisonnières jusqu’aux mollets, la rouquine assista avec son amie à l’émergence de deux globes mordorés qui n’annonçaient rien de bien.

- C’est…

Mais Selene ne termina pas sa phrase, la voix caverneuse lui coupa la parole, déchirant ce qui restait de calme en elle. Dakota prit la première ses jambes à son cou et l’attrapa par la main pour l’aider à monter sur les étagères renversées. Les yeux noisette de la toquée s’écarquillèrent plus encore lorsqu’une horde de scorpions noirs sortit de la mer de sable, pointant vers elles leurs dards empoisonnés. Elle songea un instant à leurs compagnons, James, Jake et Sydney, mais les insectes démoniaques leur barraient la route. Blême, la rouquine avait l’impression que son cœur cherchait à briser ses cotes de l’intérieur. Sans l’aide de sa comparse, ses mouvements rendus imprécis par la peur l’aurait sûrement conduits à dégringoler de la bibliothèque sur laquelle elles étaient en train de grimper pour atteindre une… sortie improvisée. A peine fut-elle sur le rebord de la fenêtre qui apparaissait comme leur salut que sa transformation opéra, changeant la moitié de son corps en épouvantail.

Sa chute dans les taillis fut donc partiellement amortie, mais les branches fouettèrent ses jambes nues et elle s’en tira avec une belle écorchure au genou gauche et plusieurs griffures. Ça faisait mal, mais ce n’était pas encore l’heure de se reposer : en levant ses yeux-boutons vers l’encadrement d’où elles s’étaient échappées, Selene vit se profiler la silhouette d’une espèce d’araignée couleur sable dont l’abdomen était gros comme son poing. Elle n’était pas seule : plusieurs de ses congénères apparaissaient, dévalant le mur à grande vitesse, leurs longues pattes dansant un ballet presque irréel. Cette fois, Selene ne put s’empêcher de pousser un hurlement en se remettant à courir, Dakota sur ses talons.

Sur la place de l’université, personne ne comprenait encore la source de cette agitation. La galloise ne voyait ni les visages interloqués qui se tournaient vers elles, ni n’entendaient les exclamations suscitée par les arachnides menaçantes. Celles-ci poursuivaient les voyageuses en agitant leurs mandibules, produisant un aria de chuintements pétrifiant. Dans cette course à l’aveugle, la toquée finit par s’écraser contre un postérieur inconnu et la phobophobe qui la suivait lui rentra dedans. Après un frémissement qui lui descendit des oreilles aux orteils, tout s’éclipsa instantanément.

Il fallut moins d'une seconde pour que Selene voit le décor se déployer autour d’eux et la surprise de la dureté du sol sous ses pieds la fit s’effondrer. Plus de traces de la bibliothèque, ni de l’université, ni du centre ville. On aurait dit une petite zone pavillonnaire sortie de l’imaginaire saugrenu d’un architecte oscillant entre le village Disney et les influences de Tim Burton.

- Ça ne va pas de vous jeter sur les gens comme ça ?! pesta un homme de la cinquantaine en se massant le bas de son dos.

Visiblement, les deux adolescentes était entrées en collision avec lui juste au moment où il se téléportait. Un coup de chance pour une fois, même si elles ne savaient plus trop où elles se trouvaient. L’effarement ne pouvait pas se lire sur le visage de Selene-épouvantail, mais sa voix désemparée était plus que convaincante :

- Désolé ! Je suis désolé, on a pas fait exprès, on…

Elle ne savait pas vraiment par quoi achever sa complainte. Le gloutoniskaïen ne semblait pas particulièrement perturbé d’avoir affaire à une jeune fille à demi métamorphosée. Pestant dans sa barbe que les jeunes ne faisaient vraiment plus attention à rien, il s’éloigna en lissant sa robe de mage, jusqu’à passer le portail d’une maison en forme de chapeau pointu. La toquée se remit alors debout sur ses jambes flageolantes. Elle était sauve, mais pour combien de temps encore ? Le Marchand de Sable savait où elles étaient désormais, et nul doute qu’il n’en restera pas là.

En fait, elle aurait bien eut besoin de l'un de ses amis. La peur refusait de la lâcher, agrippée à ses entrailles comme un poux à une mèche de cheveux. Sautillant d'un pied à l'autre, dévorée par un envie anxieuse qu'elle ne pouvait pas assouvir dans l'instant, elle demanda à mi-voix :

- Et maintenant ?

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Pour Selene et Dakota => Avoir le monde à ses trousses n'est pas une sinécure

Alexander fut rassuré lorsqu'il apprit que le jeune homme qui s'était recroquevillé allait bien, que c'était du à son pouvoir. Mais son interlocuteur ( qui d'ailleurs avait changé de costume semble-t-il) était presque effrayant: il parlait d'un dieu de la mort, et lui conseillait de faire attention à ses arrières... Qui diable pouvait donc être ce malade? Quoi qu'il fut, il partit en direction de la sortie, un livre à la main. Vraiment étrange, ce type...

Puis, ce fut à James d'évoquer un inconnu... Un certain Marchand de sable. Mais au moins, il avait la confirmation que Dakota était là.

- Je ne sais pas ce que vous racontez sur ce Marchand de Sable ou un soit-disant Dieu de la mort, mais pour le moment, j'ai d'autres questions plus urgentes à régler.

Le jeune homme se réveilla... En changeant lui aussi de costume. Et bien, ils avaient du subir un sortilège, tout comme lui autrefois. Mais le fou était pourtant encore déguisé...

Mais peu lui importait. Ce que le "givré", tel serait son surnom, bref ce qu'il rapportait était intéressant. Des livres qui tournaient en ronds? Il avait eu lui aussi la vague impression que c'était effectivement ce qui arrivait, mais il avait ignoré cet état de fait. Et maintenant, quelqu'un d'autres lui racontait cela...

- Ce n'est peut-être pas qu'une impression. Nous devons allez voir...

Il fut interrompu par un bruit étrange, devenant de plus en plus fort... Comme du sable. Une voix forte se fit entendre. Certains lecteurs se tournèrent vers une rangée de la bibliothèque. Alexander n'hésita pas, il partit voir ce qui se passait.

Et il eut à peine le temps de voir Dakota et Selene disparaitre, tandis que des scorpions cherchaient à els atteindre. D'ailleurs, ceux-ci se tournèrent vers lui.

Il avait certes déjà affrontés son pire cauchemar... Mais en combat loyal. Alors que là, les insectes étaient bien trop nombreux. Il commença à courir, en emportant ses deux nouveaux compagnons.

Tout en s'approchant de la sortie, il leur déclara, suffisamment fort pour que le pirate entende:

- Il faut partir d'ici au plus vite! Le fou, tu es en danger si tu restes ici! Je sais pas d'où ils sortent mais des scorpions nous prennent en chasse!

C'est ainsi qu'il sortit, et s'arrêta plus loin, vers l'avenue commercial de Gloutoniskaïa.

Là, il allait lui falloir des réponses. Et très vite.

Les pages de son bouquin se tournaient plutôt vite quand on ne le lisait qu'en diagonale. Passé l'unique chapitre intéressant, ce bouquin était somme toute banal.
Son cœur de pirate fit un bond alors qu'il entendait les étagères s'entrechoquer. Et puis ce bruit de sable incessant et allant crescendo... Mais qu'est-ce que c'était !?

Il resta figé un instant, regardant autour de lui, écoutant du mieux qu'il pouvait. Ce n'est que lorsqu'il vit des lecteurs s'enfuir à toute jambes qu'il comprit qu'il ne valait mieux pas traîner dans le coin. Monsieur météo lui en apporta la confirmation en lui hurlant de partir d'ici. 'Pas le temps de s'insurger de la manière dont ce dernier l'avait appelé, on verrait ça plus tard.
Les réflexes de Sydney se réveillèrent et d'un bond il sauta à l'extérieur de la bibliothèque et prit ses jambes à son cou. Une fois à distance raisonnable du bâtiment, il attendit ses compagnons. James, Alexander, Jake...
- Et les filles !? leur demanda-t-il. Vous les avez trouvées ?? Vous savez où elles sont !? L'inquiétude se lisait sur son visage. Il ne faisait pas vraiment confiance à Selene et Dakota mais être responsable de leur mort pour ne pas leur avoir porté secours était inacceptable.

Le bâtiment se vidait de son monde et toujours aucune trace des voyageuses. Restait à espérer qu'elles ne soient pas mortes et aient trouvé un moyen de s'enfuir...
- Bon, ben de toute façon c'est pas en restant ici qu'on sera utile à quoi que ce soit. On va partir du principe qu'elles sont parties ; 'faudrait trouver un point de rassemblement. Seulement rester là, moi je le sens pas. Et si on bouge, ce seront les filles qui ne nous retrouveront pas.

A choisir il préférait largement la deuxième solution où personne ne le trouverait mais il commençait à connaitre James et il y avait fort à parier que ce dernier ne se résignerait jamais à laisser tomber ses amies. Sa naïveté ferait presque envie...
C'est pourquoi le paranoïaque ne lui laissa pas le choix et partit dans la direction opposée à la bibliothèque. Il était fort probable que ces "scorpions" aient été envoyés pour faire disparaitre les voyageurs et en y réfléchissant bien : scorpions et sable ça allait de paire, non ?

Eh bien tout était clair maintenant : le Marchand de Sable les avait trouvés. Gé-nial !
Et le pirate de se stopper net dans son élan, de se retourner et de pointer un doigt accusateur vers l'homme neige :
- Je savais bien que vous étiez responsable de tout ça. Le Marchand de sable vous a suivi et maintenant il va tous nous tuer. A moins que vous ne l'ayez effectivement mené jusqu'ici. Vous avez d'ailleurs été l'un des premiers à vous enfuir si je ne m'abuse ; vous étiez au courant du piège ou il s'agit - encore - d'une malencontreuse coïncidence, monsieur Blizzhead ?

Sydney nageait en plein délire paranoïaque et bientôt le monde entier retrouvait sa teinte noire originelle. Aucun ami n'aurait permis ce genre de chose ; aucun ami ne connaitrait aussi bien un ennemi. L'amitié, hein ? Rien qu'une bande de pirates prêts à tout pour endormir vos soupçons.
Ce que je ne comprends pas c'est : pourquoi m'avez-vous prévenu si vous aviez pour objectif de nous tuer ? Vous voulez vous amuser à me voir cavaler, c'est bien ça ? Hein ? Eh bien amusez-vous tous seuls. James, Jake, quoi que vous décidiez cela ne me regarde pas mais par pitié débarrassez-vous au moins de ce fléau ambulant !!

Puis il se remit en route, grommelant dans sa barbe Beuh de toute façon pourquoi je vous parle à vous deux..? Entre l'autre qui vient de débarquer y a à peine une heure et l'autre qui sait pas ouvrir les yeux, on est bien barrés. 'Pis de toute façon avec des amis comme ça pas besoin d'ennemis. D'ailleurs vous n'êtes que des dangers ambulants, bande de fous ! Vous êtes tous cinglés, ici.

Il en avait un peu marre de quitter le groupe, s'asseoir sur un banc, être menacé de mort, s'asseoir sur un banc, être menacé de mort et quitter le groupe en allant s'asseoir sur un banc qui le menace de mort pour qu'il aille s'asseoir sur un banc en quittant le groupe après avoir été menacé et bla bla bla bla bla...........

Ca tournait TOUJOURS autour des mêmes thèmes. AH ! Il avait oublié de rajouter "l'ombre"... Il avait la sienne et c'était tout ce qui l'intéressait. Il avait également quelques Rubz, apparus comme par magie dans sa poche on ne savait quand, et qui lui seraient utiles pour manger et se loger, du moins un certain temps. A moins qu'il n'utilise ses économies pour quitter la ville ? Non : le maire les en empêchait. Pourquoi ? Qu'est-ce que ça cachait ?? Et si il...
Deuxième révélation de la mi-journée : le maire était allié au dieu fou de Dreamland !

Tournant sur ses talons, serrant les poings, le paranopirate se dirigea vers la mairie, bien décidé à en découdre avec cet hurluberlu de seconde zone. Il était allé trop loin et ces crimes ne resteraient pas impunis ! Pour éliminer le mal il faut frapper à la racine de toute façon, et donc couper la tête de cette ville et se sauver dans l'hystérie collective. Il n'y avait pas de "qui m'aime me suive" ou de "pour le peuple", mais la simple colère qui faisait bouillir intérieurement Sydney. La vindicte semblait désormais la seule solution puisque les mots n'avaient plus aucune puissance. Après ça, il comptait bien retrouver Selene et Dakota, leur poser les questions qui lui embrouillaient l'esprit et les abandonner tous à leur triste sort.

Si Jake et James avaient reçu le même déguisement, en matière de discrétion c'était pas trop ça non plus. Et pourquoi le regardait t-il comme ça maintenant ? L'adolescent sentait le rouge lui monter aux joues et détourna le regard au bout d'un certain temps, gêné d'être ainsi observé. Jake parla alors de ses découvertes en aventurant que les livres le faisait tourner en rond, ou plutôt qu'ils ne voulait pas lui donner des éléments. Alexander semblait rejoindre son avis et se leva pour se diriger vers les rayons, sans doute pour aller retrouver les filles.
James retourna dans son livre, après tout c'était toujours utile de savoir des trucs sur des monstres si jamais ils tombaient dessus. Un bruit sourd se fit alors entendre derrière eux et un Alexander qui courait vers eux en leur criant de fuir. En effet du sable sortit d'où ne sait où et des scorpions.

- AAAAAHH !!

Là c'est bon il avait le droit de faire du bruit ? Suivant le mouvement de foule James suivit ses camarades, heureusement que ses talons l'avaient quittés. Ce n'est qu'une fois assez loin de la bibliothèque et de ses trucs bizarres que Sydney fit remarquer qu'il manquait les filles. Le visage de l'adolescent s'alarma en pensant que si ça se trouve elles s'étaient faites ensevelir et sa gorge commença à se nouer comme si il allait fondre en larmes.

Le pirate se mit alors à accuser Alex d'avoir conduit le Marchand de Sable jusqu'à eux, ce qui était totalement farfelu et vu la situation actuelle James commençait à en avoir ras le cul de sa paranoïa à l'autre là...Il n'avait même pas envie de le suivre et de le laisser se démerder tout seul tiens ! Mais il n'était pas assez méchant pour ça...et surtout l'adolescent appréciait Sydney même si il avait un caractère de merde. ce dernier avait apparemment décider d'accuser aussi le Maire dans l'histoire. Il est vrai que c'était assez louche qui leur ai demandé de rester dans cette ville...
James inspira en se disant que Dakota était une adolescente très forte et qu'elle avait du s'en sortir comme elle le faisait toujours ! Et avait emmené Sélène avec elles il ne savait où...Une chose était sur elles ne reviendrait surement pas sur le lieu du massacre.
L'adolescent joignit donc le pas au pirate qui n'était plus repoussant, et tant mieux. Il saisit ce dernier par le poignet pour le stopper :

- Je ne pense pas que ça soit une bonne idée d'aller voir le maire...il vaudrait mieux se faire petit et se serrer les coudes pour retrouver les filles...je sais pas il doit bien y avoir un mage ou quelqu'un qui a le pouvoir de retrouver les gens...comme dans une boule de cristal !

C'était sans doute utopique de penser qu'une telle chose existait mais après tout on était à Dreamland non ? Et plus rien ne devrait être étonnant.

- Et Alexander n'a rien à voir avec la venue de tu sais qui ! Peut être que le livre qui parlait de lui était piégé...après tout il est pas bête alors...je sais pas il a du se douter qu'on se documenterait sur lui ! Comme euh...Voldemort qui piège les lieux où il a caché les parties de son âme tu vois ?

Oui, les craintes que Jake avaient émises étaient bien fondées. Quelque chose allait se passer, c'était sûr. Qui sait le Marchand de Sable les avait suivis et les avait menés dans cette bibliothèque pour les tuer. En tout cas Jake commença à sentir son coeur battre, sans savoir si c'était parce qu'il avait peur du Marchand de Sable, ou si c'était parce que James le regardait aussi. C'était la première fois que son coeur battait aussi vite, et aussi la première fois que Jake se sentait comme ça. C'est ça qu'on ressent quand on est amoureux? Mais il sentit que le décor qui s'effondrait n'était pas du ressort de la relation amoureuse.

-What The F***!

Après avoir réalisé qu'il s'était passé quelque chose dans la bibliothèque et avoir su que Selene et Dakota étaient saines et sauves, Jake s'accorda un moment de répit dans les yeux de James. Bref moment de répit coupé par le délire de monsieur parano. Pour s'ajouter à la discussion qui s'embrasait, telle une aparition, une formule magique lancée par un mage maladroit fit en sorte qu'un étal d'un marchand tombe en ruine à côté d'eux dans un fracas insoutenable. Un dragon de feu s'échappa alors d'un parchemin, et, durant une dizaine de seconde, les cheveux de Jake s'embrasèrent. PAM! En à peine de temps qu'il fallait pour le dire, Jake avait mis une droite à Sydney le clouant à terre.

-Calmes toi bon sang de mer*e! Tu vas arrêter de faire ch**r! Il est le premier à nous venir en aide et toi tu le soupçonnes de complot? Sais-tu au moins ce qu'il s'est passé? En tout cas laisse le tranquille!

Suite à ces paroles, le cheveux de Jake s'éteignirent, la colère et la crispation de sa mâchoire se calmèrent peu à peu pendant que le dragon de feu regagnait son parchemin. Mais Jake ne regretta pas son coup de poing entièrement. Mais il eut honte de lui et essaya de formuler ses excuses arrivant à peine à aligner des sons.

- *bruit sourd* ngrgggg, D-d-d-d-d-dé-z-z-z-so-l-l-l-llll-lé...

Ayant besoin d'un réconfort, il se dirigea dans les bras de James et se blottit contre lui cherchant désespérément quelqu’un qui pourrait lui pardonner. Mais, là il sentit vraiment que son intégration dans le groupe était loin d'être accomplie et que tout ce qu'il avait fait jusqu'à ce moment n'était qu'un epic fail.

Suite à leur sortie de galère, plusieurs choses s'enchainèrent.

Tout d'abord, il y eu une nouvelle "crise" du pirate fou, qui l'accusa encore une fois de tout les malheurs du monde... Mais il parlait d'un marchand de sable, encore une fois! Mais qui étais ce type?

Il considérait cependant qu'il devait y avoir un lien avec les bestioles des déserts et le sable dans la bibliothèque. Il ne pensait pas que les Gloutoniskaïens avaient un tel potentiel magique. Et puis, l'utiliser en pleine bibliothèque...

Après l'intervention de hurluberlu, c'est James qui chercha à le défendre... Avec des arguments particulièrement saugrenu, mais toujours sur le même thème. Cependant, l'idée du mage avec des pouvoirs de "vision", était amusant et intéressant.

Mais il n'eut pas le temps de développer son point de vue que Jake intervenait à son tour, peu de temps après un accident sur la rue. Ses cheveux s'étaient embrasés d'un coup, et le magicien maladroit pensait à un mauvais coup d'un espèce de dragon... Mais Alexander avait bien vu les cheveux s'allumer tout seul!

La scène qui suivit fut encore plus impressionnante: le jeune homme mit le fou à terre, puis déversa une colère tel qu'Alexander en avait rarement vu. Au moins, ce n'était pas une colère froide. Puis le jeune homme chercha à prononcer quelque chose, avant de se coller à James. Étrange, ces jeunes...

- On peut pas dire que vous ayez vos langues dans vos poches!

Il tendit sa seule main au pirate.

- Il ne sert à rien de s'énerver ainsi, cela ne fera que nous rendre plus faible. Dans un premeir temps. Coopérons. Déjà, retrouvons les filles. J'ai pas entendu parlé de magicien visionnaire, mais je connais la ville assez bien. On peut se renseigner à l'université, si vous voulez.

Puis, avant d'obtenir une quelconque réponse, il se rappela d'un détail.

- Vous pouvez me poser toutes les questions qui vous tarauderaient l'esprit, mais d'abord: qui Diable est ce Marchand de Sable?

Il était tout de même temps qu'il en apprenne plus sur ce qui se passait. D'autant que de ce qu'il se rappelait, Gloutoniskaïa était plutôt calme ( vu l'incompétence de la police ici, c'était sans doute le mieux)

James empêcha le pirate de continuer sur sa lancée, prétextant qu'il y avait mieux à faire que d'aller voir le maire. Il avait raison dans un sens. Retrouver les filles était bien plus important ; fussent-elles mortes, on ne le saurait qu'en les retrouvant. Cependant Sydney avait beaucoup de mal à concéder que le nouvel arrivant soit blanc comme neige. Sa venue coïncidait trop avec cette avalanche de problèmes pour être fortuite et tout cela nécessitait quelques éclaircissements que le pirate jura d'obtenir une fois tout rentré dans l'ordre.

Ensuite, tout est devenu plus rapide. Et plus brutal, aussi. Suite à un "accident" magique, Jake s'approcha du pirate. Ses cheveux flamboyants semblaient avoir fait naître chez lui une colère noire qui se traduisit par un violent coup de poing qui cloua le pirate au sol. Premier réflexe : tenir sa tête entre ses mains car le choc avec le sol avait été plus rude encore que le coup asséné par le fou furieux. Syd s'assit sur le sol pavé, passant une main dans ses cheveux à la recherche d'une quelconque trace de sang ; rien. Il avait eu de la chance, mais ses oreilles sonnaient et il voyait des petites boules de lumière danser devant ses yeux. Il ne s'attendait pas du tout à ce que ce soit Jake qui l'attaque. Ce dernier se blottit d'ailleurs dans les bras de James en marmonnant quelque chose d'inaudible.

Le paranoïaque observait son adversaire bouche à demi ouverte, avec un regard plein d'une incompréhension dédaigneuse qui voulait clairement dire : "T'es sérieux ??"
Il ne remarqua pas tout de suite la main qu'Alexander lui tendit mais accepta qu'on l'aide à se relever. S'époussetant, il écoutait son allié du moment parler et poser ses questions.
Avant de répondre, Sydney ne put retenir une question à son tour :
- Tu veux dire que tu es déjà venu ici ? Ou alors tu étais là depuis plus longtemps que nous ?

La réponse que son interlocuteur lui fournit lui sembla convenir, mais cette fois il ne répondit pas aux questions posées. Il laissa James prendre la relève. Non, cette fois il se dirigeait vers Jake, l'interpella, et lorsque ce dernier tourna la tête dans sa direction, il lui vaporisa une bonne dose de spray anti-moustique dans les yeux.

- Voiiiiilà ! Ceci devrait mettre les choses au clair dit-il d'un ton sec en se détournant des deux jeunes hommes. Il rengaina son arme. Je savais bien que ce truc finirait par me servir. Bon ! Si on a fini avec ces conneries, on peut peut-être aller retrouver Selene et Dakota. Voyez-vous, matelots, j'en ai un peu marre que tout le monde ici se paye ma tête. Alexander, tu parlais d'une université. Allons-y. *Avant que je me fasse décapiter*

Alors qu'ils discutaient bien gentiment pour persuader Sydney du bon fond d'Alexander un étalage tomba non loin et une flamme qui avait l'apparence d'un dragon sortit de nulle part en même temps que les cheveux de Jake s'embrassait. James regarda interloqué son cuir chevelu et trop abasourdi pour venir en aide à Sydney qui s'en prenait une. Ce n'est qu'une fois l'action faite que l'adolescent retourna sur terre, enfin façon de parler, et s'exclama !

- Mais arrêtez bon sang !

Comme si ils avaient besoin d'une guerre civile ! Et c'était quoi ce soudain retournement de caractère chez Jake ? Ce dernier d'ailleurs retrouva sa couleur de cheveux naturelle et balbutia un truc inaudible que même un animal ne saurait déchiffrer. En tout cas ça ne l'empêcha pas de faire comme chez lui et d'aller se blottir dans les bras de James sans autorisation. L’expression actuelle de celui ci pourrait se traduire par un " What the fuck" tandis que ses bras restaient allongé près de son corps sans savoir quelle attitude adopter. Déjà avoir un mec relativement mignon contre soi était gênant mais en plus ce dernier venait der frapper le pirate. James n'avait aucune envie de devoir se mettre entre les deux voyageurs et de prendre un partie, même si en fait Jake avait eu tort de frapper son ami.

Alexander aida Sydney à se relever et leur informa qu'il était déjà venue ici. Peut être lors de sa première venue...? Il proposa de se rendre à l'université pour aller se renseigner. Il ne voyait pas en quoi ça les aideraient mais bon...En tout les cas cela sembla convenir au pirate qui interpella Jake avant de lui asperger les yeux avec un spray. James fit des gros yeux et fut prit d'un agacement, de véritable gamin putain. Et c'est lui qui osait parler de connerie ?

- Je te signale que la palme de la connerie te reviens aussi quand même...!

Légèrement agacé James répondit tout de même à Alexander qui devait savoir où il venait de mettre les pieds.

- Un Dieu qui veut notre peau parce que notre venue a foutu le bordel en gros, donc on a une croix au dessus de notre tête...

Pour le cas de Jake il ne savait pas trop quoi faire, à part que en cas de contact avec les yeux il faut rincer abondamment avec de l'eau...comme avec les savons. Mais le hic c'est que James n'avait pas d'eau sur lui. L'adolescent regarda autour de lui et aperçu une petite fontaine près d'un mur, et sans lâcher l'aveuglé il s'approcha d'elle. Ca ne ressemblait en rien au truc tout pourri de son quartier. Une inscription était écrite au dessus : " Demandez et servez vous".

- Puis je avoir de l'eau s'il vous plaît ?

Comme c'était si gentiment demandé l'eau se mit à couler dans la petite fontaine et James imagina une petit tube ( le truc de chimie la xd) et une fois l'objet apparut il versa de l'eau dedans :

- Je sais pas si ça fait mal...je te préviens

Doucement il approcha le tube des yeux de Jake et de son autre main lui ouvrit un œil pour y verser de l'eau, avant de faire de même pour l'autre œil. Il ignorait si ça suffirait pour calmer la douleur chez le voyageur mais il était pas médecin.
James remercia la fontaine qui arrêta de s'écouler et au bout de quelques minutes le tube s'évapora comme par magie. L'adolescent rejoignit les deux autres avec Jake pour se diriger vers l'université.

- Tu es venu quand ici Alex ? Enfin, je peux t'appeler comme ça...?

Spoiler:

James lui apporta du réconfort, son coeur commença a battre plus vite, son cerveau se redit confus, ses émotions devinrent désordonnées, et notre adepte du cuir oublia pendant un petit moment ce qu'il avait fait et tou ce qui l'entourait. Mais la chose que Jake savait qui allait arriver, comme par hasard, arriva, et comme une revanche amère qui s'annonçait plus qu'amère, il reçut une dose exagérée de spray anti-moustique venant du pirate. La douleur fut instantanée et les yeux de Jake lui brûlèrent et lui piquèrent violemment.

-AHHHHHHHHHHHHHHHHHH cria Jake.

Ce dernier se retint de riposter, même si la tentation était plus que présente, mais répondre ne ferait qu'aggraver la situation déjà délicate, avec un paranoïaque le tout est d'y aller en finesse pour ne pas se faire dégommer la tronche si on veut devenir ami avec lui.

Il suivit ses cours de premiers soins et ne céda pas à la tentation de fermer ses yeux, et les larmes coulèrent à flots pendant que James le sauvait, en dépit de la sensation de Jake d'être un bon à rien et un gay attardé. L'eau passée sur ses yeux le soulagea énormément, même si ses yeux étaient totalement rouges et piquants, il ne put pas s'empêcher de lâcher un Ahhhh de soulagement.

-Merci beaucoup James, et vraiment désolé de te causer autant de soucis fit Jake sur un ton embarassé.

Une fois encore il en devait une à son compagnon qui avait eu la malchance de tomber le gros boulet qu'il était. *Mais la vie continue...* et le vase qui tombe en morceaux se recolle. En dépit de tout ce qui lui arrivait, rien que le fait d'avoir disputes intergroupales, Jake voyait que d'une manière ou d'une autre il était lié à ces autres gens qu'il commençait à apprécier vraiment.

Alexander était plutôt content de la suite. Mis à part une intervention du pirate à coup de spray ( et Alexander se demanda d'où qu'il le sortait...), le groupe semblait se renouer. James soignait Jake, qui le remerciait. Et le pirate et James lui posait la même question, étant tout deux d'accord pour partir vers l'université. Il ne répondit pas de suite.

Cette histoire du "Dieu" voulant leur mort était plutôt dérangeante. Il se demandait si ce n'était pas la folie qui les avaient atteints en arrivant ici. Et pourtant, évènement qui venait de se passer était bien réel.

D'une certaine manière, Alexander préférait avoir affaire à ce "Dieu du sable" machin chose plutôt qu'à un marchand de glace. Il n'émit donc aucun commentaire.

Il était temps pour lui de se dévoiler en partie, semblait-il.

Il marchait doucement, en direction de l'université. Cela ne leur prendrait que quelques minutes pour atteindre le lieu-dit. Il passerait devant le bar ou il avait enquêté, il y a quelques jours... ou quelques mois? Il ne savait plus réellement.

- Pour vous répondre à tout deux, je suis venu autrefois ici, oui. Avant mon retour dans le monde réel, pour être précis. A quand cela remonte, il m'est difficile de le définir. Moi et deux autres filles avions à enquêter sur des disparitions. J'ai d'ailleurs enquêté ici...

Il désigna le bar du Mage Bourrée, au passage.

- Plusieurs choses à savoir sur l'endroit: ne prenez pas de boisson locales , elles sont fortes. Les citoyens d'ici sont très doués en magie. Et le commissaire de cette ville, Voh Orloff, n'est pas très doué. Il y a peu de crimes, ici. Tout du moins, c'était le cas lorsque je suis venu ici. Je ne sais pas si votre Dieu a changé grand chose...

Il continuait sa marche, ne s'occupant que peu des passants. Cette ville était féerique. Il l'avait aimé, lorsqu'il avait rencontré Myia... Il aurait voulu être auprès d'elle. Mais le destin en avait décidé autrement.

- Vous pouvez en effet m'appelez Alex, au fait. Et je tiens à préciser: c'est ici que je me suis séparé de mes compagnons. Mais si vous rencontrez une certaine Melena Autumn... Faites attention à elle. Elle est dangereuse!

Il retenait sa rage froide, mais celle-ci était visible de ces interlocuteurs. Ce qui était sûr, c 'est qu'avec toute ces informations, peut-être que le pirate allait lui faire un peu plus confiance.

Puis, arrivant à quelques mètres de l'université, il se rappela un détail:

- Ah oui, James, tu vas être obligé de rester là: il existe une barricade d'âge, et je crois que tu es trop jeune... Après, tu peux toujours essayer. Sinon, je propose que toi et Jake, vous restiez ici, il en devrait pas y en avoir pour longtemps, tandis que le pirate et moi allons dans l'université. Ainsi, il pourra voir que je suis digne de confiance. Après, si tu veux nous suivre Jake... Ah et monsieur le pirate, si je pouvais avoir votre prénom...

Quoi que fut les réponses de ses compagnons, Alexander commença à entré dans l'université, chantonnant son air préféré:

Je suis une petite théière toute trapue…
Voici ma poignée, voici mon bec…
On peut me prendre et me renverser…
Je suis une petite théière toute trapue…

Alors comme ça il méritait la "palme de la connerie" ? Pour quel motif ? Ne pas tomber tête baissée dans les pièges tendus ? Ne pas se laisser marcher sur les pieds ? Si être tout cela à la fois c'est être con, alors *Je suis con et fier de l'être !*
Viendra le temps où leur groupe sera suffisamment grand pour que le pirate puisse choisir ses alliés et ses ennemis. Ou bien attendre simplement que cette petite famille implose, à croire que c'est ce qu'ils cherchaient tous. Enfin bref, le couple James/Jake s'entendait plutôt bien et ça les occuperait un certain temps.

Pendant tout le trajet à travers la ville il écouta avec soin les remarques, les histoires et les avertissements d'Alexander. Pour en connaitre autant sur ses ennemis, il faut en avoir fait partie : raison de plus pour ne pas lui faire confiance. Mais c'était tout de même suffisant pour reconnaitre que ce jeune homme n'avait rien de suicidaire en comparaison avec les deux tourtereaux.

Gloutoniskaïa ne semblait pas avoir de secrets pour leur guide et le pirate se demandait si celui-ci serait d'une quelconque utilité une fois sorti de la ville. Certes il avait peut-être son doctorat en étude magique mais rien ne prouvait qu'il saurait être en mesure de survivre dans une de ces villes hostiles comme Elipse, Enojo ou Freedoom... Enfin la question ne se posait pas vraiment puisqu'ils étaient arrivés devant l'université et qu'une autre question prenait le pas, puis une autre, puis une foule d'autre. La première ? Pourquoi une restriction d'âge ? Le paranoïaque avait du mal à visualiser l'utilité d'une telle barrière à part l'utiliser à des fins peu reluisantes. Après tout, les rares choses interdites aux moins de dix-huit ans étaient... Bref...

La proposition du monsieur météo le laissa sans voix. Ou... C'était plutôt le contraire :
- QUOI ? Eux, rester ici et moi... Mais... Et pourquoi ça ne serait pas Jake qui irait avec toi !? Je n'ai aucune envie de savoir si je peux passer dix minutes avec toi sans me retrouver avec un couteau planté entre les omoplates !!
Ses grands gestes de révolte semblaient passer inaperçus tout comme ses remarques, d'ailleurs. Baissant les bras (dans tous les sens du terme) il lâcha un profond soupir avant de rejoindre Alexander.

- Sydney. il marqua une pause. C'est mon prénom. Même si je ne vois pas en quoi ça te sera utile à part savoir quoi graver sur ma tombe. Il aurait dû se méfier de lui... Il était tombé la tête la première dans le piège. Cet homme n'était pas simplement une victime du Marchand de Sable mais un allié, un espion, un traitre... *Alors cette fois c'est qui qui remporte la palme de la connerie, hein, James !? Faire confiance au premier venu... Pff !*
Entrer dans le bâtiment était encore plus difficile que pour la bibliothèque car cette fois-ci il devait subir la chansonnette que poussait Alexander. Que devaient-ils chercher, déjà ? Ah oui : des renseignements sur les filles. Bon... Peut-on mourir à coup de renseignements ? A priori non. Donc il suffit d'aller poser ces foutues questions et ressortir d'ici avant d'y rester. Ironique, dans un sens...

- Bon écoute : je sais que tu ne m'aime pas, et c'est réciproque. Alors s'il te plaît, pas de faux semblants, c'est pas la peine. On demande, si on a des réponses tant mieux, sinon tant pis mais peu importe l'un ou l'autre, je ne reste pas ici.
Le pirate s'avança d'un pas décidé vers le premier guichet d'information qu'il trouva. Inutile de perdre son temps à s'extasier ou à discuter vainement, Dakota aurait sûrement pensé la même chose.
La personne était de dos, semblait occupée à ranger ou fouiller des choses dans un carton posé sur une table. Syd se racla la gorge ce qui fit légèrement sursauter la jeune femme qui se retourna en un éclair.

- Oh bonjour, je ne vous avais pas vu, désolée. Puis-je vous aider ? Vous cherchez quelque chose ? demanda-t-elle, armé de son plus beau sourire commercial.
- Quelqu'un corrigea le pirate d'un ton sec qui se voulait peu aimable. Nous avons... Égaré deux de nos amies et nous voulions savoir si vous pouviez nous aider. Notez qu'elles sont 1/√2, en fait.
Visiblement, la jeune femme ne semblait pas avoir compris. D'un air maussade et à la fois méprisant il reprit c'était une blague... Vous savez, les trucs qui font rire. Le chat de Schrödinger, ça vous dit rien ? Bon bref oubliez, je m'en fout. arborant cette fois-ci un sourire faux qui se voulait rattraper sa mauvaise fois, il conclut : en fait on ne sait pas si nos amies sont encore en vie, et si vous ne nous êtes d'aucune aide, dites-le moi franchement, parce que j'ai eu ma dose de relations sociales pour la journée.

Toujours sourire pendant quelques secondes d'un silence gêné... Rien. OOOh !! J'en ai marre. il tourna le dos au comptoir, laissant Alexander prendre la relève s'il le souhaitait. Le journée était au comble de l'horrible mais cela pourrait être encore plus joyeux s'ils avaient la bonne idée de visiter tous les lieux publiques de la ville, et pourquoi pas aller jusqu'au marché, pendant qu'ils y étaient... Ben voyons... *Des incompétents... Je suis entouré de fous et d'incompétents. Et un traitre, aussi. Et deux pseudo-mortes. Et un dieu de-.... Rhaaaa !!!!*
Le paranoïaque tournait en rond, faisait les cent pas, tentait une énième fois de se calmer, d'oublier la foule qui marchait autour de lui et dont chaque individu - aussi insignifiant soit-il - était peut-être en possession d'un poignard bien affûté qui ne demandait qu'à se loger entre ses côtes... Il tentait, mais n'y arrivait pas. Le coup que lui avait donné Jake n'avait pas eu le même effet que la gifle de Dakota. Cette dernière l'avait calmée tandis que le coup de poing n'avait eu pour seul effet que de l'énerver et le rendre plus suspicieux encore.

Il s'arrêta soudainement, tendant l'oreille. Les yeux rivés vers la sortie, il écoutait. *C'est moi ou j'ai entendu...* Une hallucination, sans doute... Il pensait trop et la subdivision du groupe ne lui plaisait pas du tout. Revenant vers son assassin présumé, il lui tapota le bras d'un revers de la main, yeux toujours rivés vers la sortie et sans se soucier de savoir s'il avait eu les précieuses informations ou non.
- C'est peut-être que moi mais j'ai un mauvais pressentiment... On devrait pas rester là. Pitié, sortons j'ai pas envie de rester là. Pitié.