Opération évasion

Sans crier garde, peut-être parce que son esprit était encore fixé sur les injustices, son premier pouvoir se déclencha. Le BIP sonore de sa montre hideuse était moins fort qu’à sa dernière manifestation mais sa fréquence était bien plus frénétique. De plus, un nom s’afficha sur l’écran qui avait jusqu’à lors toujours été vierge : Liam Baldwin. Dans son cerveau encore brûlant de rage contre l’injustice, ses pensées saines essayaient de tisser une toile réfléchie qui l’informait de l’utilité de sa première capacité, mais quand son ainé la fixa dans les yeux, elle ne sut que lui rendre un regard glacé.

La main qui tenait sa batte était toujours secouée de tremblements. Qu’est-ce qui la retenait de le frapper lui aussi ? Alors qu’elle venait de résoudre un problème, voilà que son propre partenaire s’en prenait à cette jeune femme. Jonh était déjà sorti avec le gosse, rien n’empêchait la détenue de fracasser le crâne du trentenaire pour en finir, avant de quitter les lieux à son tour en prétextant n’importe quoi. Rien de bougeait sur son visage de marbre, elle était l’inexpressivité incarnée, mais quelque chose l’empêchait d’aider cette fille une autre fois. Parce qu’au fond, Liam n’avait pas tord ? Elle aurait pu alerter la police ? Oui, mais elle aurait pu ne pas le faire. Sa montre le clamait, marquant le temps de sa folie comme un métronome, c’était injuste de la traiter de la sorte, et son acolyte était le coupable.

Eve ne répondit pas. Voilà que la rouquine était trainée comme une misérable, le cœur de la russo-américaine accéléra. Elle allait le frapper, c’était inévitable, presque autant que le fait que le soleil devrait se coucher une fois la nuit terminée. Le criminel la croisa, frôlant même dangereusement son épaule… mais elle ne fit rien, paralysée par la collision de ses propres pensés. Une fois seule, elle s’avança vers le radiateur pour essayer de détacher les menaces, y alla même d’un violent coup de batte enragé qui abima le bois, mais les jouets ne cédaient pas. Tout son corps frémissait d’une frustration démente et froide, la détenue s’agenouilla devant la rousse en pleurs et murmura :

- Il ne s’en tirera pas comme ça, les criminels ne s’en sortent jamais…

Ses yeux marron se tournèrent vers sa victime tuméfiée, secouée de spasmes de douleur. L’homme n’était déjà plus en état de toucher quiconque, mais le monstre tapis dans les entrailles de la taularde continuait de grogner, appelant à la mort. Néanmoins, le réceptionniste remua légèrement, signe d’un réveil qui approchait, et la brunette se décida à quitter le love hôtel.

Les autres étaient loin devant, elle les rattrapa vivement, sans faire attention aux passants qui avaient été alertés par leur vacarme. Sa montre avait disparu, mais elle avait désormais compris comment s’en servir. Les paroles de Liam lui revenaient, mais impossible, sa raison refusait de les enregistrer : qu’importe ce que la fille perdait, fermer les yeux revenait à se montrer pire que son arnaqueur. Savoir que le monde regorge d’infections et rester à les regarder, voilà l’œuvre de tout un chacun qu’Eve méprisait plus que tout et malgré son charisme charmant, le taulard venait de lui prouver qu’il pouvait n’être que comme les autres. Pire encore, il avait frappé et séquestré cette fille qui n’avait rien fait. Cela méritait bien une correction sévère, mais dans l’état actuel de leur groupe, elle était seule contre quatre, ce qui réduisait ses chances de réussite à presque zéro ; même si elle valait mieux qu’eux tous indépendamment.

Arriver à destination fut peut-être l’unique chose qui la détourna de ses ruminations paranoïaques. Le quartier était miséreux, symbole d’une pauvreté noyée dans la délinquance et les trafics en tout genre. Du temps où Eve était en liberté, même elle évitait de trop trainer dans ce genre d’endroit dégénéré où la mort et la maladie semblait l’attendre à chaque pas. Elle se sentait forte, mais la vermine qui pullulait dans chaque coin sombre était toujours plus nombreuse. Désormais elle n’avait plus peur, la prison peut-être ; ses yeux marron balayaient ce décor avec une indifférence froide. La lie de la société qui certes, n’avait été qu’écrasée, comme ses parents, comme elle, mais qui au lieu de s’insurger à son exemple, avait apprivoisé le mal en se complaisant dans les injustices.

L’immeuble de Blackberry était sans grande surprise à l’image de ce désastre sociétal. Liam demanda si c’était bien ici, mais la russo-américaine lui jeta un regard inexpressif sans prendre la peine de lui répondre. Ils n'allaient pas reculer maintenant.

En croisant ivrognes et camés affalés à même le sol, comme des loques crasseuse sans vie, elle faisait tournoyer nonchalamment sa batte en guise d’avertissement. Lorsqu’enfin le groupe fut devant la bonne porte, Eve prit une inspiration, songeant brièvement que si la vieille l’avait arnaquée, elle saurait la retrouver pour lui régler son compte, puis frappa à la porte. Une voix réclama le mot de passe qu’heureusement, la folie n’avait pas effacé de ses neurones.

- Évasion.

La porte s’ouvrit alors sur un appartement que l’on jurerait tiré d’un autre monde. Oubliés la misère et la crasse, l’intérieur entretenu n’avait plus rien à voir avec le quartier, et ce simple constat redonna un brin de crédibilité à leur fameux passeur censé les aider à quitter cette ville de cinglés.

Yoru n'avait été qu'un fantôme, silencieux, invisible et inactif. Il avait suivit le groupe formé par Eve, John, Liam et Zack sans broncher. Plongé dans ses pensées, le monde autour n'avait aucune importance. Qu'il accorde de l'attention à sa situation était vain. Son esprit était comme en hibernation, il se reposait intérieurement. Ne plus poser son regard dans l'intention de voir et ne plus écouter ce qu'il y a aux alentours pour comprendre. Lorsque John lui posa une question, il esquiva la réponse et détourna le regard, méprisant. Il ne s'en était pas rendu compte. En réalité cela lui était égal. Il ne pensait qu'a lui même et quelque part c'était apaisant. Ce que faisait Liam avec Eve dans ce love hotel, il en était conscient. Ca le dégoutait. Mais il s'en foutait vraiment.

Après un moment de flottement où il s'ennuyait à mourir, Yoru décida de sortir prendre l'air. Il s'assit sur le rebord du trottoire et inspira une grande bouffée d'air.

*Mais qu'est-ce que j'fou là sérieux..*

Pensa-t-il lasse. Ce fut un instant comme s'il avait rendu les armes et brandit le drapeau blanc. Ce sera surement la seule ou l'une des rares fois où l'asiatique ne rouspetera pas, où il ne voudra pas se mettre en avant. Un bruit de fond attira son attention. Il se retourna et vit dans le hall du batiment de l'agitation. Eve semblait une fois de plus faire des siennes.

-Bah c'est pas moi qui irai l'arrêter cette fois...

Chuchotta l'asiatique. Déjà que la dernière fois qu'il s'était opposé entre le clochard et Eve, il s'en était surement prit plus dans la gueule que l'homme en question. Il ne recommencera pas une seconde fois! John sortit le premier avec un gosse dans les mains ce qui sucita la curiosité de l'asiatique qui néanmoins ne posa aucune question. Par la suite Liam puis Eve sortirent l'un après l'autre. L'ambiance semblait palpable. Ils étaient en colère.
Le groupe reprit la route et c'est tel un aimant que Yoru suivit ses compagnons sans grande convictions vers un quartier délabré, sale et lugubre. Cette situation le tira quelque peu de sa réserve. Il devint de plus en plus méfiant, regarda plus autours de lui, faisait attention à ne rien toucher, que rien ne l'approche. La délinquance et la misère: Voilà les premiers mot qui vinrent à l'esprit de l'hypocondriaque qui grimaça en observant tout ce qu'il y avait autour de lui.Il resta bien groupé avec les autres faisant mine de rien. Il se permit de lancer:

-Putain mais on va où comme ça?


Il s'en foutait de la réponse, pourvu que les autres sachent son malaise. Ils n'en avaient probablement rien à faire ce qui était regrettable. Ce groupe n'était en aucun cas soudé. Au moindre problème ce serai chacun pour sa pomme et Yoru le savait d'avance. Lui ne suivait pas les autres comme un chien (suivez mon regard) mais plutôt par défaut. Que faire d'autre? En y réfléchissant, il n'y avait rien d'urgent à faire dans ce monde. Le seul truc urgent ou important serait de trouver un moyen de rentrer chez soit. L'asiatique en avait vraiment très envie. Et tant que cette opportunité ne se présentait pas concrètement, ça n'en valait pas la peine! Il en avait marre de voir ces têtes, d'avoir à supporter tout les aléas de cette vie imprévisible et dangereuse, de suivre un faux espoir, de fuir encore et toujours, sans confort ni repères. A quoi bon donner de l'importances aux choses?
La troupe arriva devant un immeuble délabré. Yoru n'osait même pas imaginer l'intérieur de cette bâtisse visiblement prête à s'effondrer. Eve prit les devant, frappa et annonça le mot de passe. La porte s'ouvrit et à la surprise de tous et plus particulièrement de l'hypocondriaque agréablement surprit, l'intérieur de ce bâtiment était magnifique. Propre, beau, riche! Yoru se sentit rassuré et entra vivement à l'intérieur. Alors il se mit à contempler la décoration sans dire un mot. Il observa simplement.

Lorsque le groupe ce fut suffisamment éloigné de l'hôtel Jonh déposa gentiment l'enfant par terre pour continuer à marcher. Il ne voulait même pas savoir ce que les deux autres avaient fait dans cet endroit sur le "couple". Avec leur caractère de chien ils n'avaient pas du leur faire des caresses.
Enfin...les voyageurs arrivèrent dans une ruelle horrible où régnait la pauvreté et le délabrement. C'était bien connu que les passeurs vivaient dans des endroits comme celui ci pour se cacher...
Tous se demandait si c'était véritablement ici et il fallait croire que oui vu le regard qu'Eve lança à Liam. Ils firent face à un bâtiment qui ne tenait que sur un fil et après avoir donné le mot de passe Jonh eut l'impression de changer le monde tellement l'intérieur n'avait rien à voir avec ce qui se passait dehors, juste devant cette porte.

Le dépressif regarda autour de lui alors qu'une nouvelle fois, une mini tornade orange tourna autour de lui pour le transformer. Seulement ce ne fut pas en diablesse mais en une espèce de Frankenstein mais sans la tête.

Spoiler:

- Génial...

Marmonna t-il en se regardant dans un miroir. Décidément il y avait des personnes qui n'avaient rien à faire d'autres dans ce pays que déguiser les voyageurs. Et il était sur que ses compagnons subiraient le même sort à leur tour. Quoi de mieux pour être crédible que de porter un déguisement d'Halloween ?
Bref...il n'y avait plus qu'à attendre que la magie se dissipe comme la dernière fois. Il y avait des choses plus importantes à faire en ce moment que de penser à son apparence. Comme sortir de cette ville en vie par exemple.

- Bon...il est où ce passeur ?

Pourquoi est ce qu'ils le regardaient avec cet air dégouté ? Ah oui il y avait aussi des propriétés magiques avec ce costume. Amazing.

Ce groupe commençait sérieusement à lui courir sur le haricot. Le bouledogue bon qu’à écarter les jambes semblait en vouloir à sa peau maintenant qu’elle avait eu son entre-jambes – du moins ses regards brûlaient d’une haine sans limite – alors que Yoru chialait comme à son habitude. Mais qu’est-ce que je fais là ? Et pourquoi je traine avec eux ? Et les gens ils sont tous méchant ! Ce genre de trucs puérils qui vous donnait envie de lui fermer sa trappe à ordures à coup de pelle. Et puis ce gosse-là, bizarre et décalé, à croire qu’il ne lui manquait pas une case mais tout un régiment. Quant à Zak’ ? Il avait disparu depuis longtemps. Pas une grosse perte soit dit en passant. Seul Jonh restait, le seul sur qui il savait pouvoir compter, voir s’y fourrer dans les moments de disette. Il n’y avait plus qu’à espérer sortir vite de cette ville de sociopathes afin de mettre un terme à leur collaboration bancale avec cette bande de bras cassés.

La porte de l’appartement s’ouvrit lorsqu’Eve prononça le mot de passe, mettant un terme aux ruminations de l’ex-taulard. L’intérieur n’avait rien à voir avec le couloir délabré et humant bon l’urine rance. Tout était nickel, pas riche mais propre et bien entretenu ce qui se révélait un véritable exploit dans un immeuble de toxicos sans un rond. Une petite vieille ridée avait ouvert la porte avant de s’éclipser aussi sec, les laissant seuls dans l’étroit hall d’entrée. Le tourbillon farceur d’Halloween attendit que la porte se referme derrière eux pour les changer un à un en joyeux possesseurs de costumes ridicules, et Liam fut bien heureux de constater qu’il n’y aurait pas de momie pour lui cette année.

Et puis le rose, c’était si seyant !

Spoiler:

Il tourbillonna avec émerveillement dans sa robe froufrouteuse, mira son reflet dans une glace à droite de l’entrée et pouffa en masquant sa bouche de sa main. A n’en pas douter les autres faisaient bien triste figure à ses côtés !

- Miroir, mon beau miroir… qui est la plus belle d’entre nous ?

Il s’esclaffa de nouveau de son rire de crécelle avant de grimacer à la vue de ses camarades. Ses doigts s’enroulaient autour de ses poils de torse débordant de son décolleté alors qu’une grimace de dégoût venait déformer ses traits. Non vraiment, quelqu’un d’aussi joli ne pouvait pas trainer avec des gens aussi horribles…

- Mais vous êtes LAIDS ! S’exclama-t-il avec horreur en les montrant du doigt tour à tour.

Monstre de Frankenstein, croquemitaine, loup-garou, faucheuse… tous n’étaient que des créatures de cauchemar. Se savoir si proche d’eux causa une bouffée d’angoisse à Liam qui manqua de peu de mouiller sa culotte en dentelle. Mais il ne fallait pas se laisser faire, il fallait réagir ! Leur montrer la voix de l’esthétisme ! Fort de sa conviction que le Dieu de la mode était en lui, il entreprit de leur montrer l’évidence à force de mimiques explicites.

- Toi t’as des yeux bizarres, et toi t’es tout maiiiigre ! Toi tu devrais te raser et toi… toi t’es vraiment trop trop trop trop trop trop trop trop, il reprit sa respiration bruyamment, trop moche !

A chaque fois qu’il se tournait vers quelqu’un pour le commenter, il le touchait du doigt en activant du même coup son pouvoir. Bientôt chacun de ses compagnons se retrouva vêtu de rose, affublés de ruban et de breloques charmantes qui les rendaient indéniablement mignons. L’effet était si puissant que même Jonh avec son costume ne semblait presque plus repoussant. A la vue de ce prodige les yeux de Liam s’écarquillèrent de surprise et de joie avant qu’il ne saute sur place en tapant dans ses mains, à la limite de l’hystérie :

- Comment vous êtes trop chouuuuuuux ! Olala mais y’a pas photo c’est 100 fois mieux qu’avant ! Je suis une magicienne du rose ! Hihihi…hihi !

Il encadra son œil droit d’un V de la victoire avec son index et son majeur, le tout agrémenté d’une pose mignonne à en vomir.

-Vous pouvez dire merci vous savez, y’a pas de honte à être reconnaissants. On devient pas beau tous les jours ! Moi vous voyez, avant j’étais moche, mais maintenant que j’ai ma super robe cro cro cro jolie, et bah tous les hommes vont tomber à mes pieds hihi ! Soyez pas jaloux ! La jalousie est un bien-vi-lain-dé-faut !

La petite vieille femme qui leur avait ouvert la porte s’était éclipsée très rapidement, les laissant seule dans une entrée étroite. Eve, que ce périple commençait à sérieusement agacer, mourrait d’envie de s’octroyer le droit d’avancer plus encore dans l’appartement pour dénicher elle-même le dénommé Blackberry et discuter des modalités de sa sortie – car elle se doutait bien que comme dans le monde réel, aucun service n’était gratuit à Dreamland.

Une série de tourbillons orangés enveloppa alors un à un les protagonistes et lorsqu’elle se dissipa, ils étaient pour le moins… changés. La première des choses que ressentit la détenue fut un sentiment de faim atroce qui lui déchira l’estomac, comme si elle n’avait rien avalé depuis des jours. Comme ses autres comparses, elle eut le réflexe de se tourner vers le miroir et avant même de constater son apparence des plus saugrenues, celle de Jonh la fit sursauter tellement il était horrible. Elle avait envie de le prendre par le col et le jeter hors de l’étroit couloir, pour être certaine de ne jamais le revoir, mais la transformation de ses propres vêtements finit par la captiver plus encore que l’horreur qui émanait de Jonhenstein.

Spoiler:

Ses possessions se trouvaient toutes dans les poches de sa salopette crasseuse, ses lunevolutives étaient accrochées à son tee-shirt usé, mais son masque ridicule refusait de quitter son visage malgré tous ses efforts. Serrant ses mâchoires pour contenir sa colère, Eve eut l’impression que ses dents étaient beaucoup plus puissantes, capable de broyer presque n’importe quoi. Si le dépressif coula sur cet évènement sans s’en soucier particulièrement, la taularde maugréa :

- C’est quoi ce cirque ?!

Pas de réponses non, si ce n’est Liam qui tourbillonna dans sa robe à froufrou, questionnant le miroir dans une parodie absolument grotesque de Blanche-Neige. Sous son visage artificiel de croque-mitaine, la jeune femme écarquillait les yeux, atterrée par ce qu’elle voyait. Les exclamations désobligeantes de la princesse temporaire ne lui firent aucun effet, pas plus que le bout de son index qui s’enfonça dans son sternum en troquant les couleurs délavées de ses vêtements rapiécés contre du rose et des rubans. Deux couettes vinrent même nouer ses cheveux noirs comme l’enfer, mais tout ce qu’elle put répondre une fois que sa langue ait pu passer outre fut :

- Putain, mais t’as pas envie de fermer ta gueule ?!

C’était juste abominablement ridicule la manière dont se comportait le taulard ; il ruinait purement et simplement toute la réputation qu’il avait pu se forger jusqu’à l’instant présent, et l’unique chose qui retenait la russo-américaine de lui collait une beigne pour le faire taire était peut-être que l’incompréhension la clouait encore sur place. Et celle faim qui martelait son ventre n’arrangeait rien, il fallait qu’elle mange, n’importe quoi, mais qu’elle se nourrisse bon sang, c’était insoutenable !

Dans un ultime éclair de lucidité, elle chopa Yoru au col de son costume ridicule de loup garou et le plaqua à la porte en renversant Aden au passage. Ses poils bien peignés et sa cagoule rose lui donnait ce petit air indiscutablement mignon, certes, mais ce n’était pas ce qui l’intéressait. Raffermissant sa prise, elle s’exclama :

- Tu connais ce monde depuis longtemps toi, hein ?! Tu sais ce qui se passe là ? C’est quoi ces accoutrements ridicules qui tombent de nulle part ?

Devait il rire ou bien pleurer devant la scène qui se déroulant devant ses yeux ? Le grand Liam qui faisait peur aux enfants avait hérité d'un déguisement de princesse pour cette fois et si porter une robe le rendait ridicule...ce qui allait avec était encore plus horrible. Ou comment faire baisser quelqu'un dans un estime. Si Jonh tenait de Frankeinstein le fait qu'il était repoussant, l'ancien taulard lui était à présent très chiant. Pour une fois il était d'accord avec Eve, qu'il/elle devait se la fermer. Eve quant à elle était devenu il ne savait trop quoi mais tout comme le dépressif Mademoiselle je vois la vie en rose lui tapait sur le système. Mais était ce une raison pour s'en prendre au pauvre Yoru ? Même si le bridé l'avait traité de pédophile et ne le portait pas dans son coeur le dépressif ne pouvait pas laisser la brune s'en prendre à lui sans raison. d'habitude le jeune homme restait en retrait et laissait faire mais là il n'y avait que lui pour empêcher que ça finisse mal.
Jonh s'approcha donc des deux et posa sa main sur le bras de la folle furieuse pour qu'elle lâche le japonais. Heureusement que ce dernier n'était pas dénudé car il avait aucune envie de voir l'un de ses mauvais souvenirs. Surtout qu'il n'avait rien à voir dans l'histoire.

- Lâche le, ça sert à rien de s'énerver ! Ce sont des gens qui ont rien à faire qui pour Halloween nous mettent ces costumes qui ont en plus de ça un pouvoir...Ca partira au bout d'un moment

Et ce qu'elle croyait que ça lui plaisait à lui d'être avec ce costume repoussant même en version "mignon" ? Le pire serait sans doute pour Liam quand il redeviendra normal. Le pauvre chuterait de très haut. Mais en attendant c'était eux qui pâtissait de ce caractère haut en couleur, ou plutôt rose.
Après cette petit explication il était temps de revenir à leur mouton et la raison de leur venue dans cette maison. Plus tôt il serait parti de Ellipse mieux ça serait pour leur vie. Jonh n'avait pas très envie de retourner dans la tour de la Luxure à nouveau si jamais ils se faisaient attraper ou bien de se faire tuer sur un bucher.

Jonh avança donc dans la demeure regardant autour de lui, mais il n'y avait vraiment aucun bruit ici. Même la personne qui avait ouvert la portes semblait s'être volatilisé.

Les voyageurs à présent tous dans le hall se transformèrent un à un ! D’abord John en Frankenstein puis Liam en Princesse, Eve en Croque mitaine puis ce fut au tour de Yoru d’être prit dans un tourbillon orange. C’était comme à la loterie. La dernière fois, il se souvint d’avoir été une momie, par la même occasion, il était devenu très résistant mais très lent ! Il espérait tomber sur quelque chose d’un peu mieux ! Une fois le tourbillon dissipé, l’hypocondriaque pu admirer son costume de… Loup Garou dans le miroir! L’asiatique ne pourrait surement pas s’en rendre compte mais à présent il agirait comme un animal, bête et méchant pendant tout le temps où il userait des dons liés au costume.

Spoiler:

Yoru commença par se trouver une agilité hors norme, il s’approcha du miroir d’un pas léger et rapide pour s’observer de très très près et renifler la vitre à la manière d’un animal devant son propre reflet. Il ne comprenait pas pourquoi ce loup garou débile le regardait quand il toucha la vitre de ses griffes aiguisées, provoquant un crissement très désagréable. Il sursauta et se détacha bien vite de son reflet pour retrouver ses compagnons. Ne faisant pas attention à ce qu’ils disaient, il se gratta le dos, son visage poilu, tira sur son costume avec les dents et essaya d’enlever ce qu’il avait sur la tête à l’aide de ses griffes pointues.

Tout le monde était ridicule et plus particulièrement Liam. C’était quelque chose ! Un truc collector. Le taulard, affublé d’une robe rose bonbons à froufrous parlait et riait bêtement comme une petite fille futile. Dommage que Yoru n’ai pas de caméra pour filmer ça ! L’asiatique se calma un moment et se désintéressa de son costume pour faire valoir sa part humaine et se délecta pendant quelques minutes de cette prestation des plus drôle que lui offrait Liam, un sourire aux lèvres. Il lança alors à ses compagnons :

-Liam est méconnaissable, hein ?

Puis se mit à rire. Il fallait mieux en rire qu’en pleurer ! Liam condamna alors ses compagnons d’infortune à se mettre à son effigie, porter du rose, des rubans et tout ce qui va avec ! L’hypocondriaque grogna et son côté animal reprit le dessus. Il s’acharna avec ses griffes sur sa cagoule rose mais surtout sur ce ruban qui lui barrait la vue. Son manège fut bien vite stoppé par Eve qui le prit violemment par le col. Yoru montra ses crocs (ou plutôt ses dents) en grognant à l’image d’un chien qui se sentait en danger. La taularde lui posa une question des plus légitime et Yoru ne pu se calmer et grognait encore et encore au visage d'Eve quand John vint à sa rescousse pour calmer le jeu.
L’asiatique sentit un ruban lui gratter la jambe, il se détacha d’Eve d’un grand coup de patte et alla s’isoler pour se mordiller le mollet. Foutu rubans !!

Finalement, son coéquipier finit par saisir la balle et le prit dans ses bras, les règles avaient semble-t-il changées et il le porta jusque dehors. Le soleil chaud sur sa peau le rassura, il était bien dans cette équipe.

Peu de temps après le reste du groupe sortit du vieux motel à leur poursuite. Jonh le déposa sur le goudron. Le groupe marchait telle une vague, poussé par l'envie de ne plus se perdre seul, Aden évolua au milieu des rues en leur compagnie, marchant vite, ne se souciant de ce qu'il laissait derrière lui, courant lorsque les autres pressaient le pas, jamais ne s'arrêtait parce qu'il ne voulait se faire distancer.

Enfin ils s'arrêtèrent. Ils étaient maintenant dans une grande rue large, peu de voitures passaient, même si l'une d'elle était retournée sur un des trottoirs, partout des sacs poubelles et des bouteilles vides semblaient fleurir dans cette jungle humaine. De vieux immeubles d'où s'échappaient de multitudes têtes, certaines fumant d'autres bavant, mais aucune n'avait l'air d'avoir une quelconque importance. Tous étaient transparents, non pas parce qu'Aden ne se souciait pas d'eux mais simplement parce que ce paysage était un désert sans âme et qu'ici chacun se ruinait à devenir une pierre morte au milieu du far west.

Le temps s'écoula soudain à une incroyable vitesse, il déposa les yeux sur un ivrogne qui urinait contre une voiture puis passa une porte toujours à la suite des autres, des visages, une petite avec des rides et des cheveux gris, une main putride, de l'effroi ? Un barbu qui devient une princesse barby et Aden se retrouve les fesses par-terre, poussé par un individu qui lui rappelle vaguement son lit...

Soudain des hurlements ! Un loup ? Non ! Un homme ? Il le connait ? Qui ? Celui qui plutôt était saisi par la femme ? Il lui ressemble, vaguement, avec un peu plus de poil...

- Gentil toutou ! Dit Aden se relevant afin de lui faire une caresse...

Debout sur ses pattes, il constata qu'il avait troqué son jean pour un tutu rose, aucun souvenir de s'être changé, tant pis, ce n'est pas si mal sauf pour les collants roses qui lui colle un peu l'entre-jambe, ce qui le gratte légèrement.

Il s'approcha un peu plus de l'autre mais lorsqu'il leva sa main, il se produisit un phénomène étrange, sa peau se désagrégeait laissant apparaître des os blancs immaculés. Il sentit ses vêtements glisser sur sa peau, enfin partout ce n'était plus sa peau, il savait qu'elle disparaissait, il sentait les sensations du toucher quitter peu à peu son corps, il n'eut plus de goût, plus d'odeur, plus de chaleur autour de lui. Enfin comme une mésange se posant sur une branche, il eut une grande cape bleutée qui s'enroula délicatement autour de ses épaules.

Spoiler:

Aden regarda tour à tour ses deux mains, il se mit à balancer la tête de gauche à droite, s'il lui avait resté un cœur, il l'aurait senti accélérer à en exploser au fond de lui. Il cria :

- Non, non, Aden ne veut pas ça, non Aden veut pas !

Il voulut fermer les yeux pour ne plus les voir mais il ne pouvait pas, il se recouvrit les yeux des mains enfin il sombra dans la nuit. Mais cette nuit était étrange, là où ses amis étaient plus tôt, de petites torches aux allures de soleil minuscules s'éclairèrent. Aden se décida à enlever ses mains de ses yeux, mais il ne retourna pas à la lumière. Le noir avait envahit la pièce, les flammes de ses compagnons volant toujours au dessus du sol, là où plus tôt il pouvait voir leurs visages. Chacune avait une identité propre, l'une d'elle était rose bonbon et tournait sur elle-même, l'autre semblait suinter d'un liquide verdartre qui tombait sur le sol dans une mare nauséabonde. Un petit nuage grisé dans le fond semblait regorger d'étranges humeurs. Une quatrième flamme courait après ce qui devait être sa queue, formant une espèce d'anneau enflammé, la dernière formait une bouche d'où s'échappait ce qui ressemblait à de la bave...

Un grand balai avec un couteau à son sommet apparu face à Aden, il l'attrapa, c'est alors qu'un serpent sorti du sol et s'enroula autour de l'outil puis rampa le long du bras du jeune garçon, une fois à son oreille, il lui siffla « Tu as le choix que nul n'a. »

Les lumières reprirent leur place, des regards certainement étonnés et soucieux dévisagèrent Aden. Il voulu s'excuser mais seul « Waaaaaaah ! » s'échappa de sa pauvre bouche.

La remarque d’Eve claqua comme un fouet dans le vestibule et Liam en fut si offusqué qu’il en resta coi. Elle lui avait dit de… de la fermer ? C’était comme ça qu’elle la remerciait ? Quel exemple pour la jeunesse ! Pas étonnant qu’ils tournent tous mal à son contact ! Entre le bout de chou qui criait d’une voix gutturale et l’homme poilu qui se mordait les pieds…

- Ta maman ne t’a jamais dit que ce n’était pas très hygiénique ? interrogea-t-il d’une voix blanche.

C’était vraiment trop fort. Non seulement ils étaient tous trop bizaaaaarres mais en plus ils faisaient les intéressants et pire : ils le rabaissaient ! Alors qu’il était si joli ! Heureusement cet homme qui venait de pénétrer dans le salon sur lequel donnait le vestibule n’avait d’yeux que pour lui. Ses iris noisettes ne quittaient sa robe rose froufrouteuse que pour monter jusqu’à sa couronne de plastique. Le sourire qui étirait sa bouche bien faite ne voulait dire qu’une chose. Il l’admirait à n’en pas douter ! Un homme de goût !

Son esprit acidulé lia vaguement l’homme à celui qu’il venait voir et qui s’appelait… comment déjà ? Ah oui, ça lui revenait.

- Monsieur Blatte-berry c’est ça ? C’est un drôle de nom ! Personne ne voudrait manger des baies de cafard ! C’est trop dégoûtant ! Hihihi…hihi !

Le tueur pouffa un instant derrière sa main avant de tenter une œillade qu’il voulait séductrice – et qui n’était qu’effrayante – mais leur hôte tint bon. Il avait même l’air de trouver ça plutôt drôle. En moins de temps qu’il n’en faut pour le dire il les invita à s’asseoir dans les confortables fauteuils qui trônaient dans le salon devant une coquette cheminée. Dans celle-ci brûlait un faux feu, été oblige, qui donnait une impression de chez-soi réconfortante. Une sorte de cocon dans lequel rien ne pouvait nous atteindre… et si c’était loin d’être vrai, c’était l’effet –réussi- qu’avait voulu le passeur.

Assis sur son siège qu’il avait sans le vouloir teinté de rose et orné de gigantesques pompoms, Liam se penchait en avant pour tenter de mettre en avant son décolleté mais ne parvenant qu’à offrir une vue sur une cascade de poils virils. Qu’à cela ne tienne, il était sûr de ses arguments ! Après tout, il était une vraie princesse non ? Et une magicienne du rose qui plus est, rien ne pourrait lui résister. Il s’humecta les lèvres dans une démarche qui se voulait sexy, après quoi il prit la parole de son ton mièvre nouvelle acquis.

- La fille là-bas, oui oui elle… avec ses lunettes ho-rri-bles… j’ai essayé de l’arranger mais c’est pas encore ça hein… breeeeef ! Elle a dit que vous pouviez nous faire sortir d’ici !

Il marqua une pause pensive après quoi il ajouta avec un naturel déconcertant :

- On vous a déjà dit que vous étiez beau ?

Silence. Ça avait beau être vrai ce n’était pas le genre de chose qu’on sortait de but en blanc à un inconnu dont notre vie dépendait. Un homme aux allures de courtier en bourse avec son costume impeccables, ses cheveux noirs bien coiffés et son sourire colgate. Un homme trop propre sur lui pour être honnête. Il avait l’air d’attendre quelque chose, de cet œil amusé et intrigué au point d’en être vexant. Comme si tout ça n’était qu’un jeu parmi d’autre mais peut-être était-ce simplement le cas pour lui…

- Parce que c’est vrai vous savez ? D’ailleurs si vous n’avez pas de copine je… oooolala j’ose pas… je suis vraiment trop timide…

Le violeur se dandina un moment l’air gêné, ses joues rosissant sous la barbe naissante qui commençait à les envahir. Aborder un garçon, c’était vraiment embarrassant. N’était-ce pas le prince qui cherchait sa princesse d’habitude ? Alors qu’il s’apprêtait à abandonner, l’exemple d’Ariel lui revint en mémoire pour lui donner du courage. Oui ! La sirène avait bien bravé la colère de son père pour quitter l’océan et chercher l’homme de sa vie non ? Ce serait lâche que d’abandonner la quête de l’amour au début du sentier !

- Ça vous dirait un diner rien que tous les deux ? Avant que je quitte la ville bien sûr… un dernier rendez-vous avant les adieux, ce serait trop romantique non ? Hihihi hihi !

Pour toute réponse, Yoru montra les dents, grognant à la manière d’un canidé. Bah voyons, son cerveau aussi avait dégénéré jusqu’à l’état animal ? N’y avait-il donc personne de toujours sensé avec ces costumes ridicules ?! Eve s’apprêtait à secouer l’hypocondriaque comme un prunier, des fois que ça lui remette les neurones en place, mais Jonhenstein version ruban et tutu lui posa une main sur le bras pour lui demander de se calmer et lui fournir des explications. Des « gens » qui s’amusent à leur faire ça parce que c’était Halloween à Dreamland ? Et bien si elle leur tombait dessus, elle ne se priverait pas de leur faire savoir sa façon de penser. A contrecœur, la russo-américaine lâcha le col de l’asiatique, croisant un instant les pupilles du dépressif à travers son masque de Croque-mitaine.

- Ah ouai ? Et quand ?!

Son ventre gargouilla bruyamment, signe de la faim dévorante qui lui donnait des crampes d’estomac. Malgré sa vie assez misérable depuis la mort de sa mère, jamais elle n’avait ressenti le manque de nourriture à ce point là… elle n’aurait même jamais imaginé que cela existait. La manifestation sonore de son ventre fut vite oubliée, en faveur du petit autiste qui s’époumona d’une voix fantomatique inintelligible. La faucheuse n’est-ce pas ? Il semblerait que l’auteur de cette magie temporaire avait le sens de l’humour quand à aux effets de ses créations.

La taularde en serait restée là avec Aden, si tout n’était pas subitement tombé dans les ténèbres. L’hallucination du psychotique lui apparaissait aussi nettement qu’à lui ; et même si elle avait déjà été victime de ce genre de pouvoir avec ce détraquée dans la station de métro hors service, elle ne pouvait s’empêcher d’être déstabilisée par cette déformation de la réalité. Lorsque tout se dissipa, elle eut l’impression que son cerveau avait du mal à se remettre à l’endroit. Cette échappée surréaliste avait mit un bon coup de pied dans sa raison fragile. La tête entre les mains, la jeune femme ne reprit conscience de la tangibilité de sa situation que lorsque Liam aborda un certain « Blatte-berry ».

Nouvelle démonstration aberrante de l’effet dévastateur du pouvoir de la robe sur l’esprit du criminel. Si on avait pu voir l’intégralité de son visage, chacun aurait pu se rendre compte de la tempête qui faisait rage dans les prunelles de la détenue. Elle qui les avait amené jusqu’ici, au risque de se faire prendre à cause de leur nombre, craignait de ne voir tout s’envoler en fumée parce que le doyen ne savait plus se tenir. Et s’il faisait exprès ? Peut-être cherchait-il simplement à la faire mettre à l’écart d’une façon ou d’une autre ; l’enfermer dans cette capitale maudite pour le reste de son temps à tirer à Dreamland.

Si leur hôte n’était pas présent, nul doute qu’Eve se serait approcher pour fracasser la mâchoire de l’hypersexuel d’un coup de poing. Au moins, il aurait arrêté de déblatérer ses salades ridicules ; mais elle fut obligée de venir s’assoir, ignorant la faim titanesque qui déchirait ses entrailles. Dépitée, elle assista à la fin du numéro de princesse-Liam sans pouvoir rien dire. Ce temps fut mit à profit pour détailler Blackberry : un homme soigné, propre sur lui, la mine amusé… rien qui ne laissait présager le vice. Pourtant, il ne fallait pas oublier où il vivait, ni son rôle. N’importe qu’elle hurluberlu ne devient pas passeur clandestin : dans le monde réel, les émigrants qui cherchent à traverser les frontières avec de l’aide doivent verser de grosses sommes d’argent en échange ; pourquoi serait-ce différent ici ?

Quand enfin un créneau se libéra dans la houle verbale du taulard, la paranoïaque se racla la gorge et fixa son interlocuteur ; du moins, c’est l’impression qu’elle avait, mais il était bien difficile de fixer en retour les yeux étranges de son masque.

- Excusez-le… je crois que ce costume ne lui… réussit pas.

Elle devait chercher ses mots pour ne pas être vulgaire, et sembler un minimum bien élevée. Faire dos rond, lécher les bottes des gens pouvant potentiellement l’aider n’était pas – mais alors pas du tout – de ce qu’elle aimait faire. Mais ce Blackberry avait désormais autant le pouvoir de les faire sortir que de les emprisonner… alors il était temps de faire fi des complications pour une fois.

- On m’a indiqué que vous pourriez nous aider, poursuivit-elle, que vous aidez les… gens comme nous à quitter cette ville. C’est vrai n’est-ce pas ?

Pendant un court instant, elle eut un doute. Et si c’était un piège ? Et si ce type était en fait un flic ? Un fédéral ? Elle crut percevoir des sirènes au loin, chimères de son esprit malade qu’elle dut chasser avec force. S’il cherchait à la malmener, ou à l’entuber, elle le tuerait.

- Et combien ça coute ? Parce que ça a un prix, un service pareil a forcément un prix.

Son ventre ponctua la faim de sa phrase, grognant comme une créature sauvage réfugiée dans son estomac. Eve se détestait déjà d’en arriver là, mais ça devenait irrésistible :

- Et… vous n’auriez pas quelque chose à manger s’il vous plait ? N’importe quoi…

Aden à son tour subit une transformation, à ce qui devait être la fauchause mais un évênement bizarre se fit un instant avec des trucs bizarres. Soit cet enfant avait un pouvoir étrange soit c'était la maison. En tout les cas ça n'empêcha pas Liam de critiquer. Un homme arriva alors dans la pièce, tout propre.
Un peu plus et Jonh se serait cru dans un feuilleton américain hautement ridicule entre leur costume et Liam le travesti qui tenait à draguer le passeur. Personnellement la nouvelle personnalité du taulard était presque effrayante tellement elle était navrante...Comment passer de quelqu'un qui voyait en face de ses yeux à une naïveté aussi grandilotesque. Surtout que Blackberry avait un regard insondable et ce sourire collé au visage dont il était impossible de déchiffrer si c'était un bon ou un mauvais présage. En tout les cas si cette situation l'amusait c'était tant mieux pour lui.

Le dépressif était resté debout non loin tandis que les autres s'était assis sur les fauteuils comme gentiment proposé par leur hôte et Liamette n'avait pas arrêté de babiller faisaient lever les yeux au ciel de Jonh qui aurait volontiers voulu l'assommer mais étant donné que sans nul doute il se souviendrait de ça le dépressif se retint de lui en mettre une. Peut être que le passeur était homosexuelle ou que le fait d'avoir un spectacle aussi farfelue serait leur porte de sortie...Mais pour le moment il y en avait un qui en prenait pour son image.
Eve profita d'un moment de répit pour poser les question qu'il fallait et demander à manger par la même occasion. C'est vrai qu'il ne venait pas d'atterrir ici comparé à Liam et au dépressif, qui dans un autre monde dormait dans un lit après s'être rassasié et lavé.

Pourquoi est ce qu'il était revenu là franchement...? Se retrouver avec un type qui le détestait, une femme complètement folle et un ancien taulard qui n'en menait pas large. Et maintenant il y avait aussi un enfant qui semblait avoir quelque soucis mental...Bon ce dernier c'était Jonh qui l'avait prit dans ses bras ce qui était totalement normal de ne pas laisser un pauvre petit au main de la police Elipsienne...
Jonh ne rajouta rien de toute façon son super costume du jour l'excluait un peu du groupe et il ne tenait pas à finir en rondelle.

Des voyageurs hein ? Et pas seulement un ou deux, mais cinq ce qui représentait un joli pactole. Depuis la nuit sanglante Blackberry n’avait pas eu beaucoup d’affaires à mener et l’exil avait fini par réduire son commerce à néant mais voir ce groupe conséquent lui rendait de l’espoir quant à l’avenir de son compte en banque. Il se contenta de les observer un moment dans leurs costumes ridicules, babillant et se lançant des piques comme des enfants dans la cours de récrée.  Et si l’homme princesse était totalement déconnecté, la femme aux lunettes étranges avait les pieds sur terre. Bien sûr que tout avait un prix.

Le passeur forma un trois avec les doigts de sa main droite qu’il accompagna d’un sourire commercial, engageant et complètement faux. Ses yeux noisette brillaient d’une lueur maligne, comme un vieux singe connaissant déjà tous les tours possibles. Sa gouvernante âgée entra alors dans la pièce pour déposer tasses et soucoupes sur la table basse ainsi qu’une énorme théière au ventre rebondie qui dégageait un délicieux fumet. Une fois qu’ils furent tous servis Blackberry se décida à ouvrir la bouche pour accompagner son geste de la main.

- Trois cent rubz par tête. C’est raisonnable non ?

Vu la tête de certains ils ne devaient pas tous avoir de quoi payer, il ajouta donc d’un air complaisant :

- Mais je pourrais faire un geste éventuellement, vous sortir d’ici gratuitement si vous le désirez. Après un diner, conclut-il avec humour à l’adresse de Liam.

Trois cent rubz ou rien du tout, comme si on leur proposait de participer ou non à une œuvre de charité. Rien dans son apparence lisse ne laissait penser à un coup fourré, mais rien n’invitait à la confiance non plus. C’était comme se retrouver devant le sourire du chat du Cheshire…

- Mais j’en oublie mes manières. Je m’appelle Garet Blackberry et je suis un passeur, le seul d’Elipse en réalité. Et vous êtes ?

Le charme qui émanait de cet homme d’à peine trente ans était puissant, magnétique. Peu nombreuses auraient été les femmes à résister à cette attraction animale. Il attrapa avec délicatesse sa tasse de thé et y trempa les lèvres en plissant les yeux de satisfaction. Il était excellent, comme d’habitude. Shamie était une crème en cuisine.

Une fois qu’il eut reposé le récipient de porcelaine Garet leva ses iris noisette vers Eve pour répondre à sa demande de pitance après un rire léger. Les voyageurs étaient si drôles… il fallait toujours leur donner, encore et encore et qu’offraient-il en retour ? Rien du tout. Bien belle moralité que celle de leur monde, il aurait été certain qu’une visite y aurait été instructive.

- Je vous offrirais déjà un thé, mais je ne crains que mon frigo soit vide. Nous achetons nos courses au jour le jour pour éviter d’attirer les rats. Ces vermines infestent littéralement le bâtiment, une vraie plaie ! Vous me voyez navré de ne pouvoir vous aider.

Navré ? Pas le moins du monde. Mais ce n’était pas demain la veille qu’il prendrait en pitié des inconnus en leur offrant la charité. Ce n’était pas avec ce genre de politique qu’on se remplissait les poches.

Au début Blatte-berry l’ignorait et Eve la moche faisait son intéressante et ça ne lui plaisait pas, mais pas du tout ! Heureusement son prince finit par tourner les yeux vers lui pour accepter son dîner. O joie ! O félicité ! Liam bondit de son fauteuil comme s’il avait été monté sur ressorts dans un cri hystérique avant de se rasseoir le visage empourpré par la gêne. Il avait eu un rendez-vous ! Prendre les devants payait toujours, surtout quand on était aussi joli que lui !

Il passa les minutes qui suivirent à se tortiller sur sa chaise en minaudant, buvant son thé par petite gorgée comme une femme de la haute en tentant de se donner un port altier. N’est pas princesse qui veut après tout ! Son esprit futile tentait aussi de se focaliser sur la conversation mais il fallait avouer que les choses le dépassaient. 300 rubz ou rien du tout, c’était bien évident qu’ils choisiraient de ne rien payer, n’est-ce pas ? Surtout que les nouveaux comme Eve et Aden ne devaient pas avoir un sou en poche.

Néanmoins le charme du passeur associé à la présence de rats dans son appartement fit vibrer la corde sensible du petit cœur gonflé d’amour du tueur. Une dame devait aider les gens dans le besoin, tendre la main… ou l’autre joue il ne savait plus trop. Faire un geste en tout cas. Et si pour ça il fallait retrousser ses manches et se salir les mains soit, il le ferait au nom du grand amour. Ainsi était la puissance de la détermination d’une princesse passionnée.

- Garet vous en faites trop, vraiment ! Je me sentirais mal d’être une source quelconque de dérangement ! Je… je travaillerais pour vous rembourser s’il le faut, j’époussetterais vos bibelots, dénoyauterais des abricots, ferais serveuse dans un bistrot… n’importe quoi.

Il se pencha en avant pour mettre en valeur une poitrine inexistante tout en laissant distraitement ses doigts courir sur la table basse qui se para aussitôt d’une couleur rose bonbon pimpante et de nœuds assortis. Ce spectacle fit germer une idée dans la tête du taulard qui ajouta dans la précipitation.

- Je pourrais aussi décorer votre intérieur ! Lui donner des tons pastels cher à mon cœur… oh ce serait tellement charmant. Vous laisserez vous tenter ? Hihihi…hihi !

Ses yeux papillonnèrent dans une mimique écœurante, ses mains jointes sur sa poitrine en une prière muette. Si seulement ses camarades laids y mettaient du leur ! Mais non, ils restaient là en silence ou pire : mendiaient ! Le regard courroucé de Liam glissa vers la taularde qui manquait décidément de manière. Ses parents ne lui avaient donc pas appris que c’était mal de réclamer ? Surtout à un homme charmant et pauvre ! Quelle malotrue !

Liam se rapprocha de sa partenaire de jambes en l’air pour lui souffler d’un ton offusqué, sa main cachant sa bouche pour ne pas qu’on puisse lire sur ses lèvres alors que son murmure était bien assez fort pour que tout le monde l’entende parfaitement.

- Tu n’as pas honte ? En plus tu vas devenir encore plus grosse et tu ne pourras plus rentrer dans tes vêtements. Ils sont laids donc ce ne serait pas un mal mais quand même ! Des leçons de savoir-vivre ne te feraient pas de mal.

Il marqua une pause après quoi il ajouta un ton en-dessous :

- Et c’est chasse gardé hein ! Ce bel Apollon m’est destiné ! Je suis sûr d’avoir trouvé mon âme sœur… olala on ferait un siiiii joli couple !

S’ensuivit une série de gloussement insupportable à en donner l’envie de lui coincer la tête dans une porte d’ascenseur. Une bonne dizaine de fois pour faire bonne mesure.

Malgré le charme certain qui émanait de Blackberry, l’énonciation du prix ne la fit ni sourire, ni minauder comme ne pouvait s’empêcher de le faire Liam. D'ailleurs, si elle avait eu un revolver, elle lui aurait collé une balle entre les deux yeux, histoire qu’il cesse son manège, et vite de préférence. Vint alors la proposition de sortir gratuitement, qui était encore plus ridicule que la première condition était irréalisable. Évidement, ça arrivait tous les jours les gens, surtout pour un service aussi risqué, qui acceptaient de complètement renoncer au prix fixé pour se tourner aussi facilement vers le bénévolat. Même sans connaitre le milieu des manigances illégales, il fallait être un abruti congénital pour ne pas voir là un piège, une grosse entourloupe dans laquelle la russo-américaine espérait voir ses compagnons tomber… au moins, elle serait tranquille.

Malheureusement, le taulard rétorqua, et en rime, qu’il était prêt à travailler pour payer son droit de passage. Sans doute que sous cette forme, sa stupidité extrême équivalait à du génie, mais la jeune femme n’eut pas d’autres réactions que de le dévisager de son regard froid. Affligeant. Quoiqu’il en soit, leur hôte refusait visiblement de lui offrir de quoi manger, malgré son ventre qui hurlait comme une bête sauvage. Qu’importe que son excuse soit valable ou pas, bien évidemment qu’elle se détestait de mendier, mais c’était réellement insoutenable.

Quoiqu’il en soit, aussi parfait était le charisme de ce passeur, il n’inspirait pas grande confiance à la détenue. Et quand elle n’avait pas confiance, elle se refusait à donner son nom – qui sait ce qu’il pourrait en faire – et se contenta de rétorquer à la courtoise demande de présentation de Blackberry :

- Je ne suis qu’une voyageuse qui veut sortir de cet enfer, et vous êtes le seul à pouvoir me dire comment faire.

Voilà que la princesse aux poils de torse se penchait vers elle pour lui faire la morale désormais. Malheureusement, celle-ci ne pouvait pas profiter des prunelles meurtrières de la taularde bien cachées derrière les lunettes ridicules de son masque de croque-mitaine. A la réservation de « l’apollon », un tic nerveux étira légèrement un coin des lèvres d’Eve alors qu’elle rétorquait :

- Crétin.

Sa batte la démangeait, mais elle en oubliait presque la proposition du passeur. Sortir gratuitement ? Bien sûr, il aurait habité ailleurs que dans ce quartier pourri, l’air de banquier distingué en moins, et la tentative de raquette laissée au placard, elle aurait pu mordre à l’hameçon. Aurait pu, mais de façon générale, elle détestait qu’on lui rende un service pour rien. En prison, les services étaient monnayables, ils avaient une valeur marchande, et pouvait parfois se vendre très cher. La russo-américaine le savait, et cinq ans de taule avait tant bien que mal enfoncé les ressorts du système carcéral dans son crâne, de sorte qu’elle ne pouvait pas admettre que le monde fonctionne différemment. Ce serait faux de toute manière. Personne ne fait rien pour rien, sauf les rares ébahis qui se donnent corps et âme dans l’amour du Christ. Lamentable.

- Je ne crois pas à ce qui est gratuit, je ne suis pas née de la dernière pluie. Je n’ai pas de quoi payer mais… je peux toujours travailler.

Voilà qu’elle aussi faisait des rimes sans le vouloir. Entre le costume et ça, ça n’était vraiment pas son jour niveau crédibilité. A défaut d’avoir quelque chose à manger, elle ne put s’empêcher de se servir une tasse de thé qu’elle porta à ses lèvres pour boire avidement le liquide. Rien ; ça ne servait à rien dans l’anesthésie de sa faim dévorante, et malencontreusement, ses dents inhumaines broyèrent le rebord de l’objet en porcelaine. Les débris qu’elle recueillit au creux de sa main étaient teintés de sang, elle s’était coupé la commissure des lèvres par inadvertance. Eve reposa sa tasse et – faute de mieux – les morceaux brisés à l’intérieur.

- Désolé, reprit-elle en croisant les bras, vous n’avez qu’à mettre ça sur ma note. Vous avez sûrement des petites affaires à confier à des gens comme nous non ? Quelque chose qui paierait ma sortie en bonne et due forme.

Elle passa la langue sur sa blessure, suscitant un picotement désagréable et regardait leur hôte fixement avec toute la force de ses prunelles inexpressives. Ce dernier ne devait malheureusement voir que les globes désorientés de son masque.

- Trois cents...et pourquoi notre sang aussi pendant tu y es bon sang...

Murmura Jonh dans sa barbe, qu'il n'avait pas.
Cet homme n'était vraiment pas rassurant, même de "loin". Jonh n'avait aucune envie de lui donner de l'argent sans aucune garantie qu'il exécute son obligation. Même pas sur qu'ici les contrats existant et soient obligatoires...Trois cent rubz en plus...Certes Jonh les avaient en sa possession et même un peu plus que le double mais dans un monde inconnu avoir de l'argent sur soi était toujours utile...Alors se faire avoir par un type aussi douteux non vraiment c'était pas la peine. Seul Liamette ne semblait pas soupçonneuse, en même temps "elle" était littéralement aux pieds de leur hôte...Seule Eve marquait des réticences et encore plus, tout comme le dépressif face à la déclaration de Blackberry d'un service gratuit. Pour se payer un endroit aussi luxueux parmi ce taudis il devait pas avoir laisser beaucoup d'actions gratuites dans sa vie...

- Mais que j'ai bien pu faire pour être dans cette galère...

Et voilà qu'il se mettait à parler à lui même...deux fois en plus...Preuve qu'il commençait légèrement à délirer.Bref.
Quant à leur noms...pour en faire quoi ? Les dénoncer en échange d'une somme d'argent ? ce genre de personne était tout à fait capable de les trahir dans leur dos. Peut être Jonh commençait il à être paranoïaque à présent mais cette ville, était vraiment le mal...Si au moins Liam avait toute sa tête ça enlèverait une épine du pied déjà plutôt que de l''entendre glousser stupidement et...déclarer que cet homme était son âme soeur...Il y avait de quoi se cogner la tête contre le mur et pas que la sienne.
Une idée germa alors dans l'esprit de Jonh, qui semblait tut à fait sans aucun intérêt au premier abord et puis après tout ça pouvait toujours servir de chantage ou pas si Blackberry n'avait rien à cacher.
Le dépressif s'approcha de la table tandis que Eve cassait sa tasse sans faire exprès en buvant son thé. Jonh posa alors sa main sur Blackberry tout en demandant pour ne pas paraitre suspect :

- Et qu'est ce qui nous dit que vous allez pas nous fausser compagnie ?

Des images affluèrent alors son esprit d'un épisode particuliers de la vie de leur hôte.

Ils étaient tous mal élevés et infects ! Et cette moche qui mangeait les tasses maintenant… tous ces mots et ces gestes déplacés soulevaient d’indignation le cœur sensible de la magicienne du rose qu’il était devenu. Mais le pire était peut-être le fait qu’on l’ignore et pire, qu’on le rabaisse. Il voyait bien ces regards biaiseux qui le jugeaient, ces insultes lâchées dans un souffle… croyaient-ils qu’il était aveugle et sourd ??

- Vous êtes tous des idiots ! s’écria-t-il en se levant d’un bond.

Son visage était baigné de larme, qu’il essuya d’un geste de la main dans un reniflement penaud après quoi il trotta vers la porte menant au vestibule. Dans sa course pathétique Liam touchait meubles, lampes et éléments de décoration qui se teintaient aussitôt de rose bonbon. Une fois qu’il eut atteint la porte il la claqua dans son dos avant de s’y appuyer pour pleurer tout son saoul.

Ils étaient vraiment tous cruels, et dire qu’il avait même essayé de leur rendre service en leur donnant une meilleure apparence ! Qu’il les avait conseillé ! Et c’est comme ça qu’on le remerciait, en le faisant pleurer quitte à faire couler son si joli maquillage…

- Ils sont… trop… tro…op méchants ! Et mon amour qu…qui ne me… défend même pas ! AaaaaaAh ! C’est trop injuste !

Son poing frappa rageusement le panneau de bois alors que ses pleurs redoublaient. Bruyant, gênant, stupide, il entendait déjà leurs insultes résonner dans son crâne. Ils n’avaient aucun goût tous autant qu’ils étaient ! Le taulard attrapa un coin de son jupon qu’il déchira soigneusement pour s’y moucher dans un bruit de corne de brume. Une fois que ce fut fait il prit une profonde inspiration et sécha ses yeux rougis pour se donner du courage. Impossible de se laisser abattre si facilement. Il n’était pas n’importe qui, il était une princesse de sang royal qui se devait de faire face à l’adversité.

Liam qui avait glissé jusqu’au sol pendant sa crise se remit debout, vacillant sur ses talons roses pétant. Il allait revenir grandit, et tous leur prouver qu’il valait mieux qu’eux ! Tête haute ma fille, bombe le torse et soit fière de ton rang !

C’est avec majesté –ou ce qui voulait l’être- qu’il ouvrit grand la porte pour pénétrer de nouveau dans le salon. Il affronta les regards blasés ou amusés avec une dignité de surface tandis que sa fierté royale était piquée au vif. Le tueur pointa Eve du doigt avant de lâcher :

- Toi, ne fais pas comme si tu avais des idées originales. C’est moi qui ai proposé de nous rendre utiles alors la prochaine fois tais-toi sale copieuse ! Tu voles mes idées, tu veux voler mon homme… tu devrais avoir honte de toi ! Tu n’es pas du tout belle à l’intérieur !

Liam obliqua ensuite vers Jonh qui avait osé insinué que l’homme de sa vie pouvait vouloir les tromper. Pire : il lui touchait la main !

- Et toi, comment peux-tu ?? Garet est bien évidemment un homme de confiance ! Tu devrais lui être reconnaissant de bien vouloir nous prêter main forte ! Et c’est vraiment de mauvais goût de te jeter sur lui comme ça, tu n’as donc aucune manière ??

L’hôpital qui se fout de la charité. Néanmoins Liam-princesse avait réussi son but qui était de devenir au moins l’espace de quelques instants le centre d’intérêt. Sa dernière étape fut de se pencher vers Blackberry pour lui tendre avec une grâce calculée sa grande paluche comme pour inviter à un baisemain. Il effectua une petite révérence avant de minauder :

- Au fait, je m’appelle Liam. Liam Baldwin. Enchantée de faire votre connaissance… hihihi hihi !

Un son de clochette résonna soudain dans le salon pour délivrer à chacun un calendrier de l’avent. Celui du violeur lui livra trois cadeaux avant de disparaitre comme par magie, ce qui le laissa surpris et charmé. Il battit des mains pour montrer sa joie avant de s’exclamer en sautillant :

- C’est génial ! C’est magique ! Un calendrier de l’avent qui apparait comme ça, pouf ! Ca veut dire que c’est noël ? On aura encore des cadeaux ?? Joyeux noël !

Il fallait reconnaitre que pour cette fois, le type fade et terne qui accompagnait Liam n’avait pas tord. Et si Garet leur faussait compagnie ? Si tout ce plan n’était qu’une vaste arnaque destinée à dépouiller les voyageurs, voire à les livrer aux autorités ? Dans ce genre de cas, la russo-américaine avait une solution bien à elle. S’il s’avérait que Blackberry n’honorait pas sa part du marché alors qu’elle avait fournissait une contrepartie, elle le retrouverait et le tuerait. Qu’importe ce que cela implique. Néanmoins, l’exclamation de Liam-princesse interrompit toute discussion : ils étaient tous des idiots ? Il s’était bien regardé ? En plus de le rendre affreusement ridicule, son costume rose-bonbon avaient réduit l’ensemble des neurones de son cerveaux à l’unité symbolique.

- Bon débarras, souffla la détenue lorsque le doyen de leur groupe s’en fut allé vers le vestibule en propageant sa magie sur les meubles de leur hôte.

Un grognement de son ventre ponctua ses dires. Cette faim étrange était vraiment pire que douloureuse. D’une main tremblante, elle utilisa la tasse de l’hypersexuel pour se resservir à boire et prit soin cette fois de ne pas la briser avec ses dents qui semblaient différentes d’à l’accoutumée. Rien n’y faisait pourtant, l’appétit de son état temporaire de croque-mitaine était plus fort que tout, et il fallut le retour de la princesse poilue pour que la taularde puisse s’empêcher de réclamer à nouveau de quoi manger.

Les accusations absurdes de Liam firent déborder le vase. Son comportement était vraiment pire qu’insupportable, et il y avait de fortes chances que s’il tapait sur le système de son acolyte au nuage, il risquait d’agacer Blackberry. Eve ne tenait pas à ce que la perspective d’une sortie de cette ville de détraqués lui échappe parce que l’un de ses… compagnons temporaires était bloqué sur le mode « lolita débile », fut-ce à cause d’une magie irrésistible.

La russo-américaine s’était levée, mais le concernée ne l’avait pas vu, il continuait son manège écœurant de séduction qui outrepassait les bornes du ridicule. Un calendrier de l’avent apparut pour elle aussi, dansant dans les airs devant son nez pour lui délivrer trois cadeaux qu’elle jeta sur son fauteuil sans les regarder. Ses yeux froids étaient, au travers de son masque loufoque, rivés sur le violeur. Alors que celui-ci s’extasiait de ses nouvelles acquisitions, la droite que lui envoya la taularde s’écrasa lourdement sur ses mâchoires. Certes, même dans cet état, sa victime restait un homme d’environ 75kg aux os solides, à tels point qu’un élancement de douleur s’était diffusée dans la main de la paranoïaque. Mais ça faisait tellement de bien…

- Tu veux pas la fermer, juste 5 min ?

Elle attrapa sa batte de baseball restée posée contre l’un de ses accoudoirs et la fit claquer dans sa paume gauche. Ça aurait pu paraître injuste, mais n’était-il pas celui qui avait frappé et séquestré une innocente ? Cette fille qu’elle venait d’extirper des griffes d’un premier bourreau, pour la voir tomber sous les coups d’un second. Cet ancien taulard méritait qu’elle le rosse de toute façon, et la démence nourrissait cet envie en coulant dans son sang pour irriguer ses fonctions cérébrales.

- Et si tu recommences à emmerder le monde, c’est avec ça que j’te fais taire, vu ?

Et sans le quitter des yeux, rien que pour se moquer de ses derniers agissement, Eve ironisa avec son inexpression habituelle :

- Mais joyeux Noël.

- Je ne tolèrerais pas d’actes violents chez moi. Recommencez une fois, une seule, et vous pourrez faire une croix sur un accord de quelque nature que ce soit.

La voix de Blackberry avait résonné dans le salon de son habituel ton aimable et engageant mais ses yeux, eux, ne souriaient pas. Il détestait ce genre de personnes faibles qui ne pouvaient parler que par la violence, incapable d’aligner deux arguments ou de faire preuve de patience. Juste des brutes bonnes à être vendues. L’homme en robe souffrirait déjà bien assez de honte lorsqu’il retrouverait son apparence, il n’avait pas besoin de se voir infliger des blessures physiques en plus des morales.

- Celle qui « emmerde le monde » si vous me permettez de reprendre l’expression, c’est vous. Que quelqu’un d’aussi ignorant s’exprime me laissera toujours pantois. C’est un costume à effet, un jeu de l’esprit d’Halloween. Vous pourrez le frapper encore et encore que ça ne lui permettra pas de changer. Seul le temps le pourra, alors posez votre batte, qu’on puisse discuter entre personnes civilisées.

Le silence pesant qui s’ensuivit ne fut brisé que par le tictac régulier d’une horloge massive situé à un angle de la pièce. Il était évident que leur « hôte » n’admettrait aucune infraction aux règles qu’il venait de fixer. Les enfreindre reviendrait à devoir se trouver une autre porte de sortie qui avait bien peu de chance d’exister.

Le passeur détourna alors les yeux de la détenue pour les déporter sur Jonh dont la main était encore posée sur son avant-bras dénudé. Blackberry n’était pas un voyageur ni un magicien, mais il sentait par pur instinct que cet homme tentait quelque chose. Il ne savait pas quoi, probablement rien de dangereux, après tout ne se sentait-il pas parfaitement normal ? Il le laissa donc faire alors qu’il répondait avec un calme débonnaire :

- Rien, je n’ai ni les moyens ni l’envie de vous prouver que je suis quelqu’un de fiable. C’est vous qui avez besoin de moi et pas l’inverse, je n’ai pas à faire preuve de quoi que ce soit. Vous n’aurez que ma parole, et elle vaut ce qu’elle vaut.

Pendant qu’il parlait des images affluaient dans l’esprit du dépressif, l’image d’un homme qui avait tout perdu. Un Blackberry plus jeune d’une dizaine d’année environ et vêtu de loques, son visage dévasté par la colère et le chagrin. Il se tenait droit devant un bâtiment dont des ouvriers changeaient l’enseigne, il put même apercevoir que l’ancienne était au nom du passeur… puis plus rien

L’homme aux allures de courtier finit par mettre un terme au contact physique qui finissait par être gênant et se resservit une tasse de thé. Il la but sans se presser, remuant de temps à autre le liquide à l’aide d’une petite cuillère en argent qui tintait contre la porcelaine. Ce n’est qu’une fois après avoir fini et s’être assuré qu’Eve avait bien reposé sa batte qu’il reprit la parole.

- Donc vous n’avez pas d’argent mais insistez pour travailler afin de me rembourser ? Pourquoi pas, j’aurais justement quelques tâches à vous confier. Plusieurs personnes me doivent beaucoup d’argent, un argent dont j’ai vraiment besoin à l’heure actuelle. Récupérez-le pour moi et je vous ferais quitter la ville sain et sauf.

Il tira un papier de sa poche sur lequel étaient listé les débiteurs ainsi que les sommes à récupérer. Une petite dizaine de noms s’y trouvaient, une belle masse de travail rien que pour les retrouver. Il tendit le papier à Jonh avec un sourire engageant.

- Vous m’avez l’air d’être la personne la plus sensée de ce groupe, vous serez donc en charge du bon déroulement de cette mission. N’hésitez pas à me faire un rapport envers les gens faisant preuve d’incivilité ou de mauvaise volonté, je n’aurais pas d’intérêt à faire sortir des personnes mauvaises de cette ville. Je compte sur vous.

Il tapota le bras du dépressif avant de sortir de la pièce sans un mot. La discussion était terminée.

Si Jonh était susceptible la palme revenait quand même à Liamette qui était sortit de la pièce comme une fille...ça faisait vraiment peur de voir ça quand même quand on connaissait le vrai Liam...Mais silence qui fut de courte durée car la princesses rose revint à la charge et insinua que Jonh voulait sauter sur le passeur. Ce dernier lança quelque chose d'absolument vrai mais qui semblait ne pas être rentré dans la tête d'Eve quand Jonh lui avait lui même expliquer tout à l'heure. Des cadeaux se mirent alors à fuser dans la pièce et Jonh ne fut pas épargné et reçu un bon de réduction, 30 rubz, une hotte, un bonnet et une écharpe ainsi que...une boule de neige qui chante. Youpi.

Bref,le dépressif avait posé sa main sur leur hôte mais pour une raison différente que celle que Liamette pensait. D'ailleurs son pouvoir fit son effet et un souvenir de Blackberry défila image par image dans l'esprit de Jonh, assez flou mais dans l'ensemble compréhensible. Pauvre homme. Jonh se retint de lui tapoter l'épaule pour lui donner du courage, ça aurait parut suspect néanmoins il avait oublié sa main sur celle de l'autre homme qui la dégagea par lui même.

- Ah pardon

Bon la réponse de Garet n'était pas des plus satisfaisantes mais pourquoi ne serait il pas honnêtes avec ce qui lui était arrivé ? A moins qu'il fasse comme Liam et subir la même chose aux autres...Blackberry revint alors sur la proposition d'Eve de travailler pour lui et ce dernier consistait à aller voir ses clients, ceux qui n'avaient pas payés le passeur. Pour l'instant ça allait mais la suite laissa Jonh pantois...Lui ? Surveiller ses énergumènes ? Les deux prisonniers étaient pire que des gosses...Enfin, il avait pas le choix de toute façon.
Le dépressif regarda la liste que lui avait donné Garet alors que son costume s'envola dans unn tourbillon lui redonnant enfin une apparence plus regardable. Ce fut le même cas pour les deux "gosses" qui commençaient déjà à se chamailler. Est ce qu'il était dans la merde...? Oui. Jonh embarqua ses cadeaux laissant la boule de neige qui serait repérable à des kilomètres et mit le reste das la hotte pour être tranquille. Il suivit ensuite les autres.
Jonh roula des yeux lorsque Liam, redevenu ENFIN lui même, alléluia, le surnomma "papa".

- Exactement alors arrêtez ça et réfléchissons plutôt à qui est ce que l'on va voir en premier

Rétorqua t-il en présentant le papier où étaient écrits dessus le nom des gens, leur adresse et la somme qu'ils devaient une fois dehors.

Han ! Comment ça faisait trop mal !

Liam avait virevolté jusqu’au sol dans un tourbillon de tulle rose pour atterrir pitoyablement sur le sol. Sa main était plaquée sur sa joue rougie alors que ses yeux se remplissaient de larmes et d’incompréhension. Mais qu’est-ce qu’elle avait bien pu faire à cette harpie ?! Et voilà qu’en plus de ça elle la menaçait avec un arme ! Une arme !!

- HIIIIIIIIIIII ! s’écria-t-il en se masquant le visage de ses deux bras.

Il s’était attendu à ce que la furie frappe son beau visage  pour des raisons obscures ou pire, par jalousie ! Mais rien ne se passa. Garet pris la parole et il comprit que son beau prince était venu à son secours en prônant la non-violence. Eve en prenait pour son grade et c’était bien fait ! Le tueur écouta sagement les paroles de l’homme de sa vie et ne tiqua que légèrement lorsqu’il parla de costume. Ce n’était pas un costume, c’était sa robe de tous les jours voyons…

Puis avant que Liam ait pu dire quoi que ce soit le passeur s’était levé et était parti en confiant une grande tâche à Jonh. Il aurait aimé être à sa place, qu’il lui touche aussi le bras, qu’il compte sur lui. Un soupir de déception s’échappa de ses lèvres juste avant qu’une lueur orangée n’apparaisse de nouveau pour tourbillonner autour de lui en lui rendant ses vêtements et sa personnalité. Une bonne dose de honte en prime.

Il avait… vraiment fait ça ? Dit ça ? Il s’était ridiculisé purement et simplement. Penser que c’était la faute d’un esprit farceur ne l’aidait en rien, ça ne faisait que nourrir la colère qui prenait naissance dans le creux de son ventre. Le violeur se remit debout avec lenteur avant de lisser sa chemise, toujours silencieux. Il n’avait pas oublié ce qui s’était passé. Les regards, les coups et les insultes. Il rangea ça soigneusement dans un coin de sa caboche en se promettant de les rendre au centuple dès que l’occasion se présenterait mais pour l’heure il fallait se tenir à carreau.

Le trentenaire se permit juste de susurrer à l’adresse d’Eve en passant à ses côtés pour rejoindre la sortie de l’appartement :

- Même ma fille frappe plus fort. T’es vraiment pitoyable ma pauvre, juste bonne à écarter les cuisses.

La lueur de folie commençait déjà à briller dans les prunelles obscures de celle qui avait partagé son lit mais il l’arrêta aussitôt en faisant non de l’index comme on le faisait pour réprimander un petit enfant.

- Attention ! Pas de violence, papa nous surveille !

Jonh saisit l’occasion pour prendre le rôle de chef en main et lancer le début des opérations alors que le tueur sortait son couteau papillon pour en lécher la lame sans quitter Eve des yeux. Ça ne plaisait pas à Liam de dépendre ainsi du bon vouloir de quelqu’un, il avait toujours haï avoir des supérieurs. Les personnes au-dessus de vous avaient toujours l’habitude d’abuser de leur pouvoir et il en avait déjà bien assez fait l’expérience dans sa jeunesse néanmoins… c’était son élève non ? Et mieux valait que ce soit lui qui tienne les rennes plutôt que cette truie vindicative.

L’ex-taulard jeta un coup d’œil rapide à la liste de noms avant de hausser les épaules. Il n’avait pas la moindre idée de quelle rue se trouvait être la plus proche, alors décider arbitrairement…

- Il nous faut un plan de la ville. Une fois qu’on connaitra leurs emplacements on pourra décider de l’ordre dans lesquels les visiter.

Il se gratta pensivement le bouc juste avant que son calendrier de l’avent n’apparaisse de nouveau pour lui jeter cette fois ci au visage une boule à neige, une hotte et un peu d’argent. Même s’il en avait déjà fait l’expérience une fois ça restait surprenant, mais il prit sur lui en silence avant de fourrer son sac à main et tout le reste de son barda dans la hotte avant de la prendre sur son dos. C’était comme un sac-à-dos assez archaïque mais c’était tout de même rudement pratique.

- Bon, on y va, lâcha-t-il par-dessus son épaule en quittant l’appartement.

>> direction les rues d’Elipse