Vous nous avez manqué... ou pas ?

C’était la pause. La rouquine s’empressa de quitter la boutique pour fuir l’aura oppressante de ses deux comparses, à qui elle n’avait pas adressé la parole de toute la matinée. Malgré toute sa bonne volonté, c’était trop dur à supporter, d’assumer des actes qui n’étaient pas vraiment les siens, mais surtout que ses prétendus « amis » ne croient pas en sa bonne foi, quand elle jurait ne pas connaitre le pouvoir à double tranchant que renfermait sa bague.

Selene finit par s’assoir sur un banc, au bord d’une rue dallée où circulait une foule de dreamlandiens pressés, des familles de touristes, et des gosses externes qui étaient sortis de leur école pour s’acheter à manger. C’était stupide, parce qu’elle ne le connaissait pas, mais la toquée mourrait d’envie d’appeler ce type rencontré dans l’animalerie la veille. Il lui était inconnu jusqu’à son prénom, il apparaissait comme la seule figure amicale qu’elle avait envie de voir à Gloutoniskaia.

Poussant un soupir, la galloise sortit son carnet de son sac et se mit à griffonner quelques épouvantails, histoire de passer le temps. Ils lui tirèrent même un sourire, apaisant comme toujours les remous de la mer tempétueuse qui faisait rage dans son cœur. Elle avait mal, si mal… mais avec ses fidèles amis, ça irait mieux. Toujours. Selene leva la tête pour partir au moment où un hibou s’approchait d’elle pour lui livrer un colis accompagné d’une petite lettre au cachet officiel :

« Merci de votre aide pour empêcher les actes terroristes de Cheddar, veuillez accepter, Mlle Nymphadora, accepter cet appareil très rare en guise de notre reconnaissance. »

Une fois le paquet ouvert, l’adolescente étudia longuement son pistolet à fiente d’un œil interdit. C’était assez particulier comme cadeau de remerciement, mais c’était toujours mieux aux yeux de la jeune toquée qu’une véritable arme à feu, ou autre chose de très dangereux. Elle le déposa soigneusement dans sa hotte et se leva cette fois, prête à retourner à l’animalerie en avance – faute d’avoir faim. Un pas à peine, et voilà qu’un gosse au sourire malicieux lui tendait gentiment un bonbon.

- Tiens ! déclara-t-il d’une petite voix fluette. C’est un Animharibo. J’en veux pas de celui-là, je préfère les chouettes.

Incompréhensive, la galloise tendit lentement la main pour recueillir la petite gélatine en forme d’écureuil. Naïve, ou plutôt ignorant comme les confiseries locales pouvaient être au combien plus réactive que celles du monde réel, elle remercia l’enfant avec un sourire triste et s’éloigna, non sans soupirer une nouvelle fois sous le poids de sa déprime intarissable.

Machinalement, Selene goba le bonbon et dès qu’elle l’eut avalé, l’effet ne se fit pas attendre. Si rapidement qu’elle ne compris pas tout de suite, dans une splendide gerbe de fumée qui n’avait rien à envier aux cartoons, voilà qu’elle se retrouvait changée en écureuil. Son pelage roux flamboyait à la lumière du soleil et même si ses affaires avaient été adaptés à sa transformation – au moins, elle ne les perdrait pas – elle ne put s’empêcher de pousser un couinement effaré en croisant son reflet dans une vitrine.

Les gens paraissaient incroyablement plus grand ainsi, et les distances infiniment plus longues. Comment retrouver l’animalerie sous cette forme ? Elle ne pouvait même plus parler, comme elle s’en rendit compte en essayant d’appeler à l’aide. L’angoisse montait en flèche, appelant à sa transformation habituelle, mais étonnement, alors que la rouquine priait intérieurement pour que son apparence d’épouvantail n’en rajoute pas une couche… son pouvoir resta muet.

Soit, c’était une bonne chose de faite, mais elle demeurait métamorphosée en écureuil, qui plus est au milieu d’une rue où personne ne semblait faire attention à elle plus que cela. Selene Sautilla maladroitement jusqu’à trouver un mini-parc dont les buissons feraient une parfaite cachette, et se recroquevilla sur elle-même, de peur qu’un danger surgisse soudainement dans son halot de retrait. Malheureusement, peut-être parce qu’elle était une voyageuse altérée, ou parce que ce bonbon qu’elle avait mangé était d’une mauvaise série, mais au lieu de duer quelques minutes – comme c’est généralement le cas avec les Animharibo – sa transformation s’éternisa toute la journée.

L’idée de ne pas avoir pu retourner travailler, ou celle de ne plus jamais accepter de truc d’un gosse, même adorable, s’effaçait devant la crainte de rester ainsi à vie. Les heures s’étaient écoulées avec une longueur équivalente à celle de journée entière quand enfin, l’adolescente reprit forme humaine. Personne ne se détourna non plus quand une rouquine jaillit soudainement d’un buisson bien taillé, à croire que les gloutoniskaiens ne se surprenaient plus de rien.

Courbaturée et tremblante, passablement honteuse, la toquée retira de ses cheveux flamboyant les feuilles qui s’y étaient mêlées et s’empressa de quitter le mini-parc. Il lui fallut quelques instants pour se réhabituer aux sensations normales, mais une chose était sûre : elle était perdue désormais.

==== HRP ====

Jake, James, je vais devoir vous rejoindre il parait lol. Donc trouvez moi, ou je vous trouverez plus tard, qu'importe =)

Arriver dans le dos des gens était certes fourbe et vil, mais ça avait au moins un avantage : bien que la phobophobe sembla maîtriser sa surprise, elle était dos au mur et ne tarderait pas à tout avouer au pirate parano’. Enfin justice serait faite ! Et cette fois-ci, les garçons seraient bien obligés d’ouvrir les yeux.

Si Dakota ne répondait pas à la question sur Castiel, Sydney savait qu’il pourrait embrayer sur la question des pleurs ; elle devait choisir le terrain sur lequel jouer, tomber dans un piège ou l’autre : échec et mat.
Elle répéta inutilement la question qu’on lui posait : un signe qui ne trompe pas. On répète toujours la question quand on ne connait pas la réponse… ou qu’on veut se donner du temps pour réfléchir. Aucune réponse réfléchie n’étant honnête et l’ignorance étant inacceptable, le corsaire n’apparut que plus méfiant quant aux révélations qui allaient suivre.

C’était un blague… Ca devait être une blague ! Castiel… avec Mary !? Mais c’était de la pure folie ! Vraiment, pour un chef de groupe, la fillette était bien inconsciente. Savoir qu’elle allait bientôt mourir lui avait carrément fait péter un câble, or ce n’est pas ça qu’on attend d’un vrai chef de groupe. A ce prix-là, Sydney était un candidat tout à fait légitimes aux prochaines élections de leader.

La réponse, bien que complètement ahurissante, comportait encore bien trop de zones d’ombre pour qu’elle convainque le capitaine au bandana que ‘tout va toujours très bien’. Il resta donc dans la même position : bras croisés et l’œil inquisiteur, regardant de haut la phobophobe. Il s’accorda même un haussement de sourcils pour s’éviter de demander directement à ce qu’elle continue. Ca n’était pas à lui de le faire : ou bien elle assumait ses erreurs, ou bien elle ne méritait pour titre que celui de danger public.

Lorsque la phobophobe se leva, Sydney crut à une tentative de fuite ou d’attaque. Aussitôt, il avait porté sa main à sa ceinture pour y trouver le contact réconfortant de son coupe-papier, prêt à l’emploi. Les serpents étaient des bestioles répugnantes qu’il n’apprécierait pas de voir planter leurs crocs dans sa chair. Mais il n’en fut rien et le plaidoyer continua sur un angle bien plus intéressant bien que les arguments soient toujours autant irrecevables, de l’avis du pirate.

- On non, il n’y a aucun problème, vraiment, ironisa-t-il. Laisse-moi résumer : un fantôme tueur accompagne un dangereux cannibale pour… fouiller les poubelles. Moui, ça me semble légitime… Il fit une légère pause avant de reprendre en haussant le ton :
- Tu te fous de moi, là !! J’espère au moins que tu l’as pas envoyé dans ma direction !!

Il lâcha un râle d’exaspération avant de faire quelques pas dans l’espoir de se calmer. La seule chose qui empêchait Sydney de critiquer d’avantage Dakota fut ce qu’elle lui avait dit plus tôt : dans ces circonstances, s’il avait été à la charge du cannibale, il aurait fait la même chose.
Vouloir éloigner le danger de soi était légitime… Mais pas quand le groupe est dispersé on ne sait où ! A croire qu’elle l’avait fait exprès pour que ‘par hasard’ Castiel et Mary tombent sur lui ou encore Jake et James. Que se serait-il passé, dans ce cas-là ? Ils se seraient fait bouffer ! Tout simplement ! Et ça c’était inadmissible.

Mais ça valait la peine d’avoir joué au casse-croûte potentiel : à présent il savait le secret de Dakota et il n’hésiterait pas à faire chantage. Elle jouait selon ses intérêts seulement parce qu’elle avait l’avantage des pouvoirs, ou de l’intelligence, ou quoi que ce soit. Mais cette révélation venait de placer Sydney à un pied d’égalité avec la blondinette. Il avait un joker dans la manche.

Le corsaire revint en face de l’adolescente en arborant cette fois-ci un sourire inquiétant.
- Tu veux que je te dise ? Fais comme tu veux, je m’en fiche. Fomente tes assassinats à loisir, mais mets-toi bien dans le crâne que je prendrai mes précautions. Si je venais à disparaitre ‘comme par hasard’, tu serais aussitôt désignée comme responsable et je ne donne pas cher de votre peau à toi et Castiel.
Il se frotta le bouc avant de poursuivre : Je ne dirai rien aux autres – pour l’instant. Ca n’est pas dans mon intérêt ; tu peux comprendre ça, toi qui a une calculatrice à la place du cerveau. Mais il va falloir que tu te montres coopérative si tu ne veux pas que je dévoile tout ça au grand jour. Et tu sais que j’en suis capable, ça n’est pas très difficile…

Pour l’heure, il n’en tirerait pas grand-chose. Mais c’était comme tout bon vin qui se respecte : ça s’affine avec l’âge !
Si un jour Dakota venait à jouer à la dictatrice en herbe en vue de faire passer le pirate pour un ennemi, il aurait cette carte en main. Mais le proverbe dit : « garde tes amis près de toi et tes ennemis plus près encore ».
Il savait qu’elle savait qu’il savait qu’elle savait. Alors elle ne tenterait rien, et le duo Sydney/Dakota agirait comme s’ils étaient les meilleurs amis du monde. Oui, en effet, à la réflexion : tout allait toujours très bien.

Jake était très fier de son achat et contemplait sa batte avec fierté et puissance. Il savait qu'il était plus puissant et plus fort, même si ce n'était qu'un léger avantage. Sinon James ne paraissait pas porter un quelconque attrait pour les armes, il semblait bien pacifiste, tout le contraire de Jules quoi. Sinon Sydney s'en allait quelque part, fuyait-il? Aucune idée, mais James était toujours là. Il proposa d'aller acheter leurs manteaux. Il parcoururent un petit bout de chemin avant de s'arrêter dans une boutique vendant divers vêtement en tout genre. James s'attarda vers un manteau qui était assez joli. Mais ils allaient quand même dans le village du père noël, que celui-ci soie réel ou non, il allait faire très froid! Il ne savait pas pourquoi, mais il sentait qu'il y était déjà allé, et pour travailler. Était-ce dans un ancien rêve? C'était sûrement ça.

En conséquence, il s'attarda sur un manteau très épais et très résistant au froid, de couleur rouge. Il était assez joli, et il lui irait bien. Ce manteau coûtait 80 rubz sans la réduction, soit 24 rubz avec! Quelle bénédiction ces cadeaux du calendrier de noël! Tout avait été fait pour qu'ils soient bien pourvus. Était-ce un tour du destin qui se montrait favorable? Rien ne pouvait l'affirmer, mais c'était une hypothèse très validable. Ses gants et son bonnet assortis en noir devaient bien aller avec la panoplie du froid. Mais il se demandait si le bonnet allait résister aux cheveux glacés de Jake. D'ailleurs, il allait les avoir TOUT LE TEMPS là bas! Il allait déprimer! Cela fit frissonner Jake l'ardent.

Il alla à la caisse et régla son unique article en présentant les rubz nécessaires et le coupon. Il proposa ensuite à James d'aller voir pou éventuellement chercher de la nourriture. Mais pendant qu'ils marchaient dans la rue à la recherche d'un magasin potable, quelque chose attira l'attention de Jale. Il y avait quelqu'un qui sortait d'un buisson... et ce quelqu'un était... SELENE! Que faisait-elle ici? Pourquoi sortait-elle d'un buisson? Rien qu'à la vue de l'expression du visage de James, cette arrivée soudaine n'était pas trop la bienvenue. Néanmoins l'air paumé de Selene lui fit s'avancer vers elle et engager la conversation.

-Salut! Ça va? On est en train de se préparer pour notre expédition au village du père noël pour récupérer vos ombres. On a eu des infos de la part de maire de cette ville. Trouves toi un manteau bien chaud comme nous et rejoins nous dans ce magasin. fit-il en montrant le magasin de nourriture qu'il venait juste de voir.

Il s'y dirigea, et se demandait s'il fallait faire au plus économique ou au plus pratique. Il fallait combiner les deux au mieux. Mais il fallait surtout prendre à plusieurs, donc savoir ce que les gens aimaient ou pas. C'est comme ça que Jake commença un discours sur ses aliments préférés et détestés.

-J'aime pas vraiment les légumes ... mais j'aime quasiment tous les féculents et toutes les viandes, sauf les organes internes, c'est répugnant. Avec ça on peut se prendre des rations Iophilisées ou des conserves, privilégiant la première issue, car au moins y'aura pas besoin d'ouvre boite, et je m'ouvrirais pas le doigt avec comme une fois! fit-il en montrant une très légère cicatrice sur son annulaire de la main droite.

C'était une blessure totalement idiote, mais Jake en restait assez marqué, car ils avaient dû aller aux urgences car la plaie était profonde. Il avait même eu droit à des points de suture. Six pour être exact. Il fallait avouer que Jake était assez maladroit, voire même franchement pas doué pour certaines choses. Le tout était de savoir si James avait un même avis sur la question des rations à emporter. Combien en prendre, que prendre, etc. L'expédition se préparait lentement, mais sûrement.

Plus Sydney parlait plus le visage de Dakota se fermait, réintégrant son masque inexpressif sur lequel ne persistait en marque de sa précédente faiblesse que ses yeux encore rouges. Le pirate tournait en rond comme un lion en cage, déversant sur elle une diarrhée verbale aux accents paranoïaque plus que visibles. *Ça y est, il est parti !* pensa-t-elle dans un soupir alors qu’elle le suivait d’un regard blasé. Même s’il tombait plutôt juste dans ses déductions ce n’était que l’effet de la chance. Le pauvre homme choisissait forcément la pire des possibilités et une fois n’est pas coutume elle n’était pas loin de la vérité vraie. Néanmoins tant que ses propos ne reposaient sur rien d’autre que des hypothèses et des extrapolations elle ne risquait pas de chuter dans l’opinion publique, quoi qu’il en pense de son côté.

La méduse miniature croisa les bras et soutint le regard du parano’, sa chouette reproduisant son regard par un mimétisme plutôt comique vu la situation. Lorsqu’il eut enfin fini de parler elle leva les yeux au ciel pour montrer son dépit et pointa une direction du doigt.

- Ils sont partis par-là, et il ne risquait pas de vous attaquer vu que Mary était avec lui. Tu ne comprends pas l’anglais ou quoi ?

Une moue méprisante tordit ses lèvres fines alors qu’elle jaugeait celui qui lui faisait face. Il ne prendrait même pas la peine de l’écouter, c’était une certitude. Dans ce genre de situation elle lâchait simplement l’affaire pour se concentrer sur des choses sur lesquelles elle pouvait influer, mais l’air content de lui du rouquin sur sortait par les yeux. Ce n’était pourtant pas humainement possible de se fourvoyer autant ! Croyait-il vraiment l’impressionner avec ce genre de discours ?

- Oh arrête tu veux ? Tu te donnes en spectacle mon pauvre. Je n’ai rien fomenté, j’ai passé un marché avec lui. J’ai pris le temps de lui expliquer où l’on se trouvait et les risques qu’il encourrait, et lui ait proposé ma protection en échange de sa collaboration… et de sa bonne tenue. S’il tente de briser les termes du contrat je m’occuperais de lui. Je n’ai besoin de personne pour m’occuper de mes ennemis, annonça-t-elle d’une voix monocorde qui ne rendait son monologue que plus pesant.

Elle avait mentis, bien sûr, mais dévoiler l’existence d’un accord s’était tout de même révélé nécessaire. Avec la libération de Castiel une raison devait être avancée et la générosité de Dakota aurait été l’excuse la moins crédible de toute l’histoire de l’humanité. Elle s’en tirait plutôt à bon compte, la seule chose qu’on puisse lui reprocher étant d’être un peu trop crédule, voire de trop se reposer sur ses pouvoirs, ce à quoi elle pourrait répondre en disant que ce n’était pas en se méfiant de tous qu’ils avanceraient et qu’elle n’avait pas des années devant elle pour régler ses problèmes actuels. Associé à son instabilité émotionnelle passagère ça passerait comme une lettre à la poste.

Maintenant il fallait passer à autre chose, sinon la discussion tournerait encore autour du même sujet dans deux heures. Impossible de compter sur l’un des autres membres de leur groupe, Dakota saute donc sur la première chose qui lui vint à l’esprit : le voyage imminent. S’ils s’occupaient de la nourriture, elle était pour sa part bien plus intéressée par le moyen d’utiliser les billets qu’on leur avait offert quelques jours plus tôt. Elle piocha dans sa poche celui à son nom et entreprit de lire ce qui y était écrit en petits caractères.


Un sourcil haussé, la blondinette relu le texte une fois, puis deux. C’était vraiment n’importe quoi. Ils se croyaient dans un remix du magicien d’Oz ? Malgré la peur d’avoir peur que tout tourne en eau de boudin, elle claqua trois fois des talons comme demandé juste pour constater que rien n’allait se passer. *Clac clac…clac* Tout d’abord rien ne se passa, les passants continuaient leur chemin autour de Sydney et d’elle comme si de rien n’était et la surdouée ouvrait déjà la bouche pour commenter ces inepties puis…

… une bourrasque de vent violent repoussa ses serpents dans son dos avec une violence inouïe. Dakota leva les yeux pour comprendre ce qui était en train de se passer et resta tétanisée à la vue de la montagne de muscles et d’écailles qui stationnait à une dizaine de mètres de sol grâce à une paire d’ailes puissantes.

- Un dragon… je rêve.

Elle recula de deux pas, interdite, les yeux rivés sur cette absurdité physique. Jamais une bestiole de cette taille, ou même de cette forme n’aurait dû pouvoir voler et pourtant… elle ne pouvait que croire ses yeux. Sur le ventre de la bête était accrochée une cabine qui semblait déjà contenir plusieurs passagers. Avant même de comprendre comment on avait pu croire un seul instant qu’elle monterait à bord de cette chose son billet s’envola et se désagrégea à l’instar de celui de Sydney qui s’était échappé de sa poche comme s’il était mû d’une volonté propre.

Puis ce fut à leur tour de s’envoler lorsqu’un filin lumineux descendit à une vitesse vertigineuse pour s’enrouler autour de leur taille et les hisser à bord, qu’ils le veuillent ou non.

>> Direction les terres gelées (avec Sydney)

Alors que James et Jake marchaient dans la rue, d'ailleurs où était passé Sydney ? Sans doute avait il changé d'avis et c'était tant mieux, une rouquine familière fit son apparition. Ou plus exactement Sélène. Quand un disparaissait un autre réapparaissait. Jake ne sachant pas ce qu'ils s'étaient passés alla expliquer la situation à l'adolescente. James lui resta en retrait au cas où la rousse ai d'autre pulsion de violeuse. Il n'avait pas du tout envie de lui adresser la parole, son action étant encore trop vive dans la mémoire de l'adolescent. Le voyage promettait d'être joyeux vers le village du Père Noël.
Enfin, il fallait bien faire des efforts de cohabitation...pour le moment Sélène devait s'occuper de son manteau et eux de la nourriture. James avait donc suivit Jake à l'intérieur du magasin et ce dernier comme ça à lui citer ce qu'il aimait manger et ce qu'il devrait acheter. Sincèrement l'adolescent n'y connaissait rien mais il lui paraissait logique de ne pas acheter de la nourriture qui périssait ou s'abimait facilement. Une boit de conserve oui pourquoi pas, il pourrait toujours faire apparaitre un ouvre boîte. James n'était pas difficile, il aimait de tout. En même temps il y avait aussi certaines choses qu'il n'avait jamais goûté de sa vie, qui coutait trop cher pour sa famille.

- Ca n'a pas d'importance, on prend ce qu'il y a et qui résiste au froid...des boîtes de conserves c'est bien mais pas de la nourriture qu'on doit réchauffer c'est inutile

James esquissa un petit sourire car depuis tout à l'heure il lui semblait qu'il tirait la tronche et prit Jake par la main après avoir prit un panier afin de mettre leurs achats dedans. Il avait énormément besoin de soutient en ce moment et seul le voyageur qui était présent pouvait le faire. Si Dakota était là elle aurait su elle aussi.
L'adolescent s'arrêta donc dans le rayon où était rangé les conserves et entreprit de remplir le panier.

Selene sursauta lorsque Jake l’accosta pour lui lâcher sur le crâne un flot de parole qu’elle ne comprenait tout simplement pas. Si ça allait ? Mis à part qu’elle venait de passer des heures planquées dans un buisson parce qu’un gosse l’avait changée en écureuil et que de fait, elle avait raté sa dernière journée de travail, ça allait très bien. Si le discours de son ainé demeurait obscur, une chose était claire : visiblement, son ombre disparue se trouverait dans les Terres gelées. Coïncidence avec le fait que ce soit l’endroit où elle se trouvait avant l’étrange renvoie massif des voyageurs ? Sûrement pas, mais elle n’eut pas le temps de poser des questions que le psychotique s’était éloigné avec James. Ce dernier d’ailleurs, n’avait pas même daigné lui adresser la parole, alors qu’elle venait mine de rien de réapparaitre après une demi-journée d’absence non expliquée.

- Salut James, se murmura la toquée pour elle-même une fois de nouveau seule, il ne m’est rien arrivé de spécial ne t’inquiète pas, rien de grave.

La galloise soupira, au bord des larmes, mais se refusa à laisser les digues de ses yeux noisette céder cette fois. Après tout, elle avait déjà son billet pour le pôle nord dreamlandien, qu’est-ce qui l’empêchait de se préparer seule et d’aller retrouver ce qui lui manquait de son coté, comme une grande ? La crainte de tomber face à un danger contre lequel elle ne pourrait rien ? Oui, possible ; c’était une hypothèse qui se tenait.

Suivant les conseils de Jake dans un premier temps, faute de mieux, Selene zieuta les vitrines de la rue marchande jusqu’à trouver une enseigne spécialisée dans le prêt-à-porter et accessoires en tout genre, du local au nordique, du plus banal au magique. Nulle clochette de physiquement visible et pourtant, une petite mélopée se déroula lorsque la rouquine fit irruption dans le magasin où s’entassait des tonnes d’articles différents. Si elle allait réellement prendre la direction des Terres gelées, couvrir ses jambes ne serait pas du luxe ; c’est pourquoi avant de choisir son manteau, elle dénicha une paire de collants en laine noire, qui irait parfaitement avec son short et ses Rangers.

Juste avant qu’elle ne passe à la caisse, une robe de mariée disposée sur un mannequin attira son attention. Un sourire triste étira les lèvres rosées de l’adolescente. Ses grands rêves de mariage lui apparaissaient désormais comme pâles, sans couleur, sans goût, sans réalité. Qui tomberait amoureuse d’une fille qui aimait les épouvantails, qui avait des ennuis à dormir dehors, et qui avait déjà été souillée à deux reprises ? Personne. Personne ne l’aimerait jamais suffisamment pour qu’elle puisse un jour vivre une journée dans une robe pareille. Toutefois, le détail du vêtement, qui n’était pas du tout destiné à ce à quoi on pensait, intéressa Selene. Devenir inconsistante ? Oh ça oui, ça lui serait bien utile. Elle demanda donc à la vendeuse de lui ajouter une Dame Blanche à sa taille, puis sortit après avoir régler en utilisant deux de ses bons de réductions.

Sur le chemin censé la ramener dans la boutique de victuailles indiquée par Jake, la toquée croisa une minuscule enseigne pourtant bien fourni, vendant toutes sortes de fournitures nécessaire à la survie hors de la ville. Forcément intéressée, surtout s’il fallait s’aventurer au pôle nord avec un aller simple, sans s’être fixé de moyen de revenir, la galloise entra et fit cette fois tinter une véritable clochette métallique des plus sommaires. Si elle avait déjà sac, gourde et lampe de poche, elle estima que posséder sa propre carte de Dreamland et une boussole ne serait pas du luxe. D’ailleurs, en détaillant sa map par curiosité, elle prit pleine conscience de l’emplacement des différentes villes qu’elle avait traversé.

Selene acheta également une couverture de survie et un pack de ration pour une semaine, avant de saluer le vendeur de la quarantaine et de se retrouver à l’extérieur. Sa bourse s’était brusquement trouvée plus légère, mais la sensation d’avoir fait de bons choix annula bien vite la peur de se retrouver sans argent. Toutes ses nouvelles acquisitions rangées dans son sac et/ou sa hotte – qui commençait à être lourde – la jeune fille passa une main dans ses cheveux roux en entrant dans la petite supérette où étaient censés l’attendre ses camarades. Elle avait presque retrouvé son sourire, presque, parce qu’apercevoir James lui rappela ô combien il se désintéressait complètement d’elle. Sans doute aurait-elle pu mourir que ça ne les aurait pas empêché de dormir.

Elle marqua une pause à quelques mètres, comme si elle hésitait à les rejoindre, puis elle se rapprocha finalement, avisant toutes les conserves que les garçons avaient embarquées dans leur panier.

- Vous savez, si on part vraiment un certain temps, on vend des rations de survie juste à coté. Ils disent que c’est censés durer une semaine, mais c’est toujours ça, et moins lourd qu’un chargement de boites de conserve.

Elle n’osait tellement pas regarder James que son regard noisette terne fixa Jake tout du long, avant de se détourner par timidité. Rejetant sa chevelure en arrière d’un mouvement de tête, Selene croisa les bras et demanda d’une petite voix qui contrasta avec son intention de paraitre déterminée à avoir plus de réponse.

- Ils donnent aussi des couvertures, et d’autres trucs utiles. Mais j’peux savoir ce que vous as dit le maire exactement ? Qu’est-ce qui nous est arrivé ? Comment on « recolle » nos ombres si on les trouve ? Est-ce que…

Elle n’eut pas le temps de finir sa question, un étrange vertige lui fit perdre le fil de ce qu’elle racontait. La galloise se raccrocha de justesse au bras de son comparse torse nu, mais elle eut une étrange sensation au niveau de son nez. Bientôt perla un filet de sang qu’elle recueillit du bout de ses doigts pâles, incompréhensives :

- Mais… je… wow… je saigne…, murmura-t-elle simplement, confuse.


===== HRP =====

Détail des achats de Selene :

Dame blanche : 280 rubz (400 - 30% ; bon de réduction du calendrier de l'avent)
Manteau : 18 rubz (60 - 70% ; bon de réduction du calendrier de l'avent)
Collants en laine : 10 rubz
Ration de survie : 200 rubz
Couverture de survie : 80 rubz
Carte de Dreamland : 15 rubz
Boussole : 10 rubz

Total : 613 rubz.

Ps : Pour le manteau, je me suis basé sur le prix de celui de Melena qui me semblait être de la même catégorie. Pour les collants, j'ai improvisé aussi. Si quelque chose ne va pas, dis moi Jade, je changerai les montants.

Jake était donc dans le magasin, ne savant pas quoi prendre. Il regardait James remplir son panier, mais il sentit que quelque chose n'allait pas. La répartie des aliments restait aléatoire et on ne pouvait pas vraiment savoir combien de temps ça pouvait durer. Tout cela dérangeait un peu Jake, et il voulut le signaler à James. Jake l'embrasé n'eut même pas le temps de dire tout ce qu'il pensait sur ces provisions sur un ton très gentil, car Selene se ramena avec ses achats et des provisions adaptées et bien mesurées. C'était ça qu'il leur fallait!

-Selene t'as un point! C'est génial! Je pense que ça sera plus adapté à la circonstance. Mais après si t'as pas envie c'est pas grave, c'est pas pour ça qu'on t'aime moins!

Ainsi il déposa un petit bisou sur la joue de James, et alla tout guilleret au magasin d'en face pour aller chercher sa ration pour une semaine. Il régla le tout, ce qui mena à la réduction de sa bourse, mais il fallait quand même manger! Il se demandait si ses compagnons de route étaient prêts, mais ils allaient attendre Sydney et Dakota tout de même. C'est pour ça qu'il se dirigea avec ses camarades vers la place de la mairie pour rejoindre ses autres compagnons de route. Ils marchèrent pendant un court laps de temps et se retrouvèrent sur la place, qui était vide de voyageurs. Sydney, Dakota et Castiel avaient disparus. Ils étaient sûrement en train de préparer leurs affaires de leur côté, c'est pourquoi il s'assit sur un banc à côté de la fontaine.

-On va les attendre un moment, puis si ils ne viennent pas, on se débrouillera.

Jake n'avait pas vraiment envie de prolonger la discussion, car il ne voulait pas qu'on le force trop à parler. Enfin ça dépendait qui voulait se taper la discute. Si c'était Selene, ce serait un flot de paroles prononcées à 10 décibels, et même avec la voix amplifiée, on ne pourait pas l'entendre. Quand à James, il pouvait parler bien sûr, d'ailleurs s'était-il remis du petit bisou? Sachant que James était relativement timide, un peu comme Jake en mode glaçon, il était peut-être encore sous le choc, qui sait. Mais il n'avait pas envie de le regarder, car sinon il savait qu'il resterait plongé dans son regard magnifique.

Ah, l'amour, quelque chose de très nouveau pour le thermoréactif. Il ne savait pas que faire et que dire, même si la température jouait un rôle dans son absence de timidité. Il savait juste que James était beau et mignon, et que tout lui plaisait chez lui. Il sentait que quelque chose de doux et de plaisant émanait de lui. C'était un nouveau type de sensation qu'il expérimentait. Avant ce qu'il croyait être l'amour c'était quand on se sentait attiré par une personne comme ça, mais pas plus. Maintenant il savait qu'il s'était trompé. À chaque fois qu'il regardait James, sont coeur se mettait à battre très fort et à le déstabiliser. C'était une sensation bouleversante, quelque chose de magique en quelque sorte, et il savait maintenant qu'il était en train de fondre devant ce joli petit bout d'homme.

Mais il y avait eu quelque chose avec Selene, sauf que Jake ne savait pas ce qu'elle avait fait clairement, et ça dérangeait, car James, rien qu'en voyant la manière dont il avait réagit en voyant la fille aux épouvantails, on pouvait en déduire que ce n'était pas de la sympathie. Qu'allait-il se passer ensuite? Seul Dieu le savait.

Alors que James remplissait son caddie, Sélène était de retour parmi eux encore une fois avec des achats. Jusque là rien de dérangeant mais la rouquine cassa tout en annonçant qu'un magasin juste à côté était spécialisé dans la nourriture pour voyage dangereux. James fixa la voyageuse comme si elle venait de lui annoncer que la Terre venait de s'arrêter de tourner. En plus de cela maintenant elle se permettait de le tourner en ridicule devant Jake. Même si ce dernier venait de lui dire que ce n'était pas grave en lui déposant un bisou sur la joue. Sous ce geste d'affection les joues de l'adolescent s'étaient enflammés, et pour cacher ses rougeurs il avait entreprit de remettre les boîtes à sa place. Sélène revint sur le sujet de la raison de leur voyage et à vrai dire James n'osait pas lui expliquer, les dire serait avouer les faits et il savait que ça serait la fin de sa résistance. Alors qu'il plaçait la dernière conserve Sélène eut une sorte de malaise et son nez se mit à saigner, signe que elle aussi était frappé par le "virus".
Il n'avait rien sur lui pour stopper le saignement et les gens du magasin ne serait pas ravis de voir du sang sur le sol. Et il fallait avouer que ça l'inquiétait un minimum de voir la joyeuse dans cet état même si il fallait s'y attendre.

- On t'expliquera...c'est lié à ça en tout les cas

Le trio sortie donc du magasin pour se rendre dans la boutique dont avait parlé Sélène. Là dedans James acheta donc sa ration de survie ainsi qu'une couverture de survie même si la rouquine en avait déjà acheté une. On était jamais trop prudent dans ce monde. Une fois tout payé ils retournèrent à l'endroit où ils s'étaient donné rendez vous mais aucune trace de Dakota et de Castiel ni même de Sydney. C'était vraiment étrange et l'adolescent avait un mauvais pressentiment. Pour le moment le mieux était d'expliquer la situation à Sélène, du moins une partie parce que si elle se mettait à paniquer ça pouvait être contagieux.

- Pour ce qu'a dis le maire...en gros...le fait que l'on est plus nos ombres signifient que l'on est incomplet et...notre organisme réagit mal à cause de ça...d'où le fait que tu te sois senti mal et ai saigné du nez tout d'un coup...Encore ça...ça va...

Il se tue un instant ne trouvant pas le courage de prononcer le pire. Ses mains posés sur ses cuisses, l'adolescent serra le vêtement entre ses poings qui s'étaient formés avant de voir qu'une goutte venait de tomber issue de ses yeux.

- On va mourir Sélène...dans trois semaines maximum...

James cacha son visage dans ses mains laissant libre cours à son chagrin.

La réaction de Jake laissa Selene pantoise, malgré toute sa gentillesse. Non seulement il s’était écarté d’un coup alors qu’elle s’agrippait encore à son bras, mais en plus, il avait zappé sa question pour préférer s’exclamer comme un enfant qu’elle avait un point en embrassant James. Dans l’absolu, la rouquine savait bien que ce n’était qu’un petit saignement de nez et donc qu’il n’y avait pas lieu de s’en faire ; mais là, elle avait juste l’impression d’être un fantôme. Et si elle était morte foudroyée, il l’aurait quand même autant ignorée ?

- Lié à quoi ? murmura tristement la galloise quand le psychotique lui eut enfin adressé la parole, mais ce dernier n’ajouta rien et sortit à son tour.

Elle avait l’impression que le sol se dérobait sous ses pieds, que ce gouffre de solitude qu’elle qui était le sien lorsqu’elle vivait encore chez ses parents biologiques venait de la rappeler à lui. Pourquoi tout se passait si mal ? Qu’avait-elle fait ? Le Slavedog millionnaire, Sextus, Liam, puis ce début d’amitié tué dans l’œuf… Dreamland était un véritablement cauchemar, et elle se demandait combien son cœur frêle pourrait encore en supporter avant d’exploser.

Selene en oubliait de presser sa narine pour arrêter le saignement, de sorte que le filet écarlate coula jusque sur ses lèvres rosées, diffusant dans sa bouche des arômes ferreux écœurant. Elle n’avait rien pour s’essuyer mais heureusement, une femme qui passait dans le rayon eut la bonté de lui tendre un mouchoir du bout des doigts. Ses remerciements, pourtant sincères, furent dits d’une si petite voix que la toquée n’était pas certaine que la concernée ait entendu.

Une fois à l’extérieur, elle gardait la tête baissée, ses yeux ternes flirtant avec le sol, sa chevelure cascadant pour dissimuler ses traits. Elle se sentait mal à l’aise de se balader en se pressant une narine ; pourvu que ça passe vite. Acceptant son rôle de fantôme, l’adolescente se fit discrète alors que ses comparses achetaient ce qui leur fallait et les suivit sans un mot lorsqu’ils reprirent la route. Elle supposait que Jake parlait de rejoindre Dakota, Sydney et Alexander ce qui, dans le cas de la phobophobe, n’était pas pour égayer la galloise. Celle-ci voyait déjà venir les remontrances lui reprochant d’avoir disparut, les accusations de tire-au-flanc, le tout sur un ton méprisant qu’elle n’était pas certaine de mériter.

Quand enfin le psychotique lui répondit, elle était si surprise qu’on lui adresse la parole qu’elle ne releva pas la tête tout de suite. Une narine toujours obstruée, Selene ouvrit la bouche sans savoir quoi dire, et la referma. Alors comment ça, elle était incomplète ? Et elle faisait des malaises à cause de ça ? Le pire restait à venir pourtant, et le bouquet final tomba comme un couperet, une guillotine qui venait de lui couper le cerveau en deux. Mourir. Ce simple mot dansait en échos dans son crâne, sans qu’elle ne soit réellement certaine d’en comprendre le sens. Mourir.

James était secoué par une grosse crise de larmes, mais elle n’arrivait pas à bouger, ni à dire quoi que ce soit. De toute façon, elle l’aurait touché qu’il se serait sûrement écarté, n’est-ce pas ?! Tout ça à cause d’une bague maudite qu’elle avait activée sans le vouloir. Mourir. Ça y est, elle se souvenait de ce que ça voulait dire. Comme une bombe à retardement qui libérait un flot glacé dans ses entrailles, la galloise réalisa toute l’ampleur de la nouvelle. Des tremblements gagnaient tout son corps, symbole d’une angoisse viscérale qui appelait à un TOC qu’elle ne pourrait pas retenir, pas cette fois.

Avec des gestes mécaniques, elle s’assit à son tour et récupéra carnet et crayon dans sa hotte. Son nez avait cessé de saigner, mais elle conservait des traces séchées sur sa lèvre supérieure. Ça n’avait pas d’importance, pas plus que les marques poisseuses sur ses doigts. Soumise à ses gestes réflexes, maladifs en réalité, elle dessinait des épouvantails. Encore, encore, avec la frénésie saccadée d’une malade mentale, jusqu’à en couvrir toute une page à une vitesse étonnante. Sans le savoir, elle avait activé son pouvoir apaisant qui toucha Jake et James, mais elle restait crispée, son carnet entre les mains, se balançant légèrement d’avant en arrière, comme si elle avait perdu la tête.

Ses yeux noisette sans éclat restaient cloués à ses amis, parce qu’elle avait l’impression que si elle les quittait du regard ne serait qu’une seconde, le réconfort et la lucidité qu’ils lui avaient apporté malgré l’annonce de sa mort s’envoleraient comme une poignée de sable balayée par le vent. Au moins, elle pouvait respirer normalement désormais, et avait retrouvé l’usage de la parole. D’une toute petite voix, altérée par la peur, elle dit :

- Mais on peut retrouver nos ombres hein ? Suffit… suffit d’aller les chercher. J’ai… j’ai un billet pour les Terres gelées ! Toi aussi ?! Je…, elle eut du mal à avaler sa salive tant sa gorge était nouée, je veux pas mourir James, j’ai peur…

Une larme perla et roula sur sa joue pâle. Bien entendu, il n’y avait sûrement aucun réconfort à attendre de la part du jeune garçon qui la détestait désormais, et encore moins du thermoréactif. Fermant les yeux, la toquée pensant fort à son meilleur ami, et celui se matérialisa juste en face d’elle, assez proche pour se pencher et l’enlacer de ses bras squelettique avant que quiconque n’ait le temps de le faire.

- Je suis avec toi Selene, tu le sais… on retrouvera ton ombre, d’accord ? Et tu ne mourras pas.
- Mais si j’y arrive pas, je…
- Tu y arriveras, coupa l’épouvantail en souriant affectueusement de sa bouche tordue, j’en suis sûr.

Elle se tut alors, isolée dans sa bulle de folie, trouvant le réconfort dans les bras d’un être qui n’existait désormais plus que dans sa tête. Mais comment faire sinon comme ça ? Il était le seul à lui épargner la solitude totale, le seul savait l’aimer toute entière et qui ne la trahirait jamais.

Jake était parti précipitamment, en oubliant quasiment tout, c'est à dire Selene et James. Et maintenant qu'ils étaient assis ensemble, James répondait à sa place aux questions qu'il avait un peu ignoré, mais pas trop. La réaction des deux condamnés fut intense. Tous les deux cédèrent aux larmes, et James un peu plus car Selene avait son épouvantail qu'elle avait matérialisé devant elle. Voir James pleurer comme ça attristait Jake dans toutes ses différentes émotions, et même sous l'effet des flammes, c'était un spectacle dur à voir. Et pour essayer de calmer les choses, et surtout pour ne plus voir James pleurer, car c'était très dur, Jake le prit dans ses bras, et lui fit un câlin pour le réconforter. Il prit bien soin de ne pas le brûler avec ses cheveux, et il pressa son torse nu contre la fine couche de vêtement de James.

Ce contact en était presque charnel, et Jake pouvait sentir le cœur de James battre la chamade, et celui de Jake commença à faire pareil. Ce contact qui avait pour but de réconforter James se transforma en un instant précieux. Mais il ne fallait pas oublier que James pleurait. C'est pourquoi il fallait trouver les mots justes. Jake se mit au niveau de l'oreille de son compagnon, et lui murmura doucement en versant lui aussi quelques larmes:

-On va aller sur ces terres gelées et on va trouver ces ombres, peu importe ce qu'on aura à traverser comme épreuves, on va y arriver, je te le promets!

Ouais, peu importe les sacrifices et les épreuves à endurer, il allait le soutenir jusqu'au bout, car ils allaient trouver une solution, c'était forcé, il ne pouvait pas en être autrement. Il ne pouvait pas s'imaginer comment cela ferait sans lui, car c'était tout simplement inimaginable. Il ne pensa plus qu'à ce moment qu'il partageait encore avec James. Rien d'autre n'existait autour d'eux, rien d'autre. Ils étaient seuls dans ce moment. Mais les larmes étaient plus fortes que tout, et même Jake qui avait ses ardeurs ne pouvait faire autre chose que de pleurer aussi.

Ces larmes se mélangèrent à celles de James, et Jake maintenait encore le contact, car il ne voulait pas être séparé de lui sous aucun prétexte.

-Je peux pas m'imaginer vivre sans toi... chuchota-t-il doucement entre deux larmes.

Combien y'avait t-il de chance qu'ils retrouvent leurs ombres au milieu de la neige, et surtout à retrouver la leur parmi tant d'autres ? Et surtout qui dit que elles les attendaient là bas dans les Terres Gelées tranquillement ? Malgré le pouvoir de Sélène qui apaisait les larmes de James coulaient toujours car il n’effaçait pas les faits. Lorsque Jake prit l'adolescent dans ses bras ce dernier sentit la chaleur dû aux cheveux en flammes du voyageur mais aussi à celle des bras et du corps serré contre lui. Les promesses de Jake était peut être illusoire mais il savait au moins qu'il pouvait compter sur lui. James sentit des larmes qui n'étaient pas les siennes. Jake était en train de pleurer lui aussi, sans doute à cause de l'adolescent qui lui avait fait partagé sa peine. Cela dit les mots que son ami prononça par la suite n'empêcha pas James de rougir jusqu'aux oreilles sur ses joues mouillées par les larmes. Au moins cela eu le mérite de le perturber et d'arrêter de pleurer.

- Euh...je...

Balbutia t-il ne sachant pas trop où se mettre mais néanmoins il était tout de même resté dans les bras de Jake, si réconfortant, en oubliant le fait qu'il était pressé contre un torse nu. Mais là du coup James y repensa et ses joues s’enflammèrent encore plus si possible et il se dégagea doucement de la prise du voyageur, n'osant pas le regarder, trop gêné et timide pour cela. La seule personne qui lui avait dit ces mots là c'était son ancien petit ami...qui aujourd'hui avait disparu, noyé par les eaux. Il n'en avait parlé à personne de ce grand malheur, seulement sa mère et Jules était au courant de la mort du pauvre Max. Enfin, ce n'était pas le moment de penser à ce genre de choses...il fallait positiver oui ! C'est ce que dirait Jules si il était présent. Et puis Dakota ne lâcherait surement pas les bras alors lui aussi il devait se montrer fort.
L'adolescent se mit sur ses pieds et s'approcha de la fontaine d'où coulait une eau transparente. Il tendit les mains et se mouilla le visage pour le rafraichir un peu après avoir énormément pleuré. cela quelque part ça lui avait fait du bien de se libérer. Il retourna ensuite auprès des deux voyageurs et après un moment d'hésitation il embrassa Jake sur la joue.

- Merci...

Il en fit de même pour Sélène, qui était dans le même panier que lui et avait aussi besoin de soutien. C'était décidé, il allait mettre au placard le problème de la bague. C'est donc avec un petit sourire timide envers la rouquine qu'il demanda :

- T'étais passé où, au fait ?

L’adolescente était restée dans les bras de son épouvantail jusqu’à ce que ses larmes sèches. Elle se sentait comme dans son enfance, lorsqu’elle fuyait les violences de son père pour se réfugier contre le piquet de son ami inanimé. C’était un peu pareil quelque part : avant, elle avait peur de son géniteur comme elle a désormais peur de la mort. Mais elle n’avait jamais eu besoin que d’une seule chose pour aller mieux, et cette chose qu’elle pensait perdue était devenue réelle à Dreamland, grâce à ses pouvoirs. Alors que l’épouvantail allait se dissiper, Selene murmura :

- Tu as raison… je vais la trouver. Je sais pas encore comment, mais je trouverai…

Rarement dans sa vie elle s’était sentie si déterminée, comme si une force toute nouvelle venait l’habiter, empiétant sur l’espace envahit par l’anxiété et le pessimisme. On peut faire plein de choses en trois semaines non ? Alors elle devrait réussir, elle avait le temps. Et une fois que son souci d’ombres sera résolu, elle n’aura plus qu’à attendre de se réveiller pour reprendre une vie normale. Ce programme paraissait idyllique, utopique elle le savait, car jamais rien ne sera pareil, mais il avait le mérite de lui donner courage.

Le bisou de James l’a fit sursauté, la tirant de son état intérieur en pleine amélioration. Elle ne s’y attendait pas du tout et malgré la question qu’il lui avait posé, la galloise resta un moment à le fixer, interdite, avant de baisser les yeux en rougissant devant le sourire qui lui était offert. Même si elle avait espéré que l’adolescent se soit inquiété pour elle – ne serait-ce qu’un peu – pendant son absence, elle n’osait pas lui avouer que tout était de la faute d’un môme. Gênée, elle profita de l’eau de la fontaine pour se rincer le visage, afin de gagner du temps, et elle finit par souffler sans regarder le psychotique :

- Tu te moques pas de moi hein ?

Dans l’absolu, cette demande ne changerait rien, parce que s’il la trouvait ridicule, il ne pourrait pas s’empêcher de le penser, même avec toutes les garanties du monde. Selene tritura nerveusement l’une de ses mèches de cheveux roux et finit par confier à mi-voix, osant à peine quelques regards furtifs de ses yeux noisettes :

- J’me baladais juste pour prendre l’air… j’avais pas faim. Et… y’a un petit qui m’a donné un bonbon parce qu’il n’en voulait pas. Comme je savais pas quoi en faire, je l’ai mangé… et il m’a changé en écureuil ! J’ai du rester cachée toute la journée, je savais pas où aller, et je reconnaissais pas le chemin de toute façon.

A la fin de son récit, le rouge montait jusqu’à ses oreilles et elle restait étrangement concentrée sur le bout de ses rangers. Oui elle avait été bête de gouter un aliment qu’elle ne connaissait pas, venant de quelqu’un qu’elle ne connaissait pas, à Dreamland, et à Gloutoniskaïa. Tous les éléments concordaient pour qu’un accident du genre se passe, mais il faut croire qu’elle était trop mal pour y songer convenablement.

- Il ne m’est rien arrivé de grave, ne t’en fais pas…

Selene avait ajouté ceci, peut-être plus pour elle-même que pour son ami. Sans crier gare, les souvenirs de Liam s’étaient imposés, comme des panneaux de signalisations lui rappelant qu’elle n’était qu’une adolescente vulnérable et fragile ; que si cette fois elle avait eut le la chance, peut-être que sa prochaine « absence » aura une explication beaucoup plus sinistre.

Suivant son lugubre fil de pensées liées au taulard, un glaçon descendit dans ses entrailles lorsqu’elle réalisa que lui aussi, était dans le même cas qu’elle et donc qu’il allait devoir aller récupérer son ombre s’il ne voulait pas mourir. Son teint vira de l’écarlate au blême en un temps record. Y avait-il des chances qu’il soit également informé et se rende au village du père Noël en ce moment même ? Impossible de le savoir, mais la crainte qui se glissait sournoisement au travers sa détermination lui fit échapper une complainte que peut-être aucun de ses comparses n’avaient entendu :

- Liam… je ne veux pas le voir… il va encore me…

Elle s’y voyait déjà, de nouveau prisonnière des chaines du trentenaire, trainée comme un pantin qu’il userait jusqu’au bout avant de s’en débarrasser. Pourvu qu’elle ne le croise pas, pourvu que jamais plus elle n’ait à endurer s présence… s’il la violait à nouveau, elle n’y survivrait pas.

James se sépara de Jake pour aller se rincer le visage à la fontaine et reprendre ses esprits. Tout le petit groupe était plus ou moins encore sous l'effet des larmes, et toutes les choses qui se passaient tournaient inlassablement vers la tristesse, émotion qui était tellement horrible en ce moment, car cette tristesse était entre autre liée à la mort. Cette mort n'était pas encore arrivée, mais c'était une promesse de mort si on n'agissait pas vite. D'ailleurs en parlant d'agir vite, Dakota et Sydney ne revenaient toujours pas, et cela allait devenir inquiétant s'il ne revenaient pas dans l'heure.

Jake et Selene se virent gratifiés d'un petit bisou sur la joue de la part de James en tant que remerciement. Ouais il fallait se serrer les coudes, et même James prenait sur sa rancœur envers Selene. Les deux se réconciliaient petit à petit. Selene raconta alors son récit. C'était tellement enfantin, que c'en était touchant. Jake se sentait mieux de savoir que Selene n'avait rien subit de grave, mais le pire restait à venir. En effet, tout allait se jouer dans les 3 semaines. Mais il sentit que Selene commençait à bloquer. Elle parlait d'un certain Liam. Jake avait cru apercevoir ce nom dans le carnet de Sydney, mais cela était très vague, il ne savait même pas si c'était un faux souvenir ou une réalité.

La manière dont Selene parlait de cet homme faisait penser de lui qu'il était un criminel, et qu'il l'avait... oh non, pas Selene! Était-ce cet accident qui avait conduit à la timidité de Selene, ou cela l'avait-elle encore plus dégradée. C'était affreux! Jake se sentait encore plus mal pour Selene que d'habitude. Il alla la soutenir en lui faisant un massage sur les épaules pour la décrisper. Il ne savait pas que faire d'autre et laissa cette tâche à James, qui connaissait mieux Selene que Jake, et qui allait trouver les mots, enfin il espérait que cela soie de la sorte.

Tout ce qui s'était passé dans la vie de tous les voyageurs semblait vraiment désastreux, des cauchemars vivants, des drames, tout était enclin à une folie, partielle ou totale. C'était à peu près la condition mentale de tous les voyageurs qu'il avait rencontré, y compris lui-même, il savait que ses changements comportementaux étaient dignes d'une personne victime de dédoublement de personnalité. Mais dans son cas il y avait toujours le même Jake, mais avec des réactions différentes,et il en avait conscience. Il savait bien qu'il ne ferait pas tout ce qu'il avait fait s'il avait été dans son état "normal". En tout cas cet état ardent lui avait permis de s'approcher un peu plus de James, ce qui n'était pas pour lui déplaire.

James hocha la tête lorsque Sélène lui demanda de ne pas se moquer. Ce n'était pas son genre et puis au moins cela voulait dire qu'il n'était rien arrivé de grave à la rouquine. Cette dernière raconta alors que par un petit accident de bonbon elle s'était retrouvé en écureuil. L'adolescent imagina dans sa tête une Sélène version petit animal roux courant dans la ville et il trouva ça super mignon.

- Han c'est trop chou ! J'aurai aimé voir ça ! Enfin je suis content que tu n'ai pas eu de gros accident pendant ton absence

Même si il en avait voulue à Sélène, au fond il ne souhaitait pas sa mort ni rien d'autre de ce genre. C'était un garçon gentil qui réprimait toute forme de violence même si il avait un meilleur ami qui ne semblait pas partager son avis. Dans ce monde c'était difficile de rester pacifique, mais avec ses pouvoirs il avait le libre choix. La seule fois où il avait dérapé c'était lors de sa promenade dans les plaines où il avait dû poignarder un homme pour sauver son ancien compagnon. En y repensant cela l'effrayait un peu d'avoir fait un tel geste.
Il fut tiré de ses pensées par Sélène qui se mit à parler de Liam. Ce nom lui disait quelque chose...Mais oui c'était le type effrayant avec la petite fille qui avait discuté avec Jules de choses secrètes. Lui non plus n'avait pas envie de le recroiser...Jake s'était redressé pour faire un massage à l'adolescente afin de la détendre.

- Je te protégerai t'en fais pas...!

Il doutait de faire le poids face à cet homme mais savoir qu'il avait fait du mal à la voyageuse le rendait encore plus antipathique. Et si jamais il venait à le rencontrer et que ce Liam fasse du mal à Sélène il ne savait pas si il saurait se contrôler. Ou à n'importe qui d'autres d'ailleurs qui avait prit une place dans sa vie. On ne touchait pas à ses amis. D'ailleurs les autres mettaient du temps à venir ce qui était plutôt inquiétant.

- Ils en mettent du temps...vous croyez qui leur est arrivé quelque chose...?

Savoir que si ça se trouve Dakota avait besoin d'aide le faisait mourir d'inquiétude. Malheureusement il n'avait aucun moyen de la localiser.

Alors que le viol et la maltraitance qu’elle avait subi lui revenait en mémoire comme une chimère cauchemardesque, la dernière des choses dont elle avait besoin était qu’un homme qu’elle connaissait à peine – et qui plus est à moitié nu – lui masse les épaules sans même lui demander si ce contact ne la dérangeait pas. Selene avait d’abord sursauté, brusquement plus tendue qu’un piquet, puis s’était dégagée le plus doucement possible – mais peut-être un peu trop brusquement encore – afin d’échapper à l’emprise se voulant amical qui lui donnait l’impression de lui brûler la peau au fer rouge.

En une fraction de seconde, c’était comme si elle avait sentit de nouveau les mains de Liam l’empoigner avec rudesse. Prise de frissons et de chair de poule, la galloise frictionna ses bras, surveillant du coin de l’œil que Jake ne réessaye pas de la toucher. Il ne pouvait pas savoir, elle ne lui en voulait pas, mais qu’importe. Ce n’était juste pas le moment de se faire tripoter. La promesse de James lui tira soudainement un sincère sourire, qui parut remonter depuis les abysses de sa mine sombre pour éclairer son joli visage. Pas tant qu’elle était certaine que le psychotique puisse battre le taulard si jamais le dilemme se présentait – elle espérait que non – mais le fait qu’il s’engage autant pour elle suffit à chasser tous les nuages emmagasinés la nuit passée.

Ainsi, James ne lui en voulait visiblement plus, du moins, pas assez pour ne pas tenir à elle au point de lui assurer de la protéger. C’était peu au fond, des paroles donc purement du vent jusqu’à preuve des faits, mais ça lui suffisait. Un poids en moins sur sa poitrine fragile, Selene sentit les chaines sombres de Liam défaire leur emprise de sur son esprit. Elle put donc se redresser et passer une main dans ses cheveux flamboyant, avant de répondre aux inquiétudes de son ami avec une moue désolée :

- Je ne sais pas… vous les avez perdu de vue depuis combien de temps ? Mais… s’ils sont avec Dakota, je suppose que ça va ; ils sont peut-être juste un peu en retard.

La toquée n’oubliait pas comme la relation entre elle et la blondinette n’était pas au beau fixe, mais elle ne pouvait pas nier que la benjamine savait se défendre et que sa simple compagnie constituait en soi une protection de qualité. Si jamais quelque choque – ou quelqu’un – de plus fort que la phobophobe s’était soudainement attaqué à cette dernière, ça ne pouvait qu’être lié au marchand de sable et dans ce cas là, ils le sauraient bien assez tôt. La galloise jugea préférable de ne pas faire état de cette hypothèses pessimiste et se tourna vers James pour le regarder. C’était la première fois depuis qu’ils s’étaient retrouvés qu’elle osait le faire vraiment, et si elle n’avait pas remarqué sur Jake, un détail devenait évident sur le voyageur qu’elle appréciait le plus :

- Tu es allé chez le coiffeur non ? demanda-t-elle avec un sourire, c’est cool. Tu crois que je devrais me couper les miens ? Elle attrapa entre ses doigts pâles plusieurs de ses mèches rousses, j’me dis que des cheveux courts seraient plus pratiques pour ici, mais j’ai un peu peur du résultat. Je les ais toujours eu longs.

Bien qu’elle ne fût pas certaine de vouloir réduire drastiquement ses longueurs, l’avis du psychotique comptait pour elle. Selon sa réponse, elle aurait peut-être matière à réfléchir d’ici à ce qu’elle ait retrouvé son ombre, mais pas avant. Tant qu’elle était en danger de mort, elle n’avait pas le cœur à perdre de précieuses minutes pour des expériences capillaires.

Ceci dit, elle commençait à avoir faim, n’ayant rien avalé d’autre que quelques chocolats au matin. Puisqu'elle n'avait rien sous le coude dans l’immédiat, toujours attentive à la réponse de James, elle fouilla dans son sac pour dégoter sa gourde d’où elle tira une bonne rasade d’eau. C’était toujours mieux que rien pour lui remplir l’estomac, le temps de se dégoter un vrai repas.

Jake ne s'attendait pas à une telle réaction de la part de Selene, qui s'était totalement détachée de lui. Éloignement compulsif ou contrôlé? Remémoration d'un évènement passé ou redouter que cela ne se passe comme ça? Jake sentait bien que son massage ne passait pas. Il n'y avait rien qu'il puisse faire en ce moment pour aider Selene. Seul James avait su trouver les mots pour la réconforter. Jake ne trouvait jamais quoi dire, jamais, même dans les situations désespérées. Il avait même été maladroit avec James et Sydney, et même avec Dakota. C'était décourageant de savoir que peu importe ce qu'on faisait ça ne marchait pas.

Après venait le fait que Dakota et Sydney ne revenaient pas. Ils étaient sûrement en train de faire leurs achats de leur côté, ou peut-être en train de régler les formalités du transport. Après tout on n'avait pas vraiment à s'en faire, car peu importe où ils étaient passés, ils arriveraient à se débrouiller, ils étaient grands après tout. Et eux aussi, il ne fallait pas poireauter comme ça. Le tout était de ne pas rester dépendants. Dans cet état, Jake était un peu le leader du groupe si on pouvait l'appeler comme ça, car avec deux timides, on va pas aller très loin si on ne dit rien. Ensuite Selene se posait des questions sur ses cheveux. Personnellement Jake pensait que l'état actuel des cheveux de la rouquine était très bien, voire même parfait, mais après tout la question était posée à James, et pas à lui.

Jake avait quand même envie de répondre, mais il pensait que Selene était encore un peu effrayée de lui, et donc il ne devait pas trop réagir pour des questions de conseil. Il fallait encore renforcer un lien d'amitié assez inexistant. Après tout ils avaient pas mal de temps devant eux pour essayer de sympathiser, et puis ce qui les attendait allait soit renforcer la cohésion du groupe, soit le dissoudre totalement. Le tout était d'éviter la dissolution,car généralement ça se terminait mal pour tout le monde.

-Bon, on va pas les attendre indéfiniment ici. Si jamais ils ont envie qu'on se regroupe Dakota enverra sa chouette pour nous prévenir. Qui sait, peut-être qu'ils sont allés quelque part d'autre, et le départ peut même se faire dans plus de douze heures, donc faudrait pas trop se presser. Je propose qu'on aille voir un film, pour se décompresser, et ça tombe bien vu qu'on a des places gratuites.

Là il y avait deux issues, soit on l’envoyait totalement bouler et il se faisait rejeter pour toujours parce que c'était pas le moment, ce qui avait pas mal de chance d'arriver selon Jake, soit son idée était bien venue. Après tout peu importe ce qu'il allait se passer, le groupe devait rester soudé. Mais Jake redoutait quand même la réaction de ses amis, comme d'habitude.

Voilà ce que tous le monde pensait, si il y avait Dakota alors ça ne pouvait que aller mais non, car la blondinette n'était pas non plus invincible. Il suffisait de se rappeler de l'épisode de la nuit sanglante avec les pieuvres et lorsqu'elle avait été en mode bug après avoir touché Jake. Sa meilleure amie n'était pas une héroïne de bande dessiné.

- Non, quelque chose me dit que ce n'est pas normal...

Dakota n'était pas du genre à rester flâner devant des boutiques même si c'était une fille, encore moins Castiel. Cette longue absence était définitivement étrange. Et Sélène pour changer les idées de James parla de sa coupe de cheveux, se demandant si elle aussi elle devait le faire.

- Tes cheveux sont magnifiques ça serait dommage...mais c'est sur que d'un point de vue pratique pour ne pas les avoir devant les yeux en cas de soucis...enfin tu fais comme tu le sens

Oui, dans un moment autant tragique les voyageurs parlaient capillaires, comme dans film comique à l’humour douteux. Personnellement James n'allait pas souvent chez le coiffeur vu le prix que cela coûtait alors autant en profiter avec ce bon gratuit c'était sur. Une des raisons pour laquelle il était bien mauvais conseil en matière de coiffure. Jake, après s'être fait rejeté par Sélène, le pauvre il avait du le prendre mal, parla en disant que Dakota enverrai sa chouette si elle voulait qu'on se regroupe.

- Mais j'ai déjà donné un point de rendez vous....

Souffla t-il dans un murmure alors que le voyageur proposait alors d'aller voir un film en attendant. Les yeux de l'adolescent fixèrent Jake quelques secondes, pas sur d'avoir bien entendu et se leva, surplombant le jeune homme assis en fronçant les sourcils.

- On va crever et toi tous ce que tu trouves à dire c'est d'aller au ciné ?? Non mais il te manque une case mon pauvre !

Non là c'était définitivement trop, déjà il se permettait des familiarités avec James alors si en plus il faisait des propositions indirectes de rendez vous. Il fallait pas pousser mémé dans les orties. Enfin son meilleur ami ne semblait pas content de ses paroles vu le regard qui lui lançait. Ou qu'il lançait dans le vide d'un point de vue extérieur.

- Vous m'énervez

Jules/James piqua la hotte, autrement dit la déposa sur le sol et fouilla dedans afin de trouver le ticket pour aller à ce satané village.

- Hé arrête pose ça !

Une auto bataille pour récupérer le billet eu lieu devant la fontaine devant les yeux des passants qui se demandaient bien qui était ce fou. Jules finit par repousser violemment James qui se retrouva par terre avant de lire le ticket. Un descriptif du billet était marqué ainsi que comment s'y rendre. Taper trois fois du talon hein ? C'était tellement ridicule que pour cette ville c'était tout à fait possible que ça ne soit pas des conneries. Un sourire en coin, il exécuta les règles, claquant trois fois sur le pavé. Au début il n'y eut rien puis une bourrasque de vent s'éleva. Un dragon apparaissant dans le ciel.

( hrp : je n'ai pas changé d'apparence x) là jules apparaît en mode distinction mais j'agis par ton corps lol)

Le compliment de James eut un effet immédiat : les joues de la rouquine s’empourprèrent et elle baissa les yeux sur ses pieds, incapable de le regarder. Elle bafouilla un « merci, t’es gentil », mais il ne l’avait très certainement pas entendue. Alors que jusqu’à peu elle se sentait le cœur lesté de plomb, elle avait désormais l’impression qu’il était léger, léger… certes, ça ne signifiait rien, d’autant qu’il lui avait bien fait comprendre qu’il n’était pas intéressé par elle ; mais il trouvait ses cheveux magnifiques, dont il la trouvait jolie, non ?

La galloise espérait que son ami ne se rende pas compte de sa gêne, et la diversion fut offerte par Jake, qui proposa d’aller se détendre en regardant un film au cinéma. Le regard sans éclat de Selene se tourna immédiatement vers lui, l’observant avec un léger froncement de sourcils, comme si elle se demandait de quelle planète il provenait. Pas plus de cinq minutes auparavant, ils parlaient encore du fait qu’il fallait retrouver leurs ombres s’ils voulaient éviter de mourir, et voilà que le thermoréactif proposait avec tout le naturel du monde de se faire un ciné, comme s’ils projetaient une virée entre potes.

Les moments où la toquée avait envie de rétorquer quelque chose d’acerbe étaient extrêmement rares mais là, il fallait avouer que leur ainé crevait les plafonds de l’indifférence, de la maladresse, ou de la bêtise. Alors qu’elle ouvrait la bouche pour lui faire sentir qu’elle et James avaient d’autres choses à penser que d’aller tranquillement voir un film, toutefois avec toute la politesse dont elle était capable, l’intervention de Jules la laissa muette. La seconde personnalité du psychotique la rassurait toujours aussi peu et elle avait du mal à admettre que cette fois, elle était totalement d’accord avec cette dernière.

Ça faisait mal au cœur de l’adolescente de voir son ami en pleine crise de folie, mais elle ne savait pas comment l’arrêter. Plusieurs fois, elle avait essayé de lui attraper les mains pour le calmer, mais les gestes brusques et imprévisibles de son comportement dément avaient maintes reprises risqués de lui écraser le nez, alors elle abandonna en se mordant la lèvre inférieure. Son regard inquiet allait et venait de James aux passants, espérant que quelqu'un aurait une solution, mais rien.

Finalement, la mauvaise personnalité l’emporta et appela perfidement un moyen de transport pour les Terres gelées qui se révéla être un dragon énorme sur le ventre duquel était fixée un habitacle clos. Les mains en visière, ses cheveux roux dansant dans les rafales de vent, Selene observa la créature mystique se stabiliser en vol stationnaire, figée par la surprise. Bien entendu, elle était à Dreamland depuis suffisamment longtemps pour ne plus se laisser étonner de rien mais ça… « ça », elle ne s’y attendait pas.

Avant qu’aucun n’ait pu formuler le moindre souhait, les billets respectifs de Jake et de la toquée s’élevèrent également dans les airs et se dissipèrent comme par enchantement, tandis que des filins dorés s’étiraient pour attraper chaque membre du trio par la taille et les attirer vers la cabine. La galloise ne put s’empêcher de pousser un hurlement de surprise alors que le sol s’éloignait de plus en plus, et ne se tut que lorsqu’elle se fût stabilisée à l’intérieur de l’appareil. Les passagers déjà présents la regardaient avec des yeux ronds auxquels elle rendit un regard éberlué profondément sincère. Oui, c’était la première fois qu’elle voyageait en dragon, et après ?!

- Bienvenus à bord du Dra-car, les accosta sans prévenir une hôtesse avec un grand sourire commercial, prenez place je vous prie.

Elle désigna une rangée de trois sièges sur lesquels le trio mal assorti allait devoir s’installer, faute d’avoir la possibilité de redescendre. Se tournant d’abord vers Jake, qu’elle considérait comme responsable de la situation en ayant provoqué la crise de son ami, Selene eut un regard, sinon dur, des plus sérieux, et lui dit avec une assurance qu’elle n’avait que trop rarement :

- Il a raison, commença-t-elle sans oser explicitement citer Jules, on a des choses carrément plus importantes à faire que d’aller au ciné. Est-ce que tu réalises ou bien…

« Ou bien tes flammes te crament le cerveau » voulut terminer la rouquine, mais elle se refusa à se montrer aussi mauvaise. Baissant les yeux, un éclair de souffrance passant dans ses pupilles sans éclat, elle ajouta :

- Et… ne me touche plus… s’il te plait.

Elle se mordit la lèvre, consciente d’être incapable de formuler à voix haute la raison de cette décision qui pouvait paraitre réellement blessante. Se tournant finalement vers son autre comparse, elle osa effleura son bras d’une main fébrile une fraction de seconde pour attirer son attention, puis demanda en espérant réellement avoir à faire à la bonne personnalité :

- Ça va James ?

Bon, c'était décidé, Jake était un gros maladroit, un gros boulet et un gros con. Même ses "amis" le disaient. D'ailleurs en parlant de l'homme dont il s'était rapproché, bah il combattait avec lui même dans un de ses combats qu'on voyait seulement à la télé. Mais Jake n'avait qu'une seule envie, se faire petit, et tout oublier, rester dans son coin, et n'être pas accessible. Son état glacé aurait été tellement pratique! Il le voulait tellement! Comme ça personne n'allait le déranger. Aussitôt souhaité, aussitôt exaucé, les cheveux de Jake passèrent de l'état "flammes" à l'état "givre étendu". En effet il recouvrait non seulement ses cheveux, mais aussi son visage et le haut de son corps à partir de sa clavicule. C'était une sorte de transformation partielle, mais ce n'était qu'une plaque de givre.

Cette transformation spontanée, même s'il faisait une de ces chaleurs, fit Jake se sentir comme s'il faisait un tel froid! C'est comme ça qu'il put rester dans ses pensées, sans à se soucier de ce que les autres faisaient. Il s'était fait sa barrière mentale, et personne n'allait le déranger. Ainsi il ne fut pas surpris quand il se retrouva dans une nacelle qui était accrochée à un dragon. Il prit un siège, toujours dans ses pensées, et ne remarqua pas que l’hôtesse lui délivrait un petit paquet. C'est pourquoi il ne sut pas pour pourquoi il avait un paquet contenant un drapeau de la gay pride, ce drapeau multicolore qui était affiché à pas mal d'endroits de San-Francisco...

Il ne remarqua pas non plus que Selene avait défié sa timidité pour lui dire de ne pas le toucher. Mais elle avait sûrement compris que ce n'était pas la peine de parler à Jake qui était dans un mode gros glaçon, dans le sens où il était froid et qu'il ne parlait pas. Ouais, Jake était totalement absorbé dans ses pensées, essayant de se rappeler des moment joyeux, car il ne se sentait pas bien, un peu comme à chaque fois qu'il pleuvait et que la température baissait, ces jours de pluie où il n'essayait même pas de s’abriter de l'eau, car il restait comme figé. Il ne savait pas vraiment pourquoi, mais certaines fois, il était comme replongé dans ses cauchemars d'enfance. C'était terrifiant.

C'est donc dans cet état totalement figé et de détresse qu'il repensait à ses "compagnons" d'orphelinat qui l'avaient traumatisé. Il ne se rendit même pas compte que son corps se mettait comme par compulsion dans une position foetale et commençait à tanguer d'avant en arrière. C'était un Jake en détresse mentale qui était dans le moyen de transport qui les conduisait au village du père noël.

Il sortit un peu de cette sorte de transe pour regarder le paysage se dérouler devant ses yeux. Ce paysage était tellement beau, même si Jake n'avait pas trop le cœur à s'émerveiller devant une quelconque beauté naturelle. Il ne pouvait pas se mettre de la musique car son état l'empêchait, et en plus la seule musique qu'il avait était tellement joyeuse que ça allait achever de le tuer. Tout lui échappait, même ses pensées fuyaient, ne voulant pas avoir affaire à l'esprit torturé de Jake. Vraiment, ce n'était pas son jour.

Ebahi, James fixait de ses yeux écarquillés l’énorme créature au dessus d'eux. Il n'avait jamais vu de dragons en vrai seulement à la télé ou dans des bandes dessinés et il fallait dire que ça fichait la chair de poule en même temps qu'une certaine fascination chez l'adolescent. Le ticket qu'il tenait dans sa main, d'ailleurs que faisait il là ?, s'évapora en même temps que celui de Sélène et de Jake. Sans leur moindre consentement des fils dorés s'enroulèrent autour de la taille des voyageurs pour les hisser à bord. James se débattait violemment en demandant qu'on le dépose, que Dakota était encore ici mais rien à faire. Il se ravisa lorsque ses yeux tombèrent sur le vide en dessous de lui. Mieux valait arrêter au risque de s'écraser durement sur le sol et de finir en compote.

Une fois à bord de ce qui semblait être une grande cabine comme dans les téléphériques, une hôtesse avec un sourire digne d'une publicité pour les dentifrices vint les accueillir. Ainsi donc il s'agissait d'un Drag-car...logique...Comme si les trois nouveaux avaient réservé leurs places à l'avance des sièges les attendaient gentiment. James prit place non sans se demander comment prévenir Dakota que Jules avait fait appel à un dragon pour aller au village du Père Noël. Cela serait extrêmement compliqué. Perdu dans ses pensées, l'adolescent eut un léger sursaut lorsqu'il sentit quelque chose frôler son bras. Ce n'était que Sélène près de lui qui s'inquiétait de son état. James lui offrit un petit sourire rassurant.

- Ca va...je pensais juste aux autres...enfin à Dakota...je suis désolé pour Jules

James se pinça les lèvres, s'excusant à la place de son meilleur ami qui décidément en faisait toujours à sa tête, agissant par pulsion. L'adolescent regarda Jake qui n'avait pas l'air dans son assiette. En même temps vu les mots durs que l'autre lui avait lancé...Le voyageur tendit le bras et toucha l'autre homme.

- Ne prend pas trop en compte ce qu'il a dit, Jules a juste peur pour moi...

Rassurer de voir que son ami était de nouveau lui-même, Selene répondit timidement à son sourire et rangea ses « bagages » dans l’un des compartiments réservés à cet effet, avant de s’assoir à l’une des place qui leur avait été désignées. Elle préférait laisser James entre elle et le thermoreactif, qu’elle cernait trop peu pour être totalement rassurée en sa compagnie. Au moins, le psychotique semblait le connaitre mieux qu’elle, même si son autre personnalité ne l’appréciait visiblement pas.

Désœuvrée, et espérant faire apparaitre quelque chose à manger, la toquée fit appel à l’un de ses pouvoirs offert par le père Noël. Une fois découverte la nouvelle paire de rangers, ses paupières et ses épaules s’affaissèrent de concert tant elle était dépitée par le résultat. Ce n’était jamais que la deuxième d’affilée qu’elle matérialisait et la troisième qu’elle possédait si on considérait celle qu’elle avait acheté.

- J’vais bientôt pouvoir ouvrir un magasin de chaussures, murmura l’adolescente en se levant pour ranger sa nouvelle acquisition dans son sac bien rempli et en tirer difficilement son livre des castors juniors.

Elle n’avait encore jamais eu l’occasion de le feuilleter, alors c’était le moment. En reposant ses fesses sur son siège, Selene sentit que quelque chose la dérangeait. Surprise, elle fronça les sourcils en se retournant et découvrit une peluche épouvantail, parfaite représentation de son ami d’enfance. Tout y était, jusqu’au chapeau de travers cousu avec finesse. Un sourire d’abord attendri, puis sincèrement rayonnant illumina le visage de la toquée. La ressemblance était si frappante qu’il était évident qu’elle l’avait crée elle-même, sans doute en actionnant un pouvoir inconnu pendant qu’elle tâtonnait pour déclencher celui de Noël.

Il y avait également une aiguille fine assez longue sous sa trouvaille, mais la galloise ne comprit pas pourquoi. Le rapport avec une poupée vaudou ne pouvait pas être fait pour l’heure, alors elle se contenta de ranger la pointe de métal dans une poche de son short. Peut-être avait-elle été égarée là, sans que ce ne soit sa faute, et qui sait si un jour elle n’aurait pas besoin de retoucher ses vêtements ?!

L’adolescente se rassit donc, son livre épais sur les genoux et sa peluche à hauteur du visage pour l’admirer. Elle avait l’impression qu’un doux halo de chaleur se dégageait de son ami, confirmant le calme qui régnait désormais dans son cœur, malgré la récente – très – mauvaise nouvelle que lui avait rapporté James. D’ailleurs, la toquée tourna la tête vers ses comparses masculins, et s’aperçut que Jake semblait être redevenu normal. Pourtant, elle regrettait d’avoir pu se montrer méchante avec lui ; peut-être était-il juste maladroit et la maladresse, ça, elle connaissait.

- Tiens, dit-elle simplement en tendant sa création, un sourire engageant sur son joli visage, je te la prête le temps du voyage si tu veux. Moi, les épouvantails me font me sentir mieux, ça marchera peut-être pour toi ?!

C’était enfantin, innocent, mais ça lui faisait plaisir, surtout lorsque le concerné attrapa son cadeau. Selene espérait qu’il comprenne qu’elle n’avait rien de particulier contre lui – bien qu’elle ne savait pas trop comment interpréter ses réactions. Son sourire s’amenuisa alors que ses yeux ternes glissèrent sur son ami, désormais aux mains de son ainé.

- Ce n’est pas contre toi, quand j’te demande de ne pas me toucher, confia-t-elle à mi-voix, c’est juste que… j’ai un peu de mal avec les… euh…

Elle ne savait pas comment finir sa phrase et le poids de son secret lui écrasait la gorge. Finalement, elle regarda une demi-seconde James, devant qui elle était penchée pour s’adresser à Jake, puis se retira pour s’installer contre le dossier de son siège, les joues rouges. Passant une main nerveuse dans ses cheveux, elle ouvrit son livre des castors juniors pour essayer d’oublier la sensation de honte qui lui collait à la peau. Pas le viol de Liam non, mais la relation sexuelle qu’elle avait eu avec Jonh. Celle-là même qui, même si elle avait été totalement provoquée par les pouvoirs d’Asmodée, trop puissants pour l’adolescente anémiée qu’elle était, avait été amenée par sa faute.

Lire pour nier, pour se cacher derrière un écran de cheveux roux et d’absence intellectuelle, même si l’impression fausse que ses amis la pointaient du doigt comme une catin sans valeur lui donnait presque envie de pleurer. Elle aurait peut-être dut garder son épouvantail finalement, ses humeurs étaient si fragiles ces derniers temps qu’elle en avait constamment besoin, mais elle finirait par se sentir mieux : d’autres choses à penser, et la perspective de récupérer son prêt à la fin du trajet en Dra-car.

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'Super joyeux noël' :

Jake sentit que peu à peu, son état glacial se mettait à disparaître, et que la glace sur son corps fondait pour laisser place à un corps en était normal. Il pris son bonnet pour essuyer le peu d'eau qui résultait de la fusion de la couche de givre. Pourquoi enlever cette eau me direz-vous alors que ça fait sexy? Bah Jake n'avait pas trop le moral. Il rangea son bonnet trempé dans sa hotte et se passa la main dans ses cheveux. Il faisait bon dans la nacelle, c'est pourquoi il remit son sweat à capuche pour ne plus être en mode exhib... Pourtant il se vit gratifié d'un petit contact corporel de la part de James, s'excusant de l'attitude de Jules. Mais bon, en même temps Jake faisait tout le temps des bourdes, et il fallait vivre avec Jules.

Toutes ces actions palpitantes ou pas avaient donné soif à Jake, et comme par hasard une bouteille d'eau apparut devant lui. Il en but quelques gorgées et mis la bouteille remplie aux trois quarts dans sa hotte. Cela faisait du bien de boire un peu, car l'eau faisait toujours réfléchir Jake, c'était bizarre, mais à chaque fois qu'il buvait, il se sentait mieux, et il réfléchissait mieux. Il se demandait pourquoi la séance dans le cabinet du docteur machin chose l'avait menée ici avec ces gens, ces amis. Mais c'était comme ça, et d'ailleurs Selene lui prêta un épouvantail. Sur le coup il ne put s'empêcher de faire des yeux touts ronds car c'était trop mignon. Cela lui mettait un peu de baume au cœur de voir qu'elle pensait à lui.

-Merci beaucoup, il est très joli ce petit épouvantail. J'ai remarqué que tu les aimais bien, c'est vrai qu'ils sont sympathiques!

Vraiment, à trois, James, Jake et Selene, ils formaient une bande d'imprévisibles jeunes gens, et surtout très étranges, mais Jake ne le percevait pas du tout comme ça. Il voyait plutôt le groupe comme des gens assez soudés et avec des personnalités uniques mais similaires dans un sens. C'était sympathique. Tous les trois étaient dans le même véhicule volant qui parcourait des distances très rapidement. D'ailleurs, le paysage avait totalement changé autour du dra-car. Ainsi ils allaient sûrement rapidement arriver au village du père-noël. C'était sympathique tout de même, aulieu d'aller en Laponie pour aller voir un faux, à Dreamland on pouvait voir le vrai. D'ailleurs c'était sûrement lui qui était à l'origine du calendrier à cadeaux, donc il fallait le remercier!

Jake étant réconforté, il repassa l'épouvantail à Selene, ignorant totalement le fait qu'à présent, cette peluche était reliée à lui, et que si Selene pouvait le torturer à tout moment, c'est donc sans crainte qu'il se sépara de cette peluche. Après, il risquait gros, mais il le saurait plus tard, car l'ignorance était fort mal placée dans cette situation.

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'Joyeux noël' :

James espérait que Jake ne lui en voudrait pas, car après tout c'était lui qui avait attiré Jules dans ce monde sans son avis. Même si son meilleur ami semblait s'en tirer à merveille de son côté en se baladant, réapparaissant par surprise comme une sorte d'ange gardien. Il regarda autour de lui pour voir si il était monté lui aussi, et fut rassuré lorsque ses yeux croisèrent ceux de Jules qui le fixait. James lui sourit lui faisant un petit salut de la main, ne remarquant pas le sourcil levé de la personne qui pensait que le coucou lui était adressé.
Pas que le voyageur doutait de Sélène ou de Jake mais sans la présence de Dakota ou de Jules il se sentait un insécurité. Alors savoir qu'au moins l'un des deux était présent près de lui le rassurait.

James retourna son regard sur ses deux amis. La rouquine avait fait apparaître des bottes venus de nulle part ainsi qu'une peluche épouvantail trop mignonne qu'elle avait prêté à Jake pour qu'il se sente mieux. Un sourire s’afficha sur le visage de l'adolescent qui trouvait cette attention trop gentille. Malgré le fait que la rouquine ai du mal à cause de Liam avec les hommes qui le touchaient, du moins c'est que ce que James en avait conclus, elle tenait quand même à garder un terrain amical et ne pas rejeter Jake. Bien que ce dernier était gay, d'après leur conversation que les deux hommes avaient eut devant l'université. A ce souvenir, les joues de James se mirent à rougir et il regarda ses chaussures qui était dans un bien piteux état. Elle ne valait pas grand chose, aucune marque et avec les péripéties elles avaient bien vécus. James repensa aux bottes de Sélène qu'elle avait rangés dans son sac, prouvant qu'elle n'en avait pas besoin tout de suite. L'adolescent pinça les lèvres, n'osant pas lui demander de lui prêter ou bien de même les lui vendre si il fallait. Ca serait toujours un équipement de mieux contre le froid que ses chaussures qui ne protégeait même plus ses pieds de l'eau. James inspira pour se donner du courage, maudissant sa timidité parfois.

- Sélène ? Je peux t'emprunter tes bottes s'il te plait ?

Il avait parlé tellement vite que il n'était même pas sur que cette dernière avait compris. La tête toujours baissé regardant le sol de la cabine.